Les Mille et une nuits à l'Institut du monde arabe
Les Mille et une nuits, ce n’est pas un livre, ce sont des livres, qui ont évolué au fil du temps. Des contes ont régulièrement été ajoutés par les copistes ou les traducteurs successifs.
A l’origine, l’histoire vient d’Inde ou de Perse. Le premier manuscrit connu, à Bagdad, en langue arabe, date du VIIIe siècle. "Les Mille et une nuits" présente une histoire cadre, toujours la même, et un nombre variable de contes. Pour l’histoire cadre, le roi Shahriyâr, trompé par sa femme, décide de se marier tous les jours avec une nouvelle jeune fille qu’il sacrifie le lendemain matin. La belle et intelligente Shéhérazade échappe à la mort en lui contant des histoires qui le tiennent en haleine. Elle interrompt tous les jours son récit de façon à ce que le roi veuille attendre la suite.
Une oeuvre qui a inspiré tous les arts
L’exposition présente 350 pièces, de nombreux manuscrits et éditions anciennes, arabes ou occidentales, des objets et des œuvres d’art inspirées par le livre merveilleux. Dans tous les domaines, car "Les Mille et une nuits" ont largement suscité l’imaginaire des peintres, musiciens, réalisateurs de cinéma, photographes…
La première traduction européenne des "Mille et une nuits" date du début du XVIIIe siècle. Antoine Galland, professeur d’arabe, découvre le livre grâce à un volume syrien du XVe siècle, qui comprend 35 contes. Il le traduit en français, tout en y ajoutant un certain nombre de contes, parmi lesquels ceux qui sont devenus les plus célèbres en Occident. En effet, c’est Galland qui a introduit dans les Mille et une nuits les histoires d’Aladin, d’Ali Baba et de Sindbad le marin.
La première version occidentale des "Mille et une nuits" est donc publiée en plusieurs volumes entre 1704 et 1717. Le succès est immense. Des orientalistes partent à la recherche de manuscrits plus complets. De faux manuscrits sont même inventés.
L'amour, Shéhérazade et l'érotisme
Entre manuscrits, peintures, et extraits de films, le visiteur peut s’installer dans un espace circulaire et sombre pour écouter des contes, dits en arabe ou en français. Car les Mille et une nuits, ce n’est pas seulement l’écrit, c’est aussi la tradition orale.
L’exposition aborde divers aspects du livre, notamment l’amour. Il est central dans les "Mille et une nuits", dans la tradition des lettres arabes où l’amour est fou, souvent impossible et malheureux. L’érotisme est présent dans les textes d’origine où les scènes d’amour sont présentées de façon crue.
Antoine Galland a édulcoré le manuscrit qu’il a eu entre les mains. Deux siècles plus tard Charles Mardrus réintroduira abondamment l’érotisme dans sa nouvelle traduction.
La figure de Shéhérazade est essentielle et a particulièrement inspiré les artistes. Jusqu’à Magritte qui la peint en 1948 et Picasso qui la dessine en 1968. L’exposition pose la question de ce qu’elle représente. En même temps, elle est le symbole de la parole émancipatrice contre la tyrannie des puissants, un défi à la mort. Mais pour d’autres, elle a enfermé les femmes arabes dans un stéréotype réducteur.
Un monde merveilleux
Les contes sont peuplés de créatures merveilleuses, djinns, esprits et autres mages et sorcières qui ont leurs racines dans le monde préislamique et ont séduit les Occidentaux. Ils sont évoqués par des objets magiques, chemise talismanique indienne ou bol divinatoire iranien, des gravures et des plaques de verre pour lanterne magique.
Des images racontent les engins extraordinaires qui transportent les héros des contes : tapis volant, lits volant, cheval volant.
Les Mille et une nuits ont inspiré de nombreux films. Des extraits de quelques minutes, ni trop longs ni trop courts, nous font entrevoir les univers qu’ils dépeignent. L’Orient imaginé par les Occidentaux, avec le « Palais des Mille et une nuits » de Georges Mélies (1905), en version coloriée ou « Il fiore delle mille e una notte » (La Fleur des mille et une nuits, 1973), de Pasolini, tourné en Erythrée, au Yémen, en Iran.
L’histoire vue aussi par les Orientaux, en noir et blanc, avec le film égyptien tourné en 1941 par Togo Mezrahi, autour de Shéhérazade.
Lire les "Mille et une nuits"
Reste à se plonger (ou se replonger) dans le texte, mais lequel ? Les traductions de Galland et Mardrus sont toujours disponibles en éditions pas chères (respectivement Flammarion et Robert Laffont, Bouquins). En 1986, René Khawam a publié une nouvelle traduction qu’il voulait fidèle aux manuscrits arabes (Phébus). N’y figurent donc pas Aladin ou Sindbad. La dernière traduction en date est l’œuvre d’André Miquel et Jamel Eddine Bencheikh pour la collection La Pléiade (2005). Elle est commentée et comprend les ajouts successifs. Une partie est disponible en poche (collection Folio).
Les Mille et une nuits, Institut du monde arabe, 1 rue des Fossés Saint-Bernard, Paris 5e
tous les jours sauf lundi
mardi, mercredi, jeudi 10h-18h
vendredi 10h-21h30
samedi, dimanche et jours fériés, 10h-19h
Jusqu’au 28 avril 2013
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