À Pau, les exclus de la société dans l'oeil du viseur de Jane Evelyn Atwood depuis près de 50 ans
Des prostituées aux enfants aveugles, en passant par les femmes détenues, Jane Evelyne Atwood porte son regard de photographe sur un monde que la société ne veut souvent pas voir. L’exposition Une photographe en immersion plonge le visiteur dans son univers, sans voyeurisme.
"En France, on aime bien dire que je photographie des marginaux. Je n’aime pas trop cette expression", prévient Jane Evelyne Atwood. "Ce sont des gens qui sont à part de nous pour diverses raisons", explique-t-elle. Et dès ses débuts de photographe, Jane Evelyne Atwood s’intéresse à ces hommes ou femmes hors normes, souvent ignorés. "J’ai toujours été attirée par les personnes qui sont dans une certaine détresse", reconnaît-elle.
En 1976, alors qu’elle vit en France depuis cinq ans, la jeune new-yorkaise se passionne pour la vie des prostituées de la rue des Lombards à Paris. Ce premier travail donnera lieu à un livre. Trois ans plus tard, elle s’intéresse aux prostituées transgenres de Pigalle.
À chaque fois, elle s’immerge dans cet univers, crée des liens et livre des clichés qui racontent parfois du désarroi, de la misère, mais toujours avec pudeur. "Il faut comprendre qu’à l’époque, en 1979, les hommes qui s’habillaient en femme n’étaient pas tous de vrais trans. Il y en avait qui faisait ça pour gagner leur vie", raconte-t-elle. Ces clichés font partie des photographies présentées au Parvis de Pau. "C’est presque un carnet de voyage", raconte son directeur artistique. "Le piège, c’était le voyeurisme et elle l’a évité", se félicite Marc Bélit.
Le premier visage du sida
En 1980, Jane Evelyne Atwood poursuit son travail de photographe humaniste en réalisant une série sur les enfants aveugles à travers le monde. Un reportage récompensé par le prix W. Eugène Smith. La Franco-Américaine est également la première photographe en Europe à avoir donné un visage au sida, maladie alors taboue à l’époque. En 1987, elle photographie Jean-Louis, séropositif et diminué par le VIH. Elle le suit pendant quatre mois, juste avant son décès.
Deux ans plus tard, elle s’attaque à un autre sujet peu exploré : les conditions de vie des femmes incarcérées. Elle accède à une quarantaine de pénitenciers en Europe et aux États-Unis. Les années 2000 seront marquées par ses reportages sur les ravages des mines antipersonnel au Mozambique, en Angola ou encore en Afghanistan. Aujourd’hui, les clichés de Jane Evelyne Atwood sont régulièrement exposés et figurent dans de nombreuses collections privées et publiques.
"Jane Evelyn Atwood, une photographe en immersion" – Le Parvis Espace Culturel, centre commercial E. Leclerc Tempo, avenue Louis Sallenave à Pau – Jusqu’au 6 avril 2024 – Du lundi au samedi : de 10h à 19h.
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