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"Peintres et Vilains", un rendez-vous autour de l'estampe de Dürer à Deroubaix

La nouvelle exposition de la Bibliothèque Municipale de Lyon présente jusqu’au 30 avril un dialogue autour de l’estampe. De Dürer à Deroubaix, de Goya à Cadio, près de 300 gravures anciennes côtoient des œuvres contemporaines. Organisée conjointement par la BmL et l’URDLA, la rétrospective "Peintres et Vilains - imprimer l’art", offre un parcours à travers les techniques et les âges de l'estampe.
Article rédigé par Odile Morain
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
"Peintres et Vilains - imprimer l'art" une invitation dans le voyage de l'estampe à travers les âges 
 (JL Bouchier, BmL)

Organisée à l'initiative de la Bibliothèque Municipale de Lyon et de l'URDLA (Centre international de l’estampe et du livre), l'exposition "Peintres et Vilains" s'appuie sur le livre de Maurice Pianzola publié en 1962, ouvrage de référence relatant la Guerre des Paysans qui sévit en Allemagne et dans le Nord de la France aux environs de 1525. Le roman, construit comme une enquête policière a surtout permis de montrer comment les grands artistes de la Renaissance (Lucas Cranach l’Ancien, Albrecht Dürer, Urs Graf, Hans Holbein le Jeune…) avaient accompagnés la Révolte des Paysans. 

La sainte face du Christ Claude Mellan gravure au burin 
 (Collection BM Lyon)
L'exposition de la BmL propose une déambulation non linéaire dans l'univers de l'estampe autour d'une cinquantaine d'oeuvres rares tirées du fonds ancien, signées de la main de Dürer, de Delacroix, de Rembrandt ou de Goya.

Un voyage qui permet de croiser les regards autour des techniques, des âges, des idées et qui ne s'interdit aucune corrélation. 
"Faust", de Goethe illustré par Eugène Delacroix 
 (Odile Morain)

Des couples improbables

Avec "Peintres et vilains" les organisateurs de l'exposition, Fanny Schulmann et Cyrille Noirjean, ont surtout cherché à s'éloigner du regard purement scientifique quant à l'oeuvre imprimée. L’’exposition se lit donc comme un dialogue entre les œuvres issues du fonds ancien de la bibliothèque et celles plus contemporaines de l’URDLA.

Ainsi, en ouverture le duo qui accueille le visiteur peut surprendre. L’immense toile de Damien Deroubaix (1,60mX1,20m) édité en 2008 par l’URDLA côtoie la Némesis de Dürer. Une résonnance évidente pour les conservateurs. "Les motifs repris et détournés par l’artiste contemporain s’inscrivent dans la continuité de l’œuvre", commente Fanny Schulmann
Hommage à Albrech Dürer par Vincent Deroubaix (Xylogravure 160X120m) 
 (Odile Morain)
Si ces couples inédits posent un regard sur la création passée, il s’agit aussi pour les organisateurs de jouer avec l’humour, la poésie et parfois l’ironie. L’ours Issac Bernardo créé par Charlemagne Palestine qui dialogue avec "La melencolia" de Dürer se passe de tout discours intellectuel.
A côté de "La Melencolia" réalisée par Dürer en 1514 au burin, les ours de Charlemagne Palestine ont été créé en 1991 à la peluchographie 
 (Odile Morain)

Cadavres exquis et surréalisme

"Peintres et Vilains – imprimer l’art"  se découvre par jeux d'associations, un peu comme un cadavre exquis. Une volonté muséographique qui tient à  la passion de Max Schoendorff (1934-2012) pour le surréalisme et l’illustration. Figure lyonnaise de l’art contemporain, cet esthète crée en 1978 à Villeurbanne l'URDLA (Utopie Raisonnée pour les Droits de la Liberté en Art). Au sein de ce collectif militant, il apprend à remettre les machines en marche, et construit un imaginaire fortement marqué par le mouvement surréaliste. 
Interlope, Max Schoendorff, 1934, URDLA
 (URDLA)

L’exposition dévoile des œuvres contemporaines fortement inspirés par le mouvement Dada où le texte prédominait parfois sur le dessin. Ainsi les sept tableaux de Rémy Jacquier réalisés à la linogravure racontent une histoire en trois langues (l'allemand, l'anglais et le latin).
  (JL Bouchier, BmL)

Le livre comme support d'illustration

Cette grande tradition de la rencontre entre un poète et un peintre est marquée par la place faite au livre dans les espaces d’exposition. Le livre d’artiste plus précisément, est le lieu idéal d’un dialogue entre l’estampe et de texte. 
Neuf lithographie de Hugues Weiss illustrent le livre d'Harry Matthews 
 (Odile Morain)

Une œuvre s’articule précisément autour de cette notion. "L’hommage à Rabelais" est un ensemble de sept gravures réalisées en 2002 par Erik Dietman, qui fait résonner forme et fonds de cette pratique spécifique de l’image imprimée.
Hommage à Rabelais - Erik Dietman 1937, Jönköping, Suède – 2002, Paris, France
	 
 (Odile Morain)

L'estampe: medium contestataire 

La dimension politique et subversive de l’estampe au fil  âges est mise en exergue dans la dernière salle d’exposition. La volonté des conservateurs était une fois encore de mélanger les genres et les techniques. 
"Modo de volar" Francisco Goya - Eau-forte, aquatinte et pointe sèche et planche de Rahan dans la même vitrine
 (Odile Morain)

Clin d’œil ironique aux épisodes contestataires, une planche de Rahan publiée dans Pif Gadget est disposée dans la même vitrine que "Modo de Volar" de Goya. Tout comme les petites photos en noir et blanc de Marcelle Vallet jouxtent l’immense Baaders-Mars d’Onuma Nemon.
Photo de Marcelle Vallet qui retrace la révolte des employés de chez Lip aux côtés l’immense peinture d’Onuma Nemon qui rend hommage à l'activiste Baader
 (Odile Morain)
L’estampe et son lien intime avec les idées révolutionnaires est magnifiée par les nombreuses œuvres de Dürer qui jalonnent toute l’exposition.

Graveur des notables et de l’église, sa pratique de l’estampe était aussi destinée à soulever les masses. 
Pièces appartenant à la série l'Apocalypse d'Albrecht Dürer, vers 1797-1798 - Bois
 (JL Bouchier, BmL)

Entrez dans la matrice par accident

Pour les organisateurs de la rétrospective, la question des techniques de gravures a été au centre du propos. Procédé de reproduction artistique longtemps gardé mystérieux, dans le secret des ateliers, l’estampe se dévoile à travers toutes ses matrices.
Le cimetière de pierres lithographiques
 (Odile Morain)

Pour entrer directement dans le vif du sujet, le visiteur est accueilli par "un cimetière de pierres lithographiques". Petit clin d’œil de conservateur qui met en relation cette technique du multiple avec la destruction programmée des supports. Cyrille Noirjean rappelle à cet effet, que toutes les pierres sont théoriquement détruites. Le parcours ne fait pas l’impasse sur les accidents. Le papier déchiré ou tâché fait aussi partie de l’histoire de l’art.
Lucie Chaumont. Extraction-Fossile Collections de l'URDLA
 (URDLA)

Lithographie, Eaux-fortes, aquatintes, xylogravure, burin, mais aussi photographie, une multitude de techniques permettent de mettre en exergue l’estampe.
La technique de l'eau forte expliquée dans cet ouvrage
 (Odile Morain)

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