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Lucky Luke, "Un cowboy à Paris" : le scénariste Jul lance un défi aux auditeurs de franceinfo

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Article rédigé par franceinfo
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Le scénariste Jul invite les auditeurs de franceinfo à retrouver des personnages semés par son compère dessinateur Achdé dans une des vignettes du dernier Lucky Luke. Récompense : un dessin.

"Regardez cette case de Lucky Luke devant la Sorbonne et dites-moi qui sont les étudiants qui l'entourent. Le premier qui répond bien gagne un dessin", a promis jeudi le scénariste Jul sur franceinfo en présentant le dernier opus de Lucky Luke. "Ça commence aux États-Unis, ça commence dans le Far West comme un Lucky Luke classique..."

Dans le dernier Lucky Luke, vous juxtaposez deux monuments : Lucky Luke et la statue de la Liberté. Audacieux ?

Il y a même trois icônes. C'est une rencontre au sommet : bien sûr, il y a la statue, bien sûr Lucky Luke mais aussi Paris qui, en soi, est déjà un personnage romanesque. Le Paris de 1880, c'est vraiment la ville-lumière dans sa plus grande excellence : les plus grands écrivains, les plus grands scientifiques sont là. On savait que la France avait offert la statue de la Liberté aux États-Unis mais on n'avait pas les détails. Et moi, en faisant des recherches, parce que j'aime bien avoir une base historique pour bâtir des fictions autour de Lucky Luke, c'est ce que faisait Goscinny dans ses meilleurs moments, il s'appuyait sur des choses ayant réellement existé, j'ai découvert cette histoire de la statue de Bartoldi [le sculpteur français qui va ériger la Statue de la Liberté et en apporter un morceau aux États-Unis] faisant un tour de l'Ouest. Ça commence aux États-Unis, ça commence dans le Far West comme un Lucky Luke classique. Il est avec les Dalton et tout d'un coup, il voit arriver sur la plaine une espèce de main avec un flambeau. Ils croient tous que c'est un marchand de glaces ambulant. Mais non, c'est Bartoldi qui cherche de l'argent pour finir le socle de la statue. C'est une histoire vraie. Et effectivement, il va être envoyé pour la première fois outre-Atlantique par le président américain pour escorter cette statue parce que ça ne va pas être de tout repos cette aventure.

Un directeur de pénitencier a un autre projet pour l'île de New York que la statue. Il veut y construire une prison. C'est bourré de références à l'actualité, à l'Histoire, à la littérature… Lucky Luke croise Rimbaud ?

Rimbaud qui ressemble à Billy The Kid, qui braque les cafés en disant : "j'voudrais une absinthe et un caramel mou !". Rimbaud, il faisait les 400 coups et avait la gâchette facile. Et puis, évidemment, il rencontre Victor Hugo qui a vraiment visité la statue de la Liberté. Ce qui était très marrant c'est d'imaginer Lucky Luke à Paris avec son cheval Jolly Jumper, rebaptisé "Joli Jean-Pierre". Il se fait draguer par Mme Bovary [qu'il rencontre dans un train en Normandie]. A l'époque, on arrivait à Rouen en bateau. Il fallait prendre le train. D'ailleurs, l'une des premières choses qui arrivent quand il prend le train en France c'est une grève des cheminots et donc il se retrouve immobilisé en rase campagne. Ils manifestent pour la semaine des 50h à l'époque. Il a fallu dessiner Notre-Dame où les gargouilles ressemblent furieusement à Rantanplan qui est probablement leur lointain ancêtre au Moyen-Age, il y a l'hippodrome de Longchamp, Lucky Luke y gagne une course par inadvertance. Toutes ses rencontres féminines aussi : ce n'est pas évident de dessiner la coquette parisienne, les garçons de café mauvais coucheurs, probablement éternels.

C'est une lecture à plusieurs niveaux, parisienne, historique et philosophique : la défense de la liberté ?

Je ne sais pas s'il y a un message réellement mais c'est vrai que c'est une question qui se pose. Lucky Luke est un personnage paradoxal, c'est un cow-boy épris de liberté, il adore caracoler à travers les espaces sauvages, il n'aime pas qu'on le cadre et en même temps, son métier c'est de mettre des gens en prison. Heureusement, les Dalton s'évadent toujours mais si on construisait précisément ce pénitencier idéal dont on ne s'évaderait pas, il serait au chômage, il serait "renvoyé au cul des vaches" comme dit le méchant dans l'histoire. Du coup, on est toujours partagé entre ce besoin de liberté et de sécurité. Et on peut s'interroger là-dessus. Et c'est sûr que ce beau symbole, offert par l'Europe au Nouveau monde est aujourd'hui un petit peu menacé. On se rend bien compte de l'état politique du monde en ce moment. Et probablement cette espèce de gaieté particulière, d'empathie, de fraternité qui se distingue dans Lucky Luke, parce que c'est vraiment ça aussi, bien sûr, c'est une histoire d'aventure et d'humour, pastiche de western mais il y a aussi une forme de philosophie qui se dégage de ce merveilleux personnage et de ces aventures que j'ai toujours admirés en tant que lecteur et maintenant que je suis passé de l'autre côté, c'est encore un plus grand plaisir. J'ai inventé cette histoire de pénitencier au large de l'île de New York mais pas complètement non plus parce que comme d'habitude, c'est ancré sur des choses qui étaient en gestation à l'époque. On pensait déjà à ça. Et ça a été construit très peu d'années après à Alcatraz, sur une île au large de San Francisco sur la côte ouest.

Lucky Luke boit du Beaujolais et achète des dessous pour les filles des saloons. Il s'encanaille un petit peu ?

Il fait du shopping à Paris. Au début, il est un petit peu perdu mais il se rend bien compte qu'il y a plus d'un attrait à la capitale. Il rentre dans sa chambre d'hôtel et se demande ce que c'est que ce petit abreuvoir en faïence parce qu'il ne sait pas ce qu'est un bidet. Il y a en arrière-plan un film que j'adorais, Crocodile Dundee, ce cow-boy australien qui débarquait à New York et lavait ses chaussettes dans les toilettes de l'hôtel. C'est un peu la même chose. Lucky Luke c'est quand même quelqu'un d'un peu rustre. Ça reste un cow-boy des plaines mais il sait s'adapter très vite. Donc très vite, il va se débrouiller à Paris avec les impressionnistes, devant la Sorbonne. Je lance d'ailleurs un défi aux auditeurs : regardez cette case de Lucky Luke devant la Sorbonne et dites-moi qui sont les étudiants qui l'entourent parce qu'Achdé [le dessinateur] a semé des petits personnages étonnants. Écrivez-nous sur mon Twitter ou mon Instagram et le premier qui répond bien gagne un dessin.

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