Salon du Livre : la BD brésilienne en plein essor
Fers de lance de cette génération, les jumeaux Fabio Moon et Gabriel Ba, plusieurs fois lauréats du prix Eisner, la récompense américaine de référence pour les comics, sont présents au Salon du Livre de Paris, du 21 au 24 mars.
"Actuellement, la bande dessinée traverse une bonne période au Brésil", estime Fabio Moon qui devait participer, aux côtés de Daniel Galera, Marcello Quintanilha et S. Lobo, à une conférence, samedi, intitulée "L'âge d'or de la bande dessinée brésilienne".
Essor des festivals de BD au Brésil
"Ces dernières années, nous avons assisté à l'essor de festivals de BD, comme le FIQ (Festival Internacional de Quadrinhos) à Belo Horizonte, qui permettent aux auteurs et au public de se découvrir mutuellement", ajoute l'auteur de "Deux Frères" (Urban Comics), album qui retrace l'histoire de jumeaux qui se déchirent dans le Brésil des années 1950, avec un dessin noir et blanc anguleux.
"Pour moi, ce nouvel âge d'or, c'est le retour d'une période faste qui a été interrompue dans les années 1980 par la crise économique et politique", abonde Marcello Quintanilha, qui publie "Mes chers samedis" (Cà et là), un recueil d'histoires courtes empreintes de nostalgie sur les classes populaires brésiliennes.
Signe de cet engouement pour le 9e art, "des maisons d'édition brésiliennes prestigieuses, telles que Companhia das letras ou Cosac Naify, se sont mises à la bande dessinée ces dernières années", explique Didier Dutour, responsable du pôle livre et traduction à l'Institut Français, organisme chargé de "l'action culturelle extérieure de la France".
Une population jeune qui promet de belles perspectives
"C'est un marché émergent qui est en développement. Depuis 2010, on a une hausse des demandes de soutien à la traduction de BD françaises au Brésil", ajoute-t-il, citant l'exemple de l'album "Le bleu est une couleur chaude", dont l'édition brésilienne s'est vendue à "40.000 exemplaires".
Si les "quadrinhos" - BD en portugais - n'ont pas encore acquis toutes leurs "lettres de noblesse" au Brésil, il y a des raisons d'être optimiste, estime Arnaud Vin, éditeur français installé depuis une vingtaine d'années dans ce pays de 200 millions d'habitants et directeur de Nemo, une maison d'édition brésilienne spécialisée dans la BD. "Avec 50% de la population qui a moins de 30 ans, on a de très belles perspectives", relève-t-il.
"On peut estimer le nombre de lancements à 1.500 par an dans le pays, tous secteurs de la BD confondus", poursuit-il.
Le prix des albums reste exorbitant pour de nombreux Brésiliens
A titre de comparaison, la production de bandes dessinées sur le territoire francophone européen (France et Belgique essentiellement) est repartie à la hausse cette année, avec 5.410 titres publiés (+4,64%) dont 3.946 nouveautés, selon l'Association des critiques et journalistes de bande dessinée (ACBD).
Mais si le Brésil a beaucoup de lecteurs potentiels, le prix des albums vendus dans les librairies "reste exorbitant et n'est pas accessible à tout le monde", fait remarquer Leonardo Tonus, maître de conférence à la Sorbonne et spécialiste de la littérature contemporaine brésilienne.
En outre, à la différence des revues de BD populaire, comme "Turma da "Monica" (La bande de Monica, ndlr), de Mauricio de Sousa, qui est diffusée dans les kiosques à journaux et touche beaucoup de monde grâce à un réseau important, les albums pâtissent des défaillances de la distribution et du manque de librairies, soulignent ces experts.
"Pour moi, l'avenir de la BD au Brésil est numérique à cause des distances et du coût du transport", juge Didier Pasamonik, directeur de la rédaction du site Actua BD (www.actuabd.com), à propos de ce géant de l'Amérique latine, vaste comme quinze fois la France.
"Grâce à internet et au crowdfunding, il y a désormais beaucoup de façons de faire connaître son travail", conclut Marcello Quintanilha.
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