Picsou anti-héros ultra-riche et populaire fête ses 75 ans au festival d’Angoulême
L’avare le plus aimé de la BD est à la fête cette année. L’occasion de revenir sur un héros atypique à la personnalité complexe, plus populaire en Europe qu’aux États-Unis.
Ne rangez pas trop vite l’Oncle Picsou au rayon de la BD jeunesse. Avec son haut-de-forme et le bec pincé par ses lorgnons, il est l’incarnation canardesque du capitaliste sans scrupule. Et pourtant le personnage est attachant. Pourquoi et comment ? La réponse est peut-être à Angoulême au Musée de la BD. Cette année, pour le 75e anniversaire de Picsou, son bureau est reconstitué dans le Quartier jeunesse du musée avec au fond la porte du très convoité coffre-fort géant.
Les plans de ce coffre-fort qui se situe à Donaldville ont été détaillés par l’auteur américain Don Rosa. Il est, avec Carl Barks, l’un des deux auteurs majeurs de la saga Picsou. A l’origine, l’acariâtre emplumé est un personnage secondaire. Il apparaît pour la première fois en 1947 dans Noël sur le Mont Ours. Carl Barks en est le créateur. Il dessine les aventures de Donald Duck depuis 1942. Scrooge McDuck est le nom en VO qui devient Picsou pour la VF. Prononcez Scrooge MACDuck car l’animal est écossais. Il est issu d’un clan, d’une noblesse sans le sou avec un château en ruine. Picsou, c’est l’histoire du déclassement social. Devenu à 10 ans cireur de chaussures à Glasgow, il n’a de cesse de vouloir prendre sa revanche. Nous sommes à la fin du 19e siècle, il partira comme bon nombre de ses compatriotes aux Etats-Unis en quête de bonne fortune.
Déclassé social, Picsou prendra sa revanche
Comme Joker dans le film de Todd Phillips qui a rempli en 2019 les salles de cinéma, Picsou est un anti-héros avec ses aspérités, ses faiblesses et une pathologie obsessionnelle, être le plus riche au monde. Le palmipède prend un plaisir grotesque à plonger dans ses tas d’or. D’aventure en aventure, avec un courage affirmé, il va sans relâche silloner le monde pour découvrir de nouveaux trésors. "C’est un personnage entre Citizen Kane et Ebenezer Scrooge dans le conte Un Chant de Noël de Charles Dickens", racontera souvent Carl Barks. Avec Citizen Kane, il partage l’ambition dévorante, les origines modestes et le château de Xanadu dans le film d’Orson Welles (1941) qui ressemble assez précisément à celui de Picsou dessiné par Carl Barks. De l’acariâtre Ebenezer Scrooge de Dickens, le richissime canard a hérité la cupidité et son nom.
Carl Barks s’arrêta de dessiner Balthazar Picsou en 1965. Il faudra attendre plus de vingt ans pour que Don Rosa, en 1987, donne toute sa cohérence à la personnalité de Picsou et à son histoire intime. On présente l’auteur américain comme l’exégète de l’œuvre de Carl Barks décédé en 2000. Il en est l’héritier vertueux et passionnément doué au dessin comme au scénario. Il a consolidé le personnage trouble et quelque peu immoral (mais pas toujours) de Picsou. Il est célébré en France où son passage au Comic Con de Paris en 2017 a créé une très longue file de fans attendant pour certains plus de cinq heures la précieuse dédicace. Alors qu’aux Etats-Unis, les déplacements de Don Rosa dans les festivals suscitent beaucoup moins d’enthousiasme. Les BD de l’univers de Disney ayant pratiquement disparu outre-Atlantique.
Un magazine en or et un nouvel album
En France, Glénat publie La Grande épopée de Picsou qui reprend l'intégrale en sept volumes des aventures imaginées par Don Rosa. Les deux premiers titres sont consacrés à la jeunesse de Picsou. Mais le pingre a aussi son magazine qui existe depuis un demi-siècle. Avec une parution tous les deux mois, Picsou Magazine se vend à 100 000 exemplaires. Il est acheté surtout en kiosque avec plus de 300 pages par numéro. Sans compter les hors-série comme Super-Picsou Géant ou Les Trésors de Picsou reprenant des histoires de Carl Barks ou La Jeunesse de Picsou de Don Rosa. La rédaction du magazine sera présente à Angoulême cette année avec des cadeaux pour les enfants et une conférence samedi à 12h30 sur "Qui est vraiment Picsou ?" pour les plus grands. S’ajoute dimanche à 13h30 un atelier "Comment crée-t-on une couverture de Picsou Magazine ?" avec le dessinateur Ulrich Schröder. Les deux évènements ont lieu à l'auditorium du Musée de la BD. Et la projection dimanche encore des premiers épisodes de La Bande à Picsou, série dessinée d’animation de 2017.
Le grippe-sou arrive aussi à Angoulême avec une annonce : la sortie pour septembre 2022 d’un nouvel album aux éditions Glénat. Une première pour l’éditeur grenoblois Jacques Glénat passionné par l'univers Disney. Il a eu la très bonne idée d'imaginer une collection où de grands noms de la BD européeenne réinterprétent les aventures de Mickey ou de Donald. Loisel, Cosey ou Trondheim ont signé des albums dans cette série. Mais rien n'avait été encore publié sur Picsou. Fabrizio Petrossi, qui a déjà dessiné Mickey à travers les siècles dans la collection, fera équipe avec Joris Chamblain au scénario que l'on connaît pour la belle série jeunesse Les Cahiers de Cerise aux éditions Soleil. Picsou et le fantôme de Glasgow, c’est son titre, sera un récit revenant sur les origines écossaises du plus célèbre multimilliardaire. Une histoire que l’on espère en or.
"L'Année Picsou", du 17 au 20 mars 2022 au Quartier jeunesse du musée de la bande dessinée d'Angoulême.
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