Un portrait rare de Rimbaud par Verlaine aux enchères chez Drouot
Un portrait d'Arthur Rimbaud, réalisé par Paul Verlaine en juin 1872, sera mis aux enchères à Drouot le 2 décembre, avec une estimation comprise entre 100 000 et 200 000 euros. Ce dessin épuré, choisi par Verlaine pour illustrer la première édition des œuvres complètes de Rimbaud en 1895, sera exposé pour la première fois au public lors de la vente de la collection Hugues Gall.
"Ce dessin-là, c'est la pépite de la collection", s'enthousiasme Ambroise Audoin, expert de la vente. Il explique que l’œuvre possède un parcours "typique des objets rimbaldiens", ayant été conservée pendant 130 ans dans des collections privées.
Le Rimbaud "déambulateur et visionnaire"
Le portrait, réalisé alors que Rimbaud avait 17 ans, montre le jeune poète de profil : une silhouette dégingandée, cheveux longs coiffés d’un chapeau, mains dans les poches et fumant une pipe. Loin des caricatures contemporaines, Verlaine "présente le jeune Rimbaud tel qu’il était quand il arrive à Paris, les mains dans ses poches crevées", décrit Ambroise Audoin. Ce dessin illustre "l’idée de Rimbaud déambulateur et visionnaire", avec ses jambes "quasiment disproportionnées", une représentation marquante dans "l’histoire rimbaldienne".
"C’est un dessin réalisé à un moment décisif de leur histoire commune, de l’histoire littéraire de Rimbaud", estime l’expert, précisant qu’il date d’une période où le jeune poète "se fait voyant par un dérèglement de tous les sens".
Portrait d'amour
En juin 1872, Rimbaud est déjà introduit, puis rejeté, par les cercles littéraires parisiens, excédés par ses provocations. "C’est à ce moment-là que le destin des deux amants va se lier", poursuit Audoin. Dès juillet, Verlaine et Rimbaud partent en voyage en Belgique, puis à Londres, où ils vivront les instants les plus intenses de leur relation. Celle-ci s’achèvera dramatiquement à l’été 1873, avec le coup de feu tiré par Verlaine sur Rimbaud.
Dans la préface des Poésies Complètes publiées en 1895, quatre ans après la mort de Rimbaud, Verlaine évoque son visage "parfaitement ovale d’ange en exil, une forte bouche rouge au pli amer". "L’image de Rimbaud intéresse beaucoup", souligne Ambroise Audoin, rappelant une phrase d’André Breton écrite à la fin des années 1940 : "Tu ne connaîtras jamais bien Rimbaud."
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