À Deauville, l'exposition "Mondes flottants" explore l'influence réciproque des artistes japonais et français, de l'époque impressionniste à nos jours
Berceau de l'impressionnisme, la Normandie célèbre, comme partout en France, le 150e anniversaire de la première exposition consacrée à ce mouvement artistique. L'exposition Mondes flottants, du japonisme à l'art contemporain au musée des Franciscaines, à Deauville, est présentée dans le cadre de la 5e édition du festival Normandie impressionniste. Jusqu'au 22 septembre 2024, elle réunit des estampes japonaises du XVIIIe et XIX siècle, des peintures impressionnistes et postimpressionnistes issues de collections de plusieurs musées français ainsi qu'une quarantaine d'œuvres plus récentes prêtées par le Mori Art Museum, le célèbre musée d'art contemporain de Tokyo.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, le Japon s'ouvre au monde occidental, sous la pression des États-Unis, après deux siècles d'autarcie. Les échanges commerciaux permettent aux artistes français de découvrir l'art japonais et, entre autres, les estampes gravées sur bois. Les impressionnistes s'en inspirent. Le japonisme, terme donné à l'influence de la civilisation japonaise sur les artistes et écrivains européens, est né.
"Le courant impressionniste n’aurait pas été ce qu’il est devenu sans la découverte et l’apport de ces œuvres japonaises."
Annie Madet-Vache, directrice du musée Les Franciscaines
Sur les murs de l'exposition Mondes flottants, le japonisme s'illustre notamment par le tableau d'Auguste Renoir, baptisé Coucher de soleil, vue de Guernesey. En peignant ce bord mer, le peintre célèbre, comme les maîtres des estampes, la nature, le "vide".
La vie contemporaine est aussi au cœur des estampes. Les impressionnistes s'en emparent aussi, avec des représentations de la ville. Le Bassin du Roy au Havre de Raoul Dufy (1907), présenté dans les allées de l'exposition, en est une parfaite illustration.
Si les sujets des impressionnistes évoluent avec l'art japonais, le style change également. Aplats de couleur, liberté dans les perspectives, cadrage décalé : les peintres s'imprègnent des codes de l'ukiyo-e, appelé aussi "monde flottant".
Ce mouvement artistique japonais populaire est utilisé par les maîtres des estampes. On le retrouve notamment dans le tableau de Jean-Francis Auburtin, Coucher de soleil au cap Myrthe, qui est visible en parcourant l'exposition.
Toutes ces œuvres du passé côtoient des créations japonaises contemporaines. Dans un jeu de miroirs, des artistes japonais présentent au public leur perception de cette période si charnière pour l'art européen. Il y a des sculptures de Lee Ufan, des photographies de Mari Katayama ou de Yasumasa Morimura ainsi que des gravures de Sachiko Kazama.
Une moderne Olympia (2018), cliché grand format de Yasumasa Morimura, s'inspire du célèbre tableau d'Édouard Manet Olympia (1863). L'artiste, spécialiste du détournement de portraits célèbres par son propre visage, a remplacé la jeune femme nue de Manet sur un lit par son corps dénudé. Un pied de nez à l'Occident qui a fréquemment féminisé la culture japonaise.
À noter la présence, dans un espace séparé des autres œuvres, de la somptueuse installation immersive de l'artiste contemporaine de renommée internationale Yayoi Kusama. Dots Obsession, prêtée par Les Abattoirs de Toulouse, est une création où plafond et murs sont recouverts de miroirs. Des sculptures rouges à pois blancs gonflées à l'hélium flottent dans cet espace. Un univers hypnotique et coloré qui évoque le pointillisme, mouvement pictural dont Vincent Van Gogh s'est inspiré.
Exposition Mondes flottants, du japonisme à l'art contemporain, Les Franciscaines, 145 B avenue de la République à Deauville – Du mardi au dimanche de 10h30 à 18h30 - Jusqu'au 22 septembre 2024.
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