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Ben Quilty, peintre australien sur le front afghan

Peintre australien, Ben Quilty a passé 24 jours embarqué avec les troupes australiennes en Afghanistan. Il expose actuellement à Sydney une vingtaine de toiles qui plongent dans la douleur et l'angoisse des soldats.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Temps de lecture : 2 min
Ben Quilty, peintre australien, devant une de ses toiles exposées à Sidney, de retour du front afghan
 (WILLIAM WEST / AFP)
Lauréat du prestigieux prix Archibald, qui récompense un portraitiste, Ben Quilty s'est rendu fin 2011 à Kandahar et à Tarin Kot, dans le sud de l'Afghanistan, avec le titre officiel d'artiste de guerre.
De ce voyage, l'artiste est revenu transformé. En regardant les soldats bénis par un prêtre avant de grimper à l'arrière de camions qui quittaient la base, il s'est souvent demandé si ces combattants finiraient par rentrer. "C'est une des choses les plus émouvantes que j'ai vue. Les hommes montent dans les véhicules, très calmes, très concentrés, et ils partent dans le désert", se souvient-il. "Chaque fois qu'on voyait quelqu'un franchir ces portes, on se demandait s'il reviendrait".
Leur existence là-bas est "assez prosaïque, mais avec des pics fréquents de moments terribles, vraiment horribles, bien plus que ne le relate la presse", témoigne l'artiste de 40 ans. A la question "comment c'était ?", le peintre avoue qu'il lui est impossible de répondre. "Il n'y a pas de réponse (pour des soldats) qui ont passé huit mois à arpenter le désert, confrontés à l'ennemi et à la mort. Il n'y a pas de réponse".

Invité par les autorités australiennes à se joindre aux soldats, une fois sur place, Quilty a tenté de se fondre dans le paysage, se demandant parfois ce qu'il fabriquait, lorsque les roquettes volaient dans la nuit et qu'il était allongé, "mort de trouille", sur son lit dans un conteneur blindé.
Le peintre australien Ben Quilty pose devant deux de ses toiles exposées à Sydney, de retour d'Afghanistan
 (WILLIAM WEST / AFP)
Les soldats, des gars "normaux, tranquilles, intelligents", étaient intrigués par sa présence. Et lui voulait leur demander: "pourquoi ?". "Ils doivent aller jusqu'au bout de leur mission", ajoute le peintre. "Beaucoup veulent partir mais ils ne parlent pas de ça. Ils ne peuvent pas imaginer d'en discuter avec les copains. C'est destructeur, il faut garder sa 
+merde+ pour soi, pour le bien de tous".
Une fois rentré en Australien, Ben Quilty a demandé à certains soldats de venir poser pour lui dans son studio, à la campagne. "Il était impossible de faire de mauvaises toiles avec ces personnes. Ce sont des sujets incroyablement puissants, et brisés aussi parfois".
Les portraits - d'immenses toiles avec des trainées épaisses de peinture dans des tons sombres, ou couleur chair - sont actuellement exposées à Sydney. Pas de paysage ou de troupes en action, mais les visages bouleversants de soldats, hommes et femmes.
Ces peintures parviennent ainsi à transmettre l'expérience de ces personnes et donnent un visage humain aux gros titres des journaux australiens, au-delà des tirs, des crashs d'hélicoptères ou des explosions de bombes.

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