Un Picasso intime s'expose à Perpignan pour la réouverture du Musée Rigaud
"Une saison en enfer"
"Perpignan a une grande légitimité à faire cette exposition : la relation entre la ville et Picasso est intime et personnelle", tranche Eduard Vallès. "Pourtant, c'est méconnu", ajoute le conservateur au Musée national d'art de Catalogne et grand expert de Picasso. C'est cet oubli que veut réparer l'exposition "Picasso Perpignan, le cercle de l'intime", qui se tient au Musée d'art Hyacinthe Rigaud de Perpignan jusqu'au 5 novembre.Le peintre espagnol découvre la ville grâce à une de ses amies, Totote, qui, voulant aider Picasso à surmonter la séparation d'avec Françoise Gilot, l'invite à venir se réfugier chez des proches à elle, le comte et la comtesse de Lazerme, qui ont un hôtel particulier dans la capitale franco-catalane.
Reportage : Marc Tamon et Frédéric Savineau
Si Picasso séjourne très régulièrement à Perpignan entre 1953 et 1955, ce n'est donc pas pour le travail, qui était plus réservé à ses voyages à Vallauris (Alpes-Maritimes). "Les visites ne s'inscrivaient pas dans une optique professionnelle mais personnelle", explique Eduard Vallès, le conservateur de l'exposition. À Vallauris, le travail. À Perpignan, les vacances.
La période perpignanaise est donc une sorte de cure à la dépression. Michel Leiris, ami de Picasso, la décrira comme "une saison en enfer". Cette période charnière est plutôt une "partie privée", explique Jean-Marc Pujol, maire (LR) de Perpignan. "Il venait ici chercher la tranquillité, dans cette période intermédiaire d'interrogation sentimentale."
L'exposition, qui s'ouvre samedi, dévoile cette "vie intime, comme l'appelle Eduard Vallès, "ce qui est très rare pour une exposition sur Picasso". Une fabuleuse collection de 39 photos, la plupart inédites, mais également des dessins, des huiles sur toile, des papiers découpés... sont juxtaposés à des œuvres très connues, comme "Jacqueline aux mains croisées" ou "Maya à la poupée".
Véritables documents, les pièces sont aussi souvent émouvantes, comme de formidables films de famille en noir et blanc, ou cet étonnant cliché de 1954, "un témoignage absolument unique", selon Eduard Vallès. On y voit Jacqueline Roque, assise à côté de Picasso, qui était en train de devenir son compagnon. À l'autre bout de la longue table à manger, peuplée d'amis et de membres de famille, Françoise est là, éloignée : elle venait de rompre.
Le lien fort tissé entre Picasso et Perpignan démontre "la situation particulière frontalière de la ville, qui est un centre d'échanges, de passages, d'influences", souligne Claire Muchir, directrice du Musée d'art Hyacinthe Rigaud.
Reportage: X. Armengaud / P. De Leyritz / S. Bonnefond
"Faire connaître l'histoire perpignanaise"
Totalement rénové, le musée regroupe dorénavant non seulement l'hôtel Mailly mais également l'hôtel de la famille Lazerme. On y a "gardé le caractère de l'hôtel particulier", explique l'architecte Stéphane Barbotin-Larieu. Les salles d'exposition sont ainsi installées dans les salons familiaux avec tout leur cachet, du parquet jusqu'aux cheminées d'époque, en passant par la chambre aux décors peints de scènes bucoliques.Outre l'exposition Picasso, qui est temporaire, le tout nouveau musée montre de manière permanente les différentes époques culturelles de Perpignan, non seulement le XVIIe siècle de Hyacinthe Rigaud, célèbre portraitiste qui a donné son nom au musée, mais également le Perpignan gothique, avec notamment le magnifique retable "Maître de la Loge de mer", sublime d'or et de lumière (1489).
Reportage France 3 pays catalan.
Après 10 millions d'euros de travaux, dont quasiment la moitié à la charge de la Ville, le nouveau musée espère atteindre les 60.000 visiteurs par an. L'ancien Rigaud n'attirait que péniblement les 9.000 visiteurs par an.
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