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Avril et le monde truqué

D’après l’univers graphique de Jacques Tardi. Avec Marion Cotillard, Philippe Katerine, Jean Rochefort… Au cinéma le 4 novembre 2015
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9min
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Synopsis

  1. Le monde est radicalement différent de celui décrit par l’Histoire habituelle. Napoléon V règne sur la France, où, comme partout sur le globe, depuis 70 ans, les savants disparaissent mystérieusement, privant l’humanité d’inventions capitales. Ignorant notamment radio, télévision, électricité, aviation, moteur à explosion, cet univers est enlisé dans une technologie dépassée, comme endormi dans un savoir du XIXème siècle, gouverné par le charbon et la vapeur.

    C’est dans ce monde étrange qu’une jeune fille, Avril, part à la recherche de ses parents, scientifiques disparus, en compagnie de Darwin, son chat parlant, et de Julius, jeune gredin des rues. Ce trio devra affronter les dangers et les mystères de ce Monde Truqué. Qui enlève les savants depuis des décennies ? Dans quel sinistre but ?

     

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Date de sortie     4 novembre 2015  (1h45min)

Réalisé par Franck Ekinci, Christian Desmares

D’après l’univers graphique de Jacques Tardi

Avec les voix de :

Marion Cotillard / Avril

Philippe Katerine / Darwin

Jean Rochefort / Pops

Olivier Gourmet / Paul

Marc-André Grondin /  Julius

Bouli Lanners / Pizoni

Anne Coesens / Chimène

Macha Grenon / Annette

Benoit Brière / Rodrigue

 

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EXTRAIT DE L’ENTRETIEN AVEC JACQUES TARDI

Votre passion pour l’histoire est l’un des jalons de votre œuvre. Et vous vous documentez énormément sur les époques que vous évoquez, jusque dans les moindres détails. Avez-vous apprécié de travailler avec moins de contraintes sur un récit de fiction, et plus précisément sur une uchronie ?

Oui, parce qu’à partir de là, on n’est plus du tout bloqué par la documentation. On part dans des directions plus fantaisistes tout en ne perdant pas de vue ce que l’on s’est imposé narrativement dès le départ, c’est-à-dire la disparition mystérieuse de tous les grands savants, et par là même, de toutes les inventions majeures du 20ème siècle. Tout marche à la vapeur, il n’y a pas d’électricité, et cela pose certaines contraintes qui vous poussent à trouver des solutions originales. De la même façon, le téléphérique à vapeur a été créé ainsi.

 

Justement comment est née l’idée magique du « paquebot » suspendu à des câbles qu’empruntent les parents d’Avril dans leur fuite ? Etes-vous fasciné par les véhicules prototypes souvent extravagants qui ont réellement existé dans le passé, à toutes les époques ?

Je veux préciser que c’est Benjamin Legrand qui a inventé cette liaison Paris-Berlin par téléphérique, avec une double tour Eiffel servant de terminus/gare dans la capitale. La tour Eiffel, nous l’avons sous les yeux, mais le téléphérique, il a fallu l’inventer. J’ai donc feuilleté des vieux numéros de « La Science et la Vie » datant du début du siècle où j’ai trouvé les descriptions de nombreux engins prototypes fascinants. A partir de là, j’avais à disposition des formes et des schémas de fonctionnement de machines à vapeur ou bien mues par d’autres systèmes. Mon objectif étant que le fonctionnement du téléphérique soit crédible. Il fallait qu’il marche à la vapeur, que ses mécanismes puissent faire tourner des roues à partir d’entraînements ressemblant à des chaînes de vélo, que tout cela avance sur des rails à crémaillères, avec des roues dentelées, etc. J’ai travaillé assez longtemps pour arriver à le rendre réaliste. Et même si l’on ne voit pas comment ils marchent, j’ai imaginé aussi ses mécanismes internes. Je pense que le téléphérique fonctionne bien dans le film, et que l’on y croit.

