Et si les héros de BD se présentaient à l’élection présidentielle ? Adèle Blanc-Sec, la candidate féministe
Avec une forte personnalité, Adèle Blanc-Sec est engagée pour l’égalité femmes-hommes. Une candidate radicale avec une sympathie pour les mouvements libertaires.
Une présidente de la République, il n’y en a jamais eu en France. Est-ce qu’une héroïne de BD pourrait accéder à cette masculine fonction ? Le monde de la BD fait à peine mieux que celui de la politique. Des femmes qui tiennent le premier rôle dans la BD française, il n’y en a pas beaucoup. Surtout si vous retirez de la liste les faire-valoir ou celles qui n’existent que par leur plastique avantageuse, toute poitrine en avant et décolleté conquérant.
Adèle Blanc-Sec fait partie des héroïnes déjouant les stéréotypes. Créées en 1976 par Jacques Tardi, ses aventures comptent neuf albums aux éditions Casterman. Elle a connu une adaptation cinématographique réalisée par Luc Besson en 2010 avec Louise Bourgoin dans le rôle-titre. Elle jouit donc d’une certaine notoriété. J’ai soumis l’idée de son élection à Christophe Quillien. Auteur de plusieurs ouvrages sur la bande dessinée, il a écrit en 2014 Elles, grandes aventurières et femmes fatales de la bande dessinée aux éditions Huginn & Muninn.
Des héroïnes de BD, candidates potentielles, il n’y en a pas beaucoup dans la BD franco-belge ?
Christophe Quillien : Des héroïnes avec des qualités humaines et intellectuelles, il en existe quand même. Je pense à Laureline dans Valérian, série conçue au scénario par Pierre Christin et dessinée par Jean-Claude Mézières. Elle tient de fait le premier rôle même si le titre de la série était Valérian, agent spatiotemporel. Une autre belle héroïne, c’est Yoko Tsuno créée à la même époque, en 1970, par Roger Leloup. Elle est brillante avec un métier, ingénieur en électronique, qui était considéré comme masculin. Plus récemment, il y a Kim Keller imaginée par l’auteur brésilien Leo dans Les Mondes d’Aldébaran. Kim Keller est au centre de la série et a d’importantes responsabilités dans ces aventures.
C’est curieux de constater que ce sont toutes des héroïnes de science-fiction. Adèle Blanc-Sec vit, elle, au début XXe siècle et pour autant, elle est moderne, en avance sur son temps même…
Christophe Quillien : Il est vrai qu’elle ne connait pas la condition de la majorité des femmes de son époque. Adèle Blanc-Sec est célibataire, indépendante. Elle est autrice. Elle écrit des romans populaires dont on ne sait d’ailleurs pas s’ils rencontrent un franc succès. Suffisamment en tout cas pour la faire vivre, car elle est toujours élégante et vit dans un immeuble haussmannien cossu à Paris. Elle est moins le reflet d’une femme de son temps que de celui de son créateur. Adèle Blanc-Sec est l’héritière des luttes en faveur des droits des femmes menées à partir des années 1960 et dont Tardi s’est toujours senti proche.
Une féministe, c’est ainsi qu’elle se présenterait devant les Français ?
Christophe Quillien : Oui, elle est clairement féministe et s’en revendiquerait. Elle est déterminée, ne renonce pas. Je pense qu’elle a de l’ambition aussi. Ce sont des atouts pour se présenter.
Adèle Blanc-Sec a des atouts mais n'est pas une héroïne lisse et parfaite. Quel défaut pourrait lui coûter des voix ?
Christophe Quillien : Elle a un sacré caractère. Elle n'est pas commode et ne manie pas la langue de bois. Ça lui donne un charme certain mais au quotidien ou sur une campagne présidentielle, ça ne doit pas être facile à vivre. Elle prendrait le risque de bousculer son électorat. En plus de ses opinions politiques qui pourraient heurter une partie de la population.
Pourquoi ? Adèle Blanc-Sec se situe politiquement aux extrêmes ?
Christophe Quillien : Elle a un penchant anarchiste qui lui vient de son créateur Tardi. Les institutions, l’Etat, je ne suis pas certain que ce soit ce qu’elle préfère. En plus, elle n’aime pas la police. Il faut dire que les flics qui l’entourent sont particulièrement incompétents. Elle a plus de plaisir à côtoyer les malfrats et les marginaux. Enfin, sait-on jamais, si quelque chose, une injustice, la révoltait vraiment, elle pourrait se lancer dans la course à la présidence.
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