Décès du photographe de portrait sénégalais Oumar Ly
"Le Monsieur est parti. Brutalement. Laissant derrière lui une grande famille et des archives photographiques uniques, relatant la vie des habitants de Podor et des villages bordés par le fleuve, face à la Mauritanie", a annoncé Frédérique Chapuis, journaliste qui l'avait découvert et avait publié un livre de ses photos ("Oumar Ly, portraits de brousse", 2009, éditions Filigranes).
Né en 1943, Oumar Ly, dont le père était marabout et maraîcher, vendait ses légumes au marché quand, adolescent, il découvre la photographie. Un expatrié lui tire le portrait et lui donne le cliché : il est fasciné, l'appareil l'a "charmé", disait-il, et il rêve alors de faire lui-même des photos. Dès qu'il peut, il s'achète un Kodak Brownie flash d'occasion, et commence à prendre ses copains et sa famille en photo.
Portraits en studio et dans les villages
Il apprend le métier en autodidacte et ouvre son studio, le studio Thioffy, en 1963, toujours à Podor, au bord du fleuve Sénégal, à la frontière de la Mauritanie. Ayant peu de contacts avec d'autres photographes, il expérimente tout seul, sans l'influence de maîtres. Au début, il fait des photos d'identité, puis des portraits d'enfants, d'adultes, de couples, en groupe ou en famille, dans son studio, où il a imaginé des décors comme la Mecque ou un Boeing 747.Il se rend aussi dans les villages environnants où il improvise des fonds : un pagne ou une natte tendue par des mains auxiliaires, une portière blanche de la 2CV du sous-préfet.
De Podor à la reconnaissance internationale
Ainsi, il a fait le portrait d'une région pendant quarante ans, en enregistrant les mutations, les modes, les attitudes, des tenues traditionnelles aux pattes d'éléphant et aux minijupes. Il accumule dans son studio des milliers de négatifs qui constituent une véritable archive. Les activités sont prospères dans les années 1960 et 1970 mais il souffre ensuite du développement de la couleur, puis de celui de la photographie numérique.Ses dernières années sont celles de la reconnaissance, avec une exposition à l'Institut Léopold Sédar Senghor de Dakar en 2009, puis aux Rencontres de la photographie africaine de Bamako la même année. En 2010, il était exposé au Musée africain de Lyon, dans le cadre de la manifestation "Afrique et créations", et à la biennale de Brighton. A l'automne 2013, il était à Paris, au Comptoir général, où il avait reconstitué un studio éphémère pour les Parisiens.
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