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Dans AVRIL ET LE MONDE TRUQUÉ, le responsable de la police ne comprend rien aux véritables enjeux des évènements, et le pouvoir politique a mené tranquillement la planète vers un désastre écologique qui génère des conflits entre les nations. Est-ce que l’on pourrait dire que cela reflète en partie votre opinion sur le monde actuel et ses dirigeants ?

Cela me semble évident ! (rires) Mais ce n’est pas exprimé de manière claire, nette et définitive : c’est au spectateur de comprendre cela et de se faire sa propre idée. J’espère qu’après avoir vu le film, il aura perçu ce que nous avons voulu dire. Mais n’oublions pas que nous nous trouvons au sein d’une histoire rocambolesque, totalement fantaisiste, et qu’il est hors de question d’asséner aux gens notre manière d’aborder la politique et notre vision du monde dans lequel nous vivons. Ce n’est pas le but. Mais cela aurait pu fonctionner si nous étions parvenus à réaliser notre projet de film sur la première guerre mondiale qui n’a hélas pas abouti. Un tel sujet, obligatoirement, impliquait un regard sur le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, qui est en grande partie déterminé par la manière dont on a redessiné les frontières comme celles de l’Irak et du Moyen-Orient à l’issue de ce conflit. 1917 a été l’époque de la révolution russe, de l’arrivée des corps expéditionnaires américains, et du début de ce monde partagé en deux dans lequel nous avons vécu ensuite pendant des décennies…Et où nous vivons toujours, d’ailleurs ! Un sujet sur la première guerre mondiale nous aurait permis de nous exprimer sur tout cela, alors que ce n’était pas le but d’AVRIL ET LE MONDE TRUQUÉ. 

 

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Par définition, les héros des films d’animation sont souvent formatés pour être plus forts, plus courageux, plus perspicaces, plus rapides que la plupart des gens. Ils n’ont que peu de doutes sur la justesse de leur démarche, et quasiment pas de faiblesses. Dans la bande dessinée aussi, les héros « classiques » ont longtemps été les plus nombreux. Est-ce la raison pour laquelle, en tant qu’auteur, vous avez toujours eu une tendresse particulière pour les personnages qui ont des failles, des faiblesses, des doutes ?

Oui, bien sûr, parce que des héros infaillibles comme ceux-là, je n’en ai jamais rencontré, et je ne sais pas comment ils fonctionnent. Et puis un personnage qui est « sur des rails » avec une mission à accomplir ne m’intéresse pas dans la mesure où je sais déjà qu’il réussira, qu’il gagnera, qu’il repoussera les méchants…Je n’ai aucune raison de lire le bouquin ou d’aller voir le film puisque les jeux sont faits d’avance. Je préfère donc les personnages qui ont des doutes, qui vont commettre des erreurs, ou qui vont tout simplement ne rien faire. Adèle Blanc-Sec, par exemple, est un personnage qui fait le même métier que moi : elle écrit des romans-feuilletons, se déplace uniquement pour se documenter et fait alors des rencontres, parce que j’ai besoin que les choses bougent un peu dans le récit de ses aventures. Mais elle n’est pas une personne qui prend des décisions fracassantes et qui va tout le temps de l’avant : ce sont les évènements qui la portent. Je préfère ce genre de personnage. C’est aussi le cas d’Avril dans le film.

 

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Oui, car c’est le lieu du partage des émotions et des rires.

J’ai été justement très content de voir comment la salle se comportait lors de la première projection publique du film, pendant le festival d’animation d’Annecy. Les réactions étaient bonnes. Et ce contact unique avec le public, vous ne le vivez jamais avec la bande dessinée, qui est un travail solitaire.

De quels personnages du film vous sentez-vous le plus proche ?

D’Avril, bien sûr, qui est la petite soeur d’Adèle Banc-Sec…Et aussi de Pops, le grand-père qui est un savant fou, mais qui a un « bon fond » !

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