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Festival BD d'Angoulême : rencontre avec le scénariste Riichirō Inagaki, pour qui "le manga sert à exprimer l'âme humaine"

Parmi les mangakas présents à Angoulême pour la 50e édition du Festival international de la bande dessinée, le scénariste Riichirō Inagaki, créateur avec le dessinateur Ryōichi Ikegami de "Trillion Game", publié chez Glénat.
Article rédigé par Laetitia de Germon
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
"Trillion Game", manga de Ryoichi Ikegami et Riichiro Inagaki (RIICHIRO INAGAKI, RYOICHI IKEGAMI / SHOGAKUKAN)

Avec Trillion Game, Riichirō Inagaki nous raconte l'histoire de Haru, un tchatcheur de génie, qui rencontre Gaku, un geek timide mais rempli de compétences cachées. Ensemble, ils vont former un duo de choc dont l’objectif ultime sera d’accumuler un trillion de dollars, assez pour obtenir tout ce que le monde peut offrir ! Ce manga pourra déstabiliser les fans de Ryōichi Ikegami car le style du dessinateur est très différent. Ce titre est, comme il le dit, "une œuvre de divertissement", entre classicisme et modernité, suspense et fou rire.

Si Riichirō Inagaki a choisi le thème de l'argent ce n'est pas un hasard. "Cela faisait très longtemps que j'avais cette idée. J'avais très envie de parler de jeux d'argent mais ce qui me gênait c'est qu'on met toujours une morale pour dire qu'il n'y a pas que l'argent dans la vie. Depuis que je suis collégien, ce côté moraliste m'énerve, explique-t-il. Avec Trillion Game, j'avais envie de parler de quelqu'un qui gagnait de l'argent petit à petit." Pour créer son histoire, il s'est alors demandé "comment faisaient ces gens qui amassent tant d'argent. Le trait principal c'est qu'ils sont très autocentrés, tournés vers eux-mêmes, ils sont capricieux. C'est quelque chose de mal vu au Japon. C'est surtout ça qui a motivé la création et façonné les traits du personnage de Haru."

"Tout part du personnage"

Les personnages sont l'essence même d'une histoire, selon Riichirō Inagaki. "Une fois que j'ai un personnage qui se dessine dans ma tête, je vais me demander quel genre d'histoire va pouvoir le mettre en valeur. Si on commence par le thème de l'histoire, on n'exprime rien sur l'humain, or le manga sert à exprimer l'âme humaine."

S'il fait beaucoup de recherches, Riichirō Inagaki assure que ses personnages et ses histoires sont originales. "Il m'arrive au cours de mes recherches de trouver des histoires intéressantes et je m'en sers comme une base sur laquelle je peux m'appuyer. Mais le personnage, lui, est original", insiste-t-il. "Comme c'est le personnage qui est au centre de mes préoccupations, tout part de lui et je me base sur mon expérience pour ça."

"Je me sens à l'aise sur des personnages masculins de 0 à 46 ans, mais avec un personnage de 70 ans je ne le sens pas. À chaque fois que j'ai des personnages féminins à écrire je pose beaucoup de questions à ma femme et c'est elle qui me parle de son expérience."

Riichirō Inagaki

à franceinfo

Récompensé par le prix King dans la catégorie Meilleur story-board du 7e Story King en 2001 pour son one-shot Eyeshield 21, Riichirō Inagaki est plus habitué à travailler sur des shônen (titres pour jeunes garçons, adolescents), même s'il a "toujours voulu faire des seinen" (manga pour adultes). Ce genre est en général plus détaillé et "méticuleux sur le découpage" et cela lui demande plus de temps de travail.

Mettre en avant le travail du dessinateur

Riichirō Inagaki ne se contente pas d'écrire un scénario. Il fait très attention à l'auteur avec lequel il travaille. S'il n'a jamais collaboré avec lui, il lit "tout ce qu'il a fait et essaie de trouver ses qualités." Cela lui permet de ne pas proposer des choses déjà faites.

Des planches de mangas scénarisés par Riichiro Inagaki dans l'exposition consacrée à Ryoichi Ikegami, lors du 50e Festival BD d'Angoulême, janvier 2023 (LAETITIA DE GERMON / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Travailler avec un dessinateur "c'est un peu comme lancer une balle au base-ball, explique le scénariste. J'envoie le story-board avec des instructions et lui va me renvoyer un dessin. Petit à petit, il y a des motifs qui vont se répéter, et je vais comprendre et affiner mon travail. Je pourrai me dire qu'en lançant telle idée j'aurai quelque chose de ce type-là en retour. C'est très intéressant et ce n'est pas seulement avec Ryōichi Ikegami, cela me l'a fait avec tous les dessinateurs avec lesquels j'ai collaboré."

Riichirō Inagaki vient d'une famille très modeste et pour lui l'argent n'est pas d'une grande importance. "Je ne dépense pas d'argent. Je n'ai pas besoin de grand-chose pour vivre. Si j'avais un milliard de yens, je placerais tout et je regarderais tous les jours les cours de la bourse, je verrais les intérêts à venir et cela me mettrait en joie !"

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