Jacqueline, la dernière muse de Picasso, resplendit au Doyenné de Brioude
"Elle a le don de devenir peinture à un degré inimaginable", disait le peintre de la jeune galeriste de 45 ans sa cadette qu'il a épousée en 1961.
Muse, compagne, modèle: Jacqueline Roque, la dernière épouse de Picasso, qui a marqué les 20 dernières années de sa vie, est mise en lumière au Doyenné de Brioude (Haute-Loire) qui lui dédie une exposition. Le peintre disait qu'"Elle a le don de devenir peinture à un degré inimaginable", parlant de cette galeriste de 45 ans sa cadette qu'il devait épouser en 1961.
"Subjugué par sa beauté"
Picasso, l'oeuvre ultime: hommage à Jacqueline regroupe une cinquantaine de toiles, sculptures, gravures et céramiques prêtées par des particuliers ou le musée Picasso de Paris, visibles jusqu'au 16 octobre à Brioude, dans cette ancienne demeure médiévale classée monument historique.
Le couple se rencontre à l'été 1952 alors que cette jeune femme aux immenses yeux noirs s'occupe de la galerie Madoura à Cannes. Il a 71 ans, elle 26. L'artiste "est subjugué par sa beauté, son port de tête et son regard", écrit Jean-Louis Prat, le commissaire de l'exposition, dans l'album de présentation. "L'âge venant, sa relative instabilité sentimentale qui a alimenté les gazettes et nourri le mythe du minotaure avide de chair fraîche qui lui collait à la peau, est remise en cause par sa rencontre avec Jacqueline", souligne la conservatrice Brigitte Léal dans ce livre.
L'exposition a le mérite de mettre en valeur le rôle essentiel de la dernière compagne de cet artiste collectionneur de femmes, dont le comportement fait parfois polémique à l'ère #metoo.
"L'oeuvre ultime n'est pas une oeuvre tardive, il y a quelque chose qui fait que Picasso retrouve une vitalité, due à la présence de sa muse", explique à l'AFP Jean-Louis Prat, qui a lui-même connu Jacqueline. A partir de 1953, avant leur mariage, Picasso la peint sans relâche, de manière frénétique. On la retrouve 160 fois dans ses oeuvres, la seule année 1963.
Le couple reste ensemble jusqu'à la mort du peintre en 1973. Jacqueline, elle, se suicide en 1986 après avoir sombré dans la dépression. "C'était une femme qui avait une personnalité, une intelligence, une vivacité. Elle avait en elle quelque chose de particulier, qui a été mis en évidence dans toutes les oeuvres que l'on voit d'elle", se souvient le commissaire de l'exposition, décrivant une femme "forte et frêle à la fois".
"Une muse active"
Parmi les tableaux présentés, de nombreux portraits: en costume turc, en djellaba, en tenue d'Arlésienne, avec un chien ou un chat, coiffée de différents chapeaux, assise, les jambes repliées ou allongée. "L'oeuvre ultime est un témoignage de ce risque permanent que prend l'artiste porté jusqu'au bout par le désir de faire face et de dire sa vérité au quotidien", dit Jean-Louis Prat.
En 1955, Pablo Picasso se lance dans des variations d'un tableau célèbre d'Eugène Delacroix, Les femmes d'Alger, fasciné par la ressemblance d'un des sujets avec Jacqueline. Dans ses variations du Déjeuner sur l'herbe et de l'Olympia de Manet, une femme jouant avec un oiseau ou un chat prend souvent les traits de sa muse.
"Cette compagne de tous les instants lui inspire aussi des sujets auxquels il n'aurait pas pensé des années plus tôt", explique Jean-Louis Prat. Comme ces nouveaux personnages de mousquetaires qui surgissent à partir de 1967, mi-espagnols, mi-hollandais ou Le Matador peint en 1970. "On voit que c'est une muse active, par exemple à travers toutes les photos qu'elle a réalisées. Elle participe à la vie au quotidien. Elle est présente dans l'atelier, dans la maison, en permanence", ajoute-t-il.
L'exposition est jalonnée d'agrandissements de photographies prises par Jacqueline elle-même. Pour Brigitte Léal, "les tableaux empilés dans l'atelier et qu'elle s'amuse à photographier avec un incontestable talent apportent la preuve de sa secrète domination".
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