Light painting : Jadikan sort de l'ombre les friches industrielles
Ancien taggeur puis pochoiriste, Jadikan alias Guilhem Nicolas ("jadikan" vient du malaisien "créer, transformer") a découvert le light painting (littéralement "peindre à la lumière") un peu par hasard en 2005 au Laos, grâce à ce qu’il appelle "une erreur photographique". À l’aide d’un appareil compact numérique, il photographie par accident le mouvement d’un mégot de cigarette dans un environnement éclairé par une bougie. Depuis, il a affiné sa technique et ses outils mais ses images sont toujours le résultat d'un long temps de pose avec des sources de lumières en mouvement. Tous les effets lumineux sont créés en temps réel, sans retouche à postériori ni photoshop.
L'univers des friches industrielles
Jadikan est un adepte des friches industrielles, des bâtiments laissés à l’abandon. Autant dire que la proposition de la Maison Bergès - Musée de la Houille blanche à Villard Bonnot (Isère) ne pouvait le laisser indifférent. Ce musée, consacré à la mise en valeur du patrimoine industriel isérois, a demandé à Jadikan d’exercer son art au cœur de plusieurs sites hydroélectriques, barrages, les centrales aujourd’hui inexploités, situés dans les vallées de la Romanche et du Grésivaudan."La nuit se transforme en histoire"
Des lieux, autrefois symboles de progrès, où chaque détail raconte une histoire : "Quand je vais faire des images, la nuit se transforme en histoire" explique Jadikan, "parce qu'il faut installer le pied, trouver un cadrage, rentré dans un sorte de transe pour créer...Tous les détails de la friche où il y a eu de la vie vont faire partie de cette histoire de la création".Chaque photo demande une préparation rigoureuse : outre le cadrage, il faut aussi réfléchir à la manière de se mouvoir dans l'espace, à la gestuelle. De quoi nous éclairer sur le titre de l'exposition de Villard-Bonot, "Chorégraphies nocturnes".
Reportage : France 3 Alpes - J. Pain / F. Ceroni / P. Caillat
Bergès - Jadikan, des points communs
La commande du Musée de la Houille blanche rentre parfaitement dans le cadre du travail artistique de Jadikan. Mais au-delà de cela, il y a aussi de nombreux points communs entre le photographe et celui qui a donné son nom au lieu, Aristide Bergès. C’est en tout cas l’avis de Sylvie Vincent, responsable de la Maison Bergès - Musée de la Houille Blanche. Selon elles, les deux hommes, passionnés de nouveaux procédés, "se serait bien entendus". "Et quand il faisait ses expérimentations, Aristide Bergès, comme Jadikan, n’avait peur de rien".Le pionnier de la houille blanche
Cet Ariégois de naissance, issu d’une famille de papetiers avait le goût de l’innovation et l’énergie (voire un peu de folie) pour faire aboutir ses projets. Il fut un pionnier de la "houille blanche". Le terme désigne (par opposition au charbon) l’énergie produite par les chutes d'eau.En 1868, Bergès s’installe à Lancey dans le Grésivaudan (une vallée entre Grenoble et Montmélian) pour y créer sa propre fabrique de pâte de bois. Associé à un médecin qui possède un vieux moulin sur le torrent de la Combe de Lancey, il installe la première haute chute de la région, de près de 200 m de dénivelé, pour alimenter une turbine faisant fonctionner deux défibreurs servant à râper le bois.
Dans les années 1880, Bergès construit une seconde conduite forcée et adjoint une dynamo Gramme aux turbines, produisant ainsi de l’énergie hydroélectrique. Il baptise cette dernière du nom de "Houille blanche" et en fait la promotion lors de l’Exposition Universelle de Paris en 1889.
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