L’hommage de la ville de Caen à Joséphine Baker, artiste libre, engagée dans la Résistance et militante antiraciste
On connaît tous son jeu de jambes et ses danses endiablées. Joséphine Baker fut la meneuse des célèbres Folies Bergère en 1926. Mais derrière l’artiste extravagante qui a bousculé les conventions avec sa célèbre ceinture de bananes, Joséphine Baker est également une femme engagée.
Dès 1940, elle rentre dans la Résistance française. L'occasion pour la ville de Caen qui fête le 80e anniversaire de sa libération de rendre hommage à cette femme exceptionnelle dans une exposition, Joséphine Baker, libre et engagée, jusqu'au 3 novembre à l'hôtel de ville.
Tout au long de la guerre l'artiste, interdite de se produire sur scène par Vichy, sert activement la France Libre du Général de Gaulle, comme espionne puis comme ambassadrice. "Elle choisit de s'engager parce que c'est une femme d'idéal, elle était une grande résistante, c'est la raison pour laquelle nous avons fait le choix de cette affiche où on la voit en uniforme. Elle a été une espionne au service des Alliés et notamment de la couronne britannique", raconte Patrick Nicolle, Maire-Adjoint en charge de la culture de la ville de Caen.
Une icône toute trouvée pour la nouvelle exposition de la ville d'autant plus que cette vedette du music-hall s'est produite dans une célèbre salle caennaise. "En 1934, elle est venue se produire au Majestic, la grande brasserie très select du centre de Caen", poursuit Patrick Nicolle. L'exposition éclaire son parcours dans la Résistance à l'aide d'une trentaine de photos signées Paris Match, des objets personnels, des vidéos et même l'une de ses robes de scène. L'artiste qui avait choisi la France comme patrie avait acquis la nationalité française en épousant l'industriel et résistant Jean Lion en 1937. Son activité de résistante lui a valu le titre de sous-lieutenante de l’Armée de l’Air, la Légion d’honneur et la Croix de guerre en 1949, et d’être la 6e femme à entrer au Panthéon en 2021. La toute première femme noire.
Résistante et militante antiraciste
La paix revenue, Joséphine Baker met sa popularité au service de la lutte pour l’émancipation des Noirs aux États-Unis, son pays d’origine. Elle ouvre ses spectacles aux Afro-Américains, à l’heure où la ségrégation leur interdit encore l’accès aux espaces publics, avant de soutenir le mouvement pour les droits civiques de Martin Luther King. Le 28 août 1963, vêtue de son uniforme de la France libre, elle fut la seule femme à s’exprimer à ses côtés, lors de la grande marche pour les droits civiques à Washington. Ce jour-là, juste après sa parole, le leader noir allait pronocer son célèbre "I have a dream".
Mais Joséphine Baker, dont le cœur a toujours balancé entre la France et l'Amérique, qu'elle exprime dans J'ai deux amours, mon pays et Paris choisit finalement la France, moins raciste selon elle que son pays natal. C'est au Château des Milandes en Dordogne où elle crée son village du monde, capitale de la fraternité universelle, qu'elle a élevé ses 12 enfants adoptés de toutes nationalités. Sa grande famille "Arc-en-ciel" comme elle aimait l'appeler. Mais en 1968, l'artiste idéaliste qui menait grand train, se retrouve criblée de dettes. Le Château de Milande sera vendu aux enchères. C'est en 1975 qu'elle remontra sur scène pour éponger ses dettes. Elle s'éteindra à Paris la même année, épuisée.
L'exposition "Joséphine Baker, libre et engagée" est jusqu'au dimanche 3 novembre 2024, dans la salle du Scriptorium de l’hôtel de ville, esplanade Jean-Marie Louvel à Caen (Calvados).
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.