À Grenoble, une fresque du dessinateur de BD Jean-Marc Rochette en hommage aux manifestants blessés, dénonce les violences policières
Retiré du monde de la bande dessinée et installé dans un petit hameau du massif des Ecrins en Isère, Jean-Marc Rochette a récemment quitté sa montagne pour compléter la fresque qu'il avait réalisée en 2022 à l'occasion du Street Art Fest Grenoble Alpes. Celle-ci rend hommage aux blessés par les forces de l'ordre lors de manifestations.
Jean-Marc Rochette est devenu auteur à succès sur le tard, notamment avec Transperceneige, bande dessinée futuriste qu'il a co-créée et qui a été adaptée en film en 2013 par le réalisateur coréen à succès, Bong Joon Ho. Depuis, l'auteur de BD a enchaîné les récits avec Ailefroide (2018) et Le Loup (2019). L'année dernière, il publiait l'œuvre qu'il considère comme l'aboutissement de sa carrière, La Dernière reine. L'album raconte l'histoire d'amour entre Edmond, gueule cassée de 14-18, témoin du dernier ours du Vercors et Jeanne, sculptrice, qui va lui redonner un visage et lui faire découvrir l'amour. Outre sa passion pour la montagne et le récit épique, Jean-Marc Rochette est également connu pour son engagement militant.
Une fresque pour les manifestants éborgnés
Un engagement parfaitement illustré par cette fresque réalisée l'an dernier dans le cadre du Street Art Fest de Grenoble. L'oeuvre représente des globes oculaires et derrière, le nombre de manifestants éborgnés lors du mouvement social des Gilets jaunes : "Je me suis souvenu ce qu'il s'était passé avec les Gilets jaunes et qu'il y avait eu 32 personnes qui avaient perdu leur œil, j'ai été très choqué par ça", explique Jean-Marc Rochette. Et comme le 23 mars dernier, lors d'une manifestation contre la réforme des retraites, un homme a perdu un œil, suite à la déflagration d'une grenade de désencerclement, le dessinateur a décidé de revenir pour mettre à jour son "bilan provisoire".
"C'est quand même tragique, tu pars manifester et tu finis éborgné, la personne dont on parle, c'est un père de famille. Espérons que ce soit le dernier. Après, s'il y en a 10, je viendrai 10 fois, s'il y en a 30, c'est pareil. Et s'il y a un mort malheureusement, ce sera la limite et ce sera un carré noir", estime l'artiste.
Un festival aux œuvres engagées
Dans ce quartier du centre-ville de Grenoble, les peintures murales sont toutes très politiquement engagées. Certaines ont été réalisées en souvenir des Afro-Américains tués par la police, quand d'autres portent des messages politiques contre le gouvernement actuel.
Pour Jérôme Catz, directeur du Street Art Fest Grenoble Alpes, le dessinateur de BD a toute sa place ici. "C'est une fresque qui est relativement soft, si on ne la connaît pas, il n'y a rien de trash ni de sanguinolent. Par contre, une fois qu'on a compris de quoi ça parle, là effectivement, ça pousse à la réflexion", explique-t-il.
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Le directeur du festival prépare actuellement la prochaine édition qui se tiendra du 26 mai au 2 juillet 2023. Pour cette 9e saison, le Street Art Fest Grenoble Alpes s'élargit à plus de 10 villes participantes dans la région iséroise. Quant à Jean-Marc Rochette qui est descendu de sa montagne pour ce 33e œil, il espère ne plus avoir à revenir dans les prochaines semaines.
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