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Erwin Blumenfeld : du dessin à la photographie de mode au Jeu de Paume

Le Jeu de Paume propose de découvrir l’ensemble de l’œuvre d’Erwin Blumenfeld, célèbre photographe de mode à New York qui a débuté avec des dessins et des collages à Berlin, où il fréquentait les artistes dadaïstes (jusqu’au 26 janvier 2014).
Article rédigé par Valérie Oddos
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Erwin Blumenfeld - A gauche "Soutenez la Croix-Rouge", variante de la photographie de couverture de Vogue US, 15 mars 1945, Collection Henry Blumenfeld - A droite, Marguerite von Sivers sur le toit du studio 9, rue Delambre, Paris 1937, collection Yvette Blumenfeld Deorges Deeton / Art+ Commerce, New York, Gallery Kicken Berlin, Berlin
 (The Estate of Erwin Blumenfeld)

Erwin Blumenfeld (1897-1969) est célèbre pour les photos de mode qu’il a réalisées aux Etats-Unis dans les années 1940 et 1950 et qui lui vaudront les meilleures rémunérations de la profession. Quand il s'exile à New York pendant la guerre, il a déjà une longue carrière artistique derrière lui, à Berlin, Amsterdam et Paris où il a côtoyé les surréalistes. Ses photos de mode, notamment en couleur, témoignent de ses expérimentations antérieures.
 
C’est cette histoire que raconte le Jeu de Paume, depuis ses premiers dessins.

Erwin Blumenfeld, Cecil Beaton, 1946, collection particulière, Suisse
 (The Estate of Erwin Blumenfeld)
 
Blumenfeld dessine avant de photographier
Erwin Blumenfeld est né en 1897 dans une famille juive bourgeoise de Berlin. Il reçoit son premier appareil photo à dix ans et fait ses premiers autoportraits à quatorze mais c’est plus tard qu’il deviendra vraiment photographe. A seize ans, il doit travailler dans un magasin de confection féminine et à dix-huit, il est mobilisé. Entre-temps, il a fréquenté les milieux dadaïstes et s’est lié avec George Grosz.
 
Après la guerre, Blumenfeld part pour Amsterdam où il va tenir un magasin de maroquinerie. Toutes ces années, il produit des dessins, des collages, des montages, qui intègrent des fragments de texte et révèlent son humour. Son travail graphique précède donc son activité de photographe. "Il n’était pas intéressé par la représentation du réel", explique Ute Eskildsen, commissaire de l’exposition : "Il s’intéressait à la fabrication d’images, l’interprétation et l’expérimentation."
Erwin Blumenfeld, Voile mouillé, Paris 1937, Collection particulière, Suisse
 (The Estate of Erwin Blumenfeld)
 
Les premiers portraits à Amsterdam
A Amsterdam, il commence à faire des portraits de ses amis et de ses clientes.  Dans le laboratoire qu’il a installé à l’arrière de sa boutique, il s’amuse avec le cadrage et le contraste. Il se met aussi au nu, un genre qu’il développera davantage quand il s’installera à Paris, à partir de 1936. Là, il rencontre les photographes de l’avant-garde française et explore la technique. Il fait de nombreuses solarisations (inversion des densités), souvent sur une partie seulement de l’image. Par exemple, il solarise la moitié d’un visage. Il fait des surimpressions, superposant un visage de femme et un crâne, un portrait et un squelette.
 
Il distord ses images, à la façon de Kertesz, fractionne ses nus.
 
Toute sa vie, Blumenfeld fait des autoportraits, sur lesquels il mène les mêmes expériences. Il se met en scène, avec un masque, nu avec son appareil photo en guise de feuille de vigne. Il se découpe le profil dans un portrait de face. Il s’éclaire par en dessous, créant un personnage inquiétant, il se déforme en reflet…
Erwin Blumenfeld, Minotaur, Dictator, Paris, vers 1937, Collection Yvette Blumenfeld Georges Deeton / Art+Commerce, New York, Gallery Kicken Berlin, Berlin.
 (The Estate of Erwin Blumenfeld)
 
New York, la mode et la couleur
En France, il fait quelques photos d’architecture. Il transforme les vitraux de la Sainte Chapelle, fortement contrastés, en dentelle, capture l’ombre de la Tour Eiffel sur des immeubles, et photographie les artistes qu’il côtoie, de Juliette Gréco et Yvette Guilbert à Matisse, Georges Rouault ou Marianne Breslauer.
 
La montée du nazisme et des dictatures en Europe inspire au photographe un photomontage d’Hitler en tête de mort ou un "Dictateur" à tête de veau. Le photographe, juif allemand en France, est interné dans plusieurs camps, avant de s’enfuir pour New York, où il commence à travailler pour les magazines de mode. Il y reste et devient un des photographes de mode les plus célèbres. Sa série sur la Tour Eiffel, où les mannequins posent au-dessus du vide, a fait sensation et, rapidement, il travaille pour Harper’s Bazaar, puis pour Vogue, Life, Look, Cosmopolitan.
Erwin Blumenfeld, variante de la photographie parue dans Lif Magazine et intitulée "The Picasso Girl" (modèle : Lisette), vers 1941-1942, Collection Henry Blumenfeld
 (The Estate of Erwin Blumenfeld)
 
Il travaille en noir et blanc et, assez rapidement, en couleur, appliquant à ses photos de mode toutes les recherches qu’il a pu faire à Paris, même si "son travail devient plus graphique, peut-être un peu plus illustratif", selon les mots de la commissaire. Le photographe duplique un profil en plusieurs couleurs, démultiplie une image, utilise des effets d’eau.
 
En 1961, Blumenfeld commençait à sélectionner des images pour un projet de livre, "Mes 100 meilleures photos". Il paraîtra en 1979, dix ans après sa mort à Rome (ces cent photos sont montrées dans l’exposition, sous forme de diaporama).

Erwin Blumenfeld (1897-1969), Photographies, dessins et photomontages, Jeu de Paume, 1, place de la Concorde, 75008 Paris
tous les jours sauf le lundi, le 25 décembre, le 1er janvier et le 1er mai (fermeture à 17h les 24 et 31 décembre)
mardi : 11h-21h
mercredi à dimanche : 11h-19h
tarifs : 8,50 € / 5,50 €
entrée gratuite pour les étudiants et les moins de 26 ans le dernier mardi du mois, de 17h à 21h
jusqu'au 26 janvier 2014

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