On a retrouvé le sculpteur de "Woinic" : le sanglier géant de l'autoroute A34
Le long des autoroutes, elles jalonnent les périples des vacanciers, ces œuvres d'art qui surprennent ou laissent indifférents sont aujourd'hui au nombre de 75. Mais qui se cache derrière ces étranges créations ? La rédaction de France 3 a mené l'enquête.
Reportage : A. Chopin / N. Salem / E. Goldstein
Exploiter le filon "Woinic"
Parmi les "œuvres "qui font parler d'elles, il y a, dans le haut du classement, le célèbre "Woinic". Ce sanglier géant scellé sur l'aire d'autoroute des Ardennes de l'A 34 est définitivement entré dans l'histoire de l'art autoroutier. Son histoire rocambolesque, sa taille, et son destin de star inscrivent "Woinic" dans les mémoires ardennaises. C'est entre les mains du sculpteur ardennais Éric Sléziak que "Woinic" voit le jour 15 décembre 1993, après une gestation de 10 ans ! Commandé par le Conseil Général des Ardennes en 1983 pour la somme de 600 000 euros, le colosse est aujourd'hui considéré comme le plus gros sanglier du monde.Mais la taille n'est pas forcément synonyme de qualité artistique. Parmi les détracteurs de la sculpture, l'historien de l'art Thomas Schlesser est intraitable : "Du point de vue de l’art animalier, il faut avouer que l’œuvre est d’une épouvantable médiocrité. La mollesse de la gueule, le tracé hasardeux des yeux, la raideur de la silhouette l’apparentent à un gigantesque jouet inoffensif plutôt qu’à un animal vigoureux." A ces critiques acerbes, le créateur répond simplement. "Ma récompense c'est les 150 000 messages d'amour que j'ai reçus à la sortie de Woinic".Épouvantable médiocrité
Woinic = 2,5 millions d'€ de chiffre d'affaire sur quatre ans
Côté business, le département aussi s'y retrouve et rentabilise au maximum la somme dépensée pour son acquisition. "Woinic" devient rapidement un puissant outil de communication, son image est déclinée sous maintes formes de produits dérivés. Tasses, peluches, boule à neige, et pour trinquer à la santé du sanglier, une bière portant son nom voit le jour en 2009. Un produit marketing qui rapporte gros, très gros : "En quatre ans on fait un chiffre d'affaire de 2,5 millions d'euros", rapporte Dominique Arnould, du Groupement touristique des Ardennes.L'art autoroutier tout un poème
Le "Signe de l'infini", "Le Poulet de Bresse", "Le soleil de Langres", toutes ces œuvres au nom parfois énigmatique entretiennent un lien, plus ou moins lointain, avec la région qu'elles occupent.Dans l'Aude, aux portes de Narbonne "Les Chevaliers Cathares" se dressent sur l'A61. Cette sculpture réalisée par Jacques Tissinier est installée ici depuis 1980. Elle fait tellement partie du paysage que le chanteur Francis Cabrel en a fait une chanson. Près de 40 ans après, ces trois énormes personnages en ciment interpellent encore les voyageurs. "De près, c'est impressionnant", constate un curieux.
Ce genre de sculptures, à la frontière entre l'œuvre et l'ouvrage d'art, s'est développé dans les années 1980 et 1990 grâce à l'obligation légale dite du "1 % artistique" qui impose de consacrer 1 % du coût total d'une construction d'infrastructure (en l'occurrence, une autoroute) à la culture. L'acquisition de ce type d'œuvres passait en général par une commande publique. 73 œuvres monumentales qui ont poussé comme des champignons dans les années 1980.
S'il est moins prolixe que dans les années 1980, l'art autoroutier continue de s'illustrer. Dernière œuvre en date, la statue de Charles Trenet inaugurée en 2017 sur l'aire de repos de Narbonne-Vinassan.
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