"La BD sur tablette est une prise de risque"
Alors que s'ouvre jeudi à Angoulême le 40 Festival international de la bande dessinée, un rapport souligne les difficultés du 9e art à s'exporter sur le marché des tablettes. Les explications de Sébastien Célimon, directeur du développement numérique chez Glénat.
Tandis que des milliers de passionnés et de professionnels sont attendus jeudi 31 janvier à Angoulême (Charente) pour la 40e édition du Festival International de la bande dessinée, le bilan 2012 de l'Association des critiques et journalistes de bande dessinée note l'apparition de "nouvelles pistes" de diffusion pour la BD, à travers "l'apparition des revues numériques". Mais l'auteur du rapport, Gilles Ratier, note toutefois que son "développement reste très faible".
Sébastien Célimon, directeur du développement numérique chez l'éditeur Glénat, analyse la situation pour francetv info.
Francetv info : D'après une étude citée par le rapport Ratier 2012, "90% des lecteurs de BD préféreraient le papier au numérique". Pensez-vous que cela contribue à ralentir le développement de la bande dessinée dématérialisée ?
Sébastien Célimon : Il y a plusieurs types de lecteurs. D'abord le Franco-Belge, très attaché à l'objet, à sa valeur, qui est presque dans une position de collectionneur. Ensuite, il y a le lecteur de la version numérique. Il a une approche différente des pratiques culturelles. Il n'a pas la même disponibilité, le même temps de lecture. Il lira une BD pendant un trajet en train, par exemple. Et puis il y a le jeune lecteur, qui fait partie de cette génération d'adolescents constamment penchés sur leurs téléphones portables. Il sait s'approprier l'espace numérique. Ensuite, tout dépend du lien, de l'éducation qu'on a reçue par rapport au livre. L'usage est aussi un effet de mode.
Sur les plates-formes de vente en ligne, il y a environ 3 000 titres disponibles, contre une offre papier estimée à 40 000 titres. Pourquoi une telle différence ?
Les éditeurs sont attentifs au premier gros succès en version numérique avant de proposer une offre plus conséquente. Mais il n'y a pas encore de gros succès probant. Nous regardons aussi ce qui se passe outre-Atlantique, en Corée et au Japon. Il faut désormais réfléchir à la stratégie à adopter sur ce nouveau support. On cherche à savoir s'il faut se contenter seulement de convertir des gros succès en version dématérialisée, ou bien les enrichir par le biais d'animations, de liens.
Le numérique est-il l'avenir de la bande dessinée?
C'est difficile à dire, mais il faut essayer de s'approprier les espaces numériques. Les versions dématérialisées peuvent aussi être le lien entre des espaces linguistiques et géographiques. Par exemple, avec la BD franco-belge, il y a une possibilité de connecter la francophonie via l'Alliance française. Mais je n'ai pas d'inquiétude pour le marché du papier.
Le rapport souligne aussi que "les relations entre auteurs et éditeurs n'ont jamais été aussi tendues". Quel est le fond du problème ?
Le problème global, et pas seulement dans la BD, concerne la rémunération des auteurs, mais aussi le type de contact qu'ils entretiennent avec les éditeurs. C'est vrai qu'il y a un peu de méfiance. Le climat n'est pas très serein. Par ailleurs, il y a des discussions entre le Syndicat national de l'édition et les représentants des auteurs.
A combien revient le coût de fabrication d'une BD numérique ?
Il n'est pas simple à estimer. La procession, la numérisation, le type de BD sont des paramètres à prendre en considération. Par exemple, une ancienne série jamais numérisée demande un processus beaucoup plus onéreux. La numérisation coûte environ 1 500 à 2 000 euros. Sachant que notre meilleure vente en volumes représente 100 exemplaires numériques contre 8 000 en version papier, il y a une prise de risque.
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