Lyon s'offre aux enchères la plus vieille photographie de la ville, un cliché de la Saône et de la Croix-Rousse datant de 1840
Longtemps le document est resté dans l'ombre. Sa mise en vente par la maison parisienne Oger-Blanchet l'a sorti de l'oubli. La plus vieille photographie de Lyon éclaire d'un jour nouveau l'histoire de la ville. Ce daguerréotype nous montre la Saône, un pont aujourd'hui disparu et la colline de la Croix-Rousse comme on ne l'a jamais vue. Selon l'expert en photographies anciennes Serge Plantureux, elle aurait été prise en 1840 à l’occasion des Excursions Daguériennes, un recueil de photos réalisé à l’époque par des opticiens, pionniers de la discipline.
La qualité des détails
"Tout concorde à dire que nous sommes là devant une des vues créées lors de l’invention de la photo, explique le spécialiste. Ce pont ainsi que les passerelles qui sont derrière ont été affectés et détruits par la grande inondation de la Saône du mois de novembre 1840. C’est une manière de dater qui est assez forte."
Retrouvé chez les descendants d’un célèbre opticien lyonnais de la fin du 19e siècle, le cliché a fait l’objet d’une vente aux enchères exceptionnelle à l'Hôtel Drouot à Paris. Adjugé 16 744 euros à la Bibliothèque municipale de Lyon (BML) via une préemption de l’État, la photographie avait été mise à prix 6 000 euros en raison de l’extrême qualité des détails, notamment sur le pont du Change, un pont médiéval sur lequel étaient construites des maisons. On ne le connaissait jusqu’ici qu’en dessin.
On est sur une photographie qui est très primitive avec des procédés qui sont extrêmement complexes et qui sont pourtant déjà au point. On reconnaît des personnages sur le pont, on reconnaît les embrasures de fenêtres. Ça donne une qualité documentaire à cette œuvre extraordinaire.
Adrien Blanchetcommissaire-priseur
Le daguerréotype, qui doit son nom à son inventeur Louis Jacques Mandé Daguerre, est une photographie positive formée sur une plaque de cuivre recouverte d’une fine couche d’argent. Sa fabrication longue et minutieuse a eu beaucoup de succès entre 1839 et 1850 avant d'être remplacé par d'autres procédés moins complexes.
Retour à la maison
Rares seraient les daguerréotypes de cette qualité à résister au temps. À cette époque, il n'est pas rare que le photographe lui-même n'ait pas assez d'argent pour s'acheter de nouvelles plaques et qu'il efface un précédent cliché avec un chiffon pour en réaliser un autre. "Ça s’efface très facilement, comme vous nettoyez une casserole," raconte Serge Plantureux. Si de nombreux daguerréotypes ont aussi disparu, c'est que "les familles les vendaient au poids du métal comme quand on vend l’argenterie de famille", poursuit les spécialistes. Et puis "il y a les guerres. 99% des daguerréotypes parisiens ont été fondus pour faire des obus au moment de la guerre contre les Prussiens."
La Bibilothèque municipale de Lyon est désormais l'heureuse propriétaire de ce cliché historique. Un juste retour à la maison.
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