Transmusicales : Diana Ross dans un corps de jeune Danois
Nous voilà partis pour trois nuits où les découvertes musicales seront, au pire, amusantes et fugaces, au mieux, génératrices d’un beau sourire sur le visage du public, d’un bon mouvement saccadé de la mèche ou du pied droit.
C’est le cas des jeunots de Dissonant Nation, en concert de fin d’après-midi sur la scène de l’Ubu, le repaire où Jean-Louis Brossard (le patron des Trans) attire les jeunes proies susceptibles de lui exciter les tympans.
Le trio venu d’Aubagne affiche 19 ans de moyenne d’âge, mais balance un rock sec et définitif, un groove rythmique à la Franz Ferdinand, avec tout l’attirail du groupe qui peut faire transpirer un jeune public féminin : un batteur torse nu et glabre comme une peau de grosse caisse, un bassiste concentré derrière son rideau capillaire, et surtout un jeune chanteur lippu à gueule de mannequin qui promet heureusement plus de sueur que de papier glacé. "Ca va Rennes ? Je ne vous entends pas ? Vous passez une bonne soirée ?". Et il reste tendu comme un arc, même quand mon voisin quinquagénaire rétorque : "Ouais enfin il est seulement 18h, hein".
Le gendre idéal est un soulman
Du coté de la Cité, autre lieu investi chaque année par le festival, la star de la soirée est une voix de velours, celle qui fredonne un tube Tell me a tale , qui semble tout droit sorti du catalogue Daptones ou des tiroirs de la Motown, cru 1971. Michael Kiwanuka est anglo-ougandais, et son timbre, sublime, chemine entre celui d’Al Green et de Bobby Womack.
Introduit sur scène par le patron du festival himself, le jeune homme a tout du gendre idéal : un sourire doux, des remerciements polis pour son public, et une chemise bien repassée dont le col dépasse de son petit pull sage. Les compositions, elles aussi, sont un peu trop amidonnées pour cette voix émouvante et chaude comme un soleil. Un garçon du public en profite pour chuchoter à sa voisine ce que tout le monde pense dans la salle : "Pour se faire des calins, c’est parfait".
Diana Ross dans le corps d’un jeune danois
Alors que les Bars en Trans, version off du festival, offrent aussi ce soir-là quelques belles perles (La Femme qui a transformé le "Sambre" en fournaise, ou le très attendu Rover au Dejazey).
Le Liberté, centre névralgique des Trans ce jeudi soir, a monté le volume. Malgré sa voix pleine de coffre, Saidah Baba Talibah peine à convaincre les plus de 16 ans, avec son costume de Catwoman et son rock FM surchargé.
En revanche, la surprise du jour vient du Danemark. Vinnie Who a 24 ans, en paraît 10 de moins ("Chez moi, on n’accepte même pas de me vendre des cigarettes") et tient son show électro-disco (avec sept musiciens), comme une meneuse de revue professionnelle bien décidée à faire danser.
Habillé en écolier modèle (énorme nœud papillon, chemise, bretelles), il a délicatement jeté sur sa silhouette androgyne ce qui ressemble à un paréo aux couleurs chamarrées (audacieux), qui lui permet des gestes de diva, pendant que ses acolytes balancent des boucles électroniques irrésistibles à la Georgio Moroder.
Comme si Diana Ross était passée dans le corps d’un petit garçon de 12 ans. L’effet est étrange, mais Vinnie Who, voix de fausset façon Bee Gees ou Scissor Sisters, maîtrise ses effets, et fait onduler toute la salle en moins de deux titres. L’âge d’or du design danois, sobre et austère, a bel et bien vécu…
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