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Les artistes africains ont le vent en poupe

Les artistes africains sont de plus en plus visible sur la scène internationale, comme le montre le succès de l'exposition "Beauté Congo" à la Fondation Cartier. Ils devraient rapidement côtoyer les meilleurs créateurs occidentaux dans les grandes galeries et lors d'évènements internationaux, selon les spécialistes du continent.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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L'exposition "Beauté Congo" à la Fondation Cartier, un visiteur devant des oeuvres de Cheik Ledy
 (Ginies / SIPA)

"Dans deux trois ans, il ne sera plus nécessaire de faire des expositions d'art africain, les meilleurs seront dans toutes les grandes foires et autres biennales, ça va aller très vite", prédit André Magnin, le commissaire de "Beauté Congo" et l'un des premiers à avoir pris en considération les artistes africains du XXe siècle.
 
Pour l'heure, nuance l'expert, "le marché est balbutiant, il y a une  quinzaine de galeries spécialisées sérieuses dans le monde, on est à des années lumière d'un phénomène de mode".
              
Même si deux autres manifestations sont programmées d'ici la fin de l'année, "Folk Art africain ?" au Frac Aquitaine à Bordeaux (du 24 septembre au 19 décembre 2015)  et  "Lumières d'Afrique" au Palais de Chaillot (du 4 au 26 novembre).

Les Africains s'installent sur le marché mondial

Les artistes africains, André Magnin les connaît mieux que personne : il a été commissaire adjoint de l'exposition fondatrice "Les Magiciens de la Terre" au Centre Pompidou en 1989 et a parcouru le monde pour constituer la collection  de l'homme d'affaires Jean Pigozzi : 12.000 pièces récoltées en 20 ans et quelque 200 expositions sur tous les continents.
              
Certains artistes, comme le Congolais Steve Bendoma, revendiquent leur volonté de ne pas être enfermés dans un ghetto. Un faux problème pour André Magnin : ces créateurs "ont la chance d'avoir une reconnaissance internationale que beaucoup d'artistes français pourraient leur envier. Si on fait maintenant une expo où ils côtoient des grands noms, personne ne se souviendra d'eux".
 
Artprice le confirme: la scène contemporaine africaine "s'installe avec de plus en plus de vigueur sur le marché mondial".

De nouvelles collections se constituent          

Les créateurs "sont plus visibles depuis le début des années 2000", de nouvelles collections se constituent et des ventes aux enchères spécialisées entre Londres, New York et Paris se tiennent depuis les années 2009-2010,  souligne le leader mondial des banques de données sur la cotation et les  indices de l'art.
              
Avec des résultats modestes : le total des adjudications pour les oeuvres  d'artistes congolais en 2014 a atteint 326.000 dollars, une goutte d'eau dans  le marché global (15,2 milliards).
              
Et c'est Chéri Samba qui, en mai 2010 à New York, a réalisé avec 80.000 dollars la plus haute enchère historique pour un artiste congolais.
 
L'un des traits les plus frappants de "Beauté Congo" (jusqu'au 15 novembre) est  l'incroyable diversité des oeuvres : aquarelles délicates d'Albert Lubaki,  photos en noir et blanc de la vie nocturne à Kinshasa dans les années 1950 de Jean Depara, peintures politiquement subtiles de Chéri Samba, immenses maquettes de villes imaginaires de Bodys Isek Kingelez (décédé en 2015),  portraits superposant les motifs de JP Mika.  

Les artistes produisent peu      

"Le Congo est de loin le pays le plus inventif, explique André Magnin. Il y a une créativité de la vie de tous les jours qui n'a pas d'équivalent en Afrique".
Mais il y a de grands artistes dans d'autres pays comme le Nigeria ou la Côte d'Ivoire avec Frédéric Bruly Bouabré (décédé en 2014), dessinateur, poète et inventeur d'une écriture spécialement adaptée à la culture Bété. Certaines de ses oeuvres ont déjà été vendues par de grandes maisons d'enchères.   
              
Tout semble donc réuni pour que l'art africain conquière la planète. Reste un problème : "Les artistes africains produisent trop peu, explique André Magnin, Chéri Samba fait douze tableaux par an, dont six exceptionnels".
              
Autre souci, les faux, souvent consécutifs au décès de l'artiste. Un créateur africain fait parfois vivre plusieurs centaines de personnes : le célèbre photographe malien Malick Sidibé a affirmé financer 1.800 personnes. La mort d'un artiste est une catastrophe pour ses proches et descendants. D'où la tentation  de "poursuivre" l'oeuvre.     

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