"Je suis meilleur pour observer le réel que pour inventer des scénarios" : Joann Sfar se confie à Lyon au festival Quais du polar
Pour ce premier week-end d'avril, la ville de Lyon bat au rythme des livres et de la bande dessinée. L'incontournable festival Quais du polar rassemble cette année plus de 120 auteurs, venus de 18 pays différents, comme Jake Adelstein (Tokyo Vice) ou Javier Castillo (La petite fille sous la neige). Parallèlement, le festival 48h BD présent dans toute la France a aussi pris ses quartiers à Lyon avec l'organisation d'ateliers, de rencontres et de ventes d'albums à prix réduits.
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— Sfar Joann (@joannsfar) April 1, 2023
L'association de ces deux festivals en un même endroit donne lieu à des rencontres avec des artistes se situant au croisement entre littérature et dessin. C'est le cas de Joann Sfar, dessinateur, romancier, réalisateur et auteur de plus de 150 bandes dessinées. Au cours d'une balade en bateau sur la Saône, celui-ci s'est confié devant ses lecteurs (et admirateurs) sur les différentes formes de création, l’écriture de soi et sur sa toute dernière expérience d'écriture, un polar graphique : Riviera.
Entre rire et nostalgie
Auteur prolifique, voire inépuisable, Joann Sfar s'est récemment lancé un nouveau défi en alliant polar et bandes dessinées. Riviera, qui raconte l’histoire de Monsieur Formidable, un truand à la retraite qui reprend du service le temps d’une livraison spéciale entre Paris et Nice, est paru en mars dernier.
Dans ce roman graphique, Joann Sfar se plaît à décrire et à raconter la ville de son enfance et adolescence, Nice. "Je voulais vraiment dessiner la Côte d'Azur en noir et blanc et avec un seul feutre. Je voulais éviter le côté carte postale, raconter ce que je connais et laisser place à ma nostalgie", raconte-t-il.
"Ça faisait longtemps que je ne m'étais pas autant marré à faire un livre"
Joann Sfar
Il met en scène ce petit truand, tantôt banal, tantôt très violent, mais toujours en maniant l'humour noir dont il a le secret. "J'ai essayé que ça ait l'air vrai, et quand ça ne l'était pas, je ne le racontais pas. Et c'est super amusant à faire, ça faisait longtemps que je ne m'étais pas autant marré à faire un livre", admet-il.
Partager sa complexité du monde
Cette entrée dans le polar s'est donc faite assez naturellement, permettant à l'auteur de mélanger fiction et réalité. Dans Riviera, beaucoup de passages sont inspirés d'histoires vraies et de ses propres souvenirs. "Ce que j'aime dans le polar, c'est décrire le réel, le regarder. Je suis meilleur pour observer le réel que pour inventer des scénarios", avoue-t-il.
"Je me suis dit : ok, je vais faire une nouvelle BD où j'écris fiction au début et comme ça, je peux vraiment me lâcher"
Joann Sfar
Il poursuit : "Dans ma précédente BD, La Synagogue, qui était très autobiographique, j'ai voulu citer personne, mais c'était un peu frustrant. Et là, je me suis dit : ok, je vais faire une nouvelle BD où j'écris fiction au début et comme ça, je peux vraiment me lâcher."
Des récits et des images puisés dans sa propre vie, chez son père ou ses enfants, depuis près de 25 ans, Joann Sfar cultive l'écriture de soi. "Je fais des livres pour mon plaisir et je raconte la réalité que j'ai connue. Mais pourtant, je sais que les gens vont prendre mon récit pour le mettre sur l'échiquier politique. (...) Pour moi, un auteur doit seulement partager avec son lectorat sa propre complexité du monde. L'idée, c'est d'en parler ensemble", conclut-il.
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