À Lyon, la photographe Edith Roux expose ses saisissants portraits d’Ouïghours exilés, masqués ou découverts

La galerie "Le Bleu du Ciel", à Lyon, présente le travail engagé de la photographe Edith Roux sur la diaspora ouïghoure. Certains visages sont découverts, d'autres masqués, car même en exil, ils continuent d'être espionnés par la Chine. L'exposition est à découvrir jusqu'au 2 mars 2024.
Article rédigé par Inas Hamou Aldja
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Une famille ouïghoure faisant partie de la série de photo de l'exposition "Les Exilés", prise à La Haye aux Pays-Bas. (EDITH ROUX)

Les Ouïghours subissent une répression des autorités chinoises qui les internent dans des camps. Cette ethnie minoritaire de religion musulmane vit en Chine dans la région du Xinjiang, appelée le Turkestan oriental. Sur les réseaux sociaux, les Ouïghours ont été dépeints comme une voix silencieuse. Souvent, les photographies dans lesquelles ils apparaissent montrent un visage caché par un masque aux couleurs du drapeau ouïghour, recouvert d'une main leur ordonnant le silence aux couleurs du drapeau chinois.

"Les Exilés"

Inspirée par ces visages cachés, Edith Roux, photographe, est partie à leur rencontre il y a dix ans. À la frontière du documentaire, elle s'est rendue sur place dans la région autonome du Turkestan oriental, pour son travail intitulé Les Dépossédés, dont une série de photos a finalement abouti à un livre du même nom. 

Depuis quelques années, les Ouïghours subissent une répression des autorités chinoises qui les internes dans des camps. Une photographe expose depuis quelques jours son nouveau travail cette fois sur la diaspora. L'expo s'appelle les exilés et a lieu à la galerie Le Bleu du Ciel à Lyon.
Les exilés Depuis quelques années, les Ouïghours subissent une répression des autorités chinoises qui les internes dans des camps. Une photographe expose depuis quelques jours son nouveau travail cette fois sur la diaspora. L'expo s'appelle les exilés et a lieu à la galerie Le Bleu du Ciel à Lyon. (France 3 Rhône-Alpes : M. Figureau / S. Allec / D. Mollard)

Devant l'ampleur du drame et la difficulté d'accéder aux détenus dans les camps, elle décide de faire le tour du monde pour photographier "les exilés", nom de la deuxième exposition. Elle présente une galerie de 30 portraits de la diaspora ouïghoure prise dans différentes villes : Paris, Munich, Istanbul, Washington...

"Contrairement au gouvernement chinois qui les déshumanise en les envoyant dans des camps, moi ce que j'essaie de faire, c'est de ne pas les montrer comme des victimes, mais de les présenter dans toute leur humanité et la richesse de leur culture."

Edith Roux

Photographe

Même lorsqu'ils résident à l'extérieur de leur pays, les Ouïghours sont sous l'étroite surveillance des autorités chinoises. L'artiste a donc tenu compte de la volonté de certains d'entre eux de ne pas révéler leur identité, remplaçant leur visage par une surface spéculaire floue.

Il y a des visages qu'on peine à oublier. Pour Gilles Verneret, directeur de la galerie Le bleu du ciel, la photographie suscite la prise de conscience, au-delà d'être un outil artistique et d'archive historique : "Ce qui m'a toujours motivé, ce sont les injustices. Nous vivons dans un monde où il y a urgence, et il me semble que l'art doit rendre compte de cette urgence", explique-t-il.

Une culture menacée de disparition

Les photos révèlent aussi leur adaptation à leur nouvelle vie d'exilés. Ainsi des scènes de la vie quotidienne en Occident où se côtoient petits objets de la culture ouïghoure, plats ou vêtements traditionnels, avec les traces de leur assimilation dans leur pays d'accueil respectif.

Dilnur Reyhan, membre de la diaspora Ouïghour, sur le parvis des droits de l’homme à Paris. (Edith Roux)

Les photos sont accompagnées d'extraits de textes poétiques ouïghours calligraphiés et de musique. À noter que le "muqam" ouïghour, ensemble de chants de danse et musique populaires ou classiques, a été inscrit en 2008 par l'UNESCO au patrimoine culturel immatériel de l'humanité. L'objectif de l'exposition est que chaque visiteur emporte avec lui des fragments de ces poèmes et les souvenirs de ces photos, dans le but de faire perdurer la culture ouïghoure menacée de disparition. Un véritable travail de mémoire.

L'exposition "Les Exilés" est à découvrir jusqu'au 2 mars 2024 dans l'espace Le bleu du ciel, 12 rue des Fantasques à Lyon.

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