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"120 battements par minute" : un film "au présent" sur le combat des années sida

Le film, lauréat du Grand Prix 2017 à Cannes, sort en salles mercredi. Une fresque sur les années 1990 marquées par le sida et les combats de l'association Act Up. Son réalisateur, Robin Campillo, se confie à franceinfo.    

Article rédigé par Thierry Fiorile, franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le cinéaste français, Robin Campillo, ici au Festival de Cannes le 28 mai 2017, a reçu le Grand Prix pour son film "120 battements par minute". (MAXPPP)

Le film 120 battements par minute a bouleversé la Croisette et remporté le Grand Prix du jury au Festival de Cannes 2017. Cette grande fresque retrace le combat des militants d'Act Up dans les années 1990, en pleine explosion du sida. À l'occasion de sa sortie en salles, mercredi 23 août, son réalisateur, Robin Campillo revient sur une leçon de vie