A Bruxelles, le papier peint démodé cachait des dessins de grands noms de la BD
En rénovant ses nouveaux locaux, un syndicat belge a mis au jour des œuvres signées Franquin, Peyo, Roba ou Hubinon, fin 2013. Voici le récit de cette trouvaille exceptionnelle.
Le Marsupilami, Pirlouit, Buck Danny et leurs amis dormaient à l'insu de tous depuis plus de cinquante ans dans un appartement de Bruxelles (Belgique). Ces dessins, réalisés par des grands noms de la bande dessinée belge, tels que Franquin, Peyo, Roba ou Hubinon, ont été découverts sous des couches de papier peint lors de travaux de rénovation réalisés par le Syndicat libre de la fonction publique belge (SLFP) dans ses nouveaux locaux bruxellois.
Michel Rosier, le secrétaire national du SLFP a raconté à francetv info les circonstances de cette découverte exceptionnelle "faite tout à fait par hasard" et révélée lundi 28 septembre par La Libre Belgique. "C'était en décembre 2013, se souvient-il. Avant d'emménager dans nos futurs locaux, on préparait un petit rafraîchissement, avec uniquement quelques couches de peinture. Mais comme par endroits le papier peint se décollait, on a décidé de tout arracher."
"On avait découvert quelque chose d'exceptionnel"
"On a d'abord découvert un premier dessin. Puis on a arraché le reste du papier peint et on a mis au jour la fresque dans son ensemble, raconte le syndicaliste. Au début, on s'est dit que les auteurs de ces dessins avaient vraiment du talent dans leurs copies. Mais certains dessins étaient datés et signés. On a compris qu'on se tenait devant les œuvres des dessinateurs que le monde entier connaît aujourd'hui."
Le Marsupilami, signé Franquin et daté de 1958, Pirlouit sans Johann, Buck Danny, Tapir Affamé de la Patrouille des Castors, une ébauche de Gaston Lagaffe... Une douzaine de dessins et autant de personnages emblématiques tapissent le mur avec, au milieu, un message en majuscules : "Prière de ne plus dessiner sur ce mur. SVP." "Pendant leurs pauses, les différents dessinateurs devaient s'amuser sur les murs", imagine Michel Rosier. Certaines œuvres ont été abîmées lors de leur mise au jour, mais la plupart sont intactes. "On était convaincus que ce qu'on avait découvert était quelque chose d'exceptionnel", commente le dirigeant syndical.
"Pour comprendre comment ces dessins avaient pu se retrouver sur ces murs, on a fait des recherches sur les précédents occupants", relate le syndicaliste. L'appartement a livré ses secrets. A la fin des années 1940, il appartenait à un certain Georges Troisfontaines, une figure incontournable de la BD belge. L'homme y avait installé son agence de distribution, la World Press. L'entreprise fournissait des bandes dessinées à plusieurs magazines, dont Spirou. Parmi les dessinateurs qu'il commercialisait : Jean Graton (Michel Vaillant), Jijé et Victor Hubinon (Buck Danny), Eddy Paape (Jean Valary)... Georges Troisfontaines est aussi celui qui a permis la rencontre des deux papas d'Astérix, René Goscinny et Albert Uderzo.
"On parle d'un éventuel classement au patrimoine"
"Quand on s'est rendu compte de ce que ça représentait, on s'est tournés vers les musées et les grandes institutions. Des experts sont venus voir. Mais faute de budget ou à cause de leurs moyens limités, ces démarches n'ont pas donné grand-chose", déplore Michel Rosier. Le SLFP a donc entrepris des travaux de préservation. "A nos frais", souligne le syndicaliste. Un filtre anti-UV a été posé sur la fenêtre afin que la lumière du soleil n'altère pas les dessins et un panneau transparent sera bientôt placé devant le mur.
L'article paru dans la presse belge a quelque peu changé les choses. "Pendant deux ans, c'est resté en l'état. Alors on est étonnés que ça intéresse tout le monde maintenant. L'engouement est presque international. On parle d'un éventuel classement au patrimoine..." glisse le leader syndical. Envisage-t-il de faire visiter la pièce aux amoureux de la BD ? "On ne sait pas bien. Il va falloir trouver une solution. On n'y est pas opposés."
Le bureau sert aujourd'hui de salle de réception au syndicat, ravi de surprendre ses visiteurs avec ce pan d'histoire de la BD belge. Quant à Michel Rosier, il occupe le bureau juste en face. Quand il en ouvre la porte, il peut contempler la fresque. "C'est quelque chose de dingue", confie-t-il.
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