De Zola à London, les grands classiques de la littérature revisités par deux dessinateurs de BD havrais
Portrait croisé de deux dessinateurs havrais - Agnès Maupré et Riff Reb's - dont l'amour pour la littérature s'exprime en bande dessinée. Leurs dernières créations inspirées de Zola et de Jack London viennent de paraître.
Ils ont pour points communs l'amour de la littérature et du dessin mais aussi une ville : Le Havre. Agnès Maupré et Riff Reb's ont tous les deux sorti en 2020 une bande dessinée adaptée d'un grand classique. Au bonheur des Dames d'Émile Zola pour elle, Le vagabond des étoiles de Jack London pour lui. Rencontre avec ces passionnés qui offrent au public un nouveau regard sur ces chefs-d'œuvre littéraires.
"C'est un auteur que j'ai beaucoup lu et beaucoup aimé." Agnès Maupré marche au coup de cœur. Sa carrière en témoigne. Cette Marseillaise installée au Havre depuis quelques années a fait de l'adaptation de romans en BD sa spécialité. Depuis Les contes du chat perché adapté de Marcel Aymé (Gallimard Jeunesse, 2007) jusqu'à la tragique histoire de Tristan et Yseult sur laquelle elle a travaillé avec le dessinateur Singeon (Gallimard, 2017) en passant par la série pour ados de Marie Desplechin Le journal d'Aurore (Rue de Sèvres, 2016), l'illustratrice donne vie à ce qu'elle aime à travers le dessin.
Dans Au bonheur des dames (Casterman, juin 2020), c'est essentiellement le personnage central de Denise Baudu, petite provinciale qui découvre Paris et ses fastes, qui l'a séduite. "C'est une femme qui a l'air faible et fragile mais qui s'avère plus forte que tous les autres personnages, plus forte que quiconque aurait pu le penser."
Fraîchement débarquée de sa Normandie natale, la jeune femme est embauchée comme vendeuse dans l'un des temples du luxe parisien. Un grand magasin inspiré des célèbres enseignes du boulevard Haussmann qui ont fait la renommée de Paris au XIXe siècle. Une ambiance à la fois raffinée et frénétique, sur laquelle Agnès Maupré a énormément travaillé : "Tout est dans la profusion. Le magasin subit plusieurs agrandissements au fil du roman et à chaque fois, il est plus grand, plus beau, plus lumineux, avec des rambardes ouvragées, des coupoles, des verrières et des foules qui tourbillonnent là-dedans."
Loin de cette profusion colorée, l'univers dans lequel s'est plongé Riff Reb's est beaucoup plus sombre. Le Vagabond des étoiles de Jack London raconte la descente aux enfers carcérale d'un condamné à mort, Darell Standing. Une palette de couleurs réduite, des personnages aux traits marqués, le dessin de l'artiste traduit l'horreur de l'enfermement qui conduit le héros à s'évader mentalement dans un monde aux confins de la folie. "Du fond de sa prison, il va - de manière un peu fantastique - visiter plusieurs villes dans l'histoire de l'Humanité. Ça va de la Préhistoire à l'Égypte ancienne en passant par Rome au temps du Christ. C'est un roman qui, quand je l'ai lu, m'a provoqué de telles images mentales que je me suis dit, c'est fait pour être dessiné !"
Il faut dire que des thèmes comme le poids du destin et l'exil - mental ou pas - chers à Jack London, le sont aussi pour Riff Reb's. Né en Algérie peu avant les "événements", le dessinateur et sa famille ont dû se réfugier au Havre au début des années 60. Une histoire personnelle qui se lit dans ses œuvres. Le tome 2 du Vagabond des étoiles est paru en octobre dernier chez Soleil. Il s'agit de la cinquième adaptation littéraire de Riff Reb's.
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