Sur les pas de Louis Barthas, soldat de la guerre de 1914, à la BNF
En 1977, Rémy Cazals, professeur d'histoire contemporaine à Toulouse découvrait les cahiers de Louis Barthas, tonnelier à Peyriac-Minervois dans l'Aude, caporal sur le front pendant la Première guerre mondiale. Ces 19 carnets illustrés de cartes postales étaient restés depuis dans un carton. Ils racontaient en détail le quotidien des tranchées.
Ce témoignage unique, vivant et précis, a été publié par François Maspéro en 1978, et "Les carnets de guerre de Louis Barthas, tonnelier, 1914-1918" (Editions La Découverte), sont devenus un classique, indispensable à ceux qui s'intéressent à la guerre de 1914, vendu à plus de 100.000 exemplaires.
L'absurdité de la guerre
Louis Barthas, militant socialiste et artisan tonnelier, raconte jour après jour l'absurdité de la guerre, la boucherie, les souffrances. Il raconte les débuts de révolte en 1915 et des fraternisations entre soldats ennemis (des "échanges de politesse", de paquets de tabac et de cigarettes). "On peut être certain que ce geste de fraternité s'est produit en plus d'un endroit, partout où la proximité des postes le permettait", dit-il.
Son récit est précis et daté. Jean-Pierre Bonfort l'a suivi sur les lieux décrits, les sièges des plus grands massacres, du Pas-de-Calais à la Marne : Valmy, le Chemin des Dames.
Sur les traces de Louis Barthas avec un téléphone portable
Convaincu que, aujourd'hui, des photos auraient remplacé les carnets du caporal Barthas, il a voyagé armé d'un téléphone, tentant de trouver les traces de ce que le caporal avait évoqué. Mais le plus souvent, les traces sont infimes. Année après année, la nature, faite de prés, de champs et de bois les a recouvertes. C'est donc quelque chose d'impalpable, de fugitif, de l'ordre de la sensation atmosphérique, que Jean-Pierre Bonfort a attrapé.
Les photos longent le grand couloir de la BNF et sont accompagnées d'extraits des "Carnets", depuis l'arrivée du tonnelier de l'Aude dans le Pas-de-Calais en novembre, les premières marches de nuit dans la boue et les premiers bombardements. Jean-Pierre Bonfort a saisi la lumière des saisons correspondantes, la boue de l'automne, la neige et les grands champs gelés de l'hiver, les brumes sur des paysages plats à perte de vue.
"Pire que des bêtes"
Il rend aussi le frémissement du printemps dans des lieux redevenus charmants et qui ont été le siège d'une immense boucherie. Barthas parle tout le temps des camarades tombés, dont les corps jonchent le sol, qu'il faut enterrer sans même pouvoir se laver les mains ("Dans la saleté nous devenions pire que des bêtes.")
Sous une image de pré ensoleillé, Barthas raconte qu'on se battait "en cannibales" à la cote 304, près de Verdun.
Une mosaïque de cimetières
Il décrit les pieds gelés "dans la boue sanglante de la Somme", lors de l'hiver 1916-1917. A Main de Massiges, dans la Marne, où les bombardements ont été terribles, quelques vestiges de tranchées ont été conservés et on peut voir des tombes isolées.
Trois murs d'images interrompent le parcours linéaire, chacun consacré à un thème marquant du récit : une première composition parcourue de routes et de chemins rappelle les marches interminables, généralement de nuit, pour aller creuser ou rejoindre une position. Une autre rassemble des abris, granges et hangars. La troisième, mosaïque de cimetières, rappelle les centaines de milliers de morts.
L'exposition, gratuite, accompagne celle de la BNF sur "L'été 14", qui raconte les jours qui ont précédé le déclenchement de la Grande Guerre.
Sur les pas de Louis Barthas, 1914-1918, Photographies de Jean-Pierre Bonfort, Bibliothèque nationale de France, site François Mitterrand, quai François Mauriac, Paris 13e
Tous les jours sauf les jours fériés
Du mardi au samedi : 9h-19h
Dimanche : 13h-19h
Lundi : 14h-20
Accès libre
Du 25 mars au 24 août 2014
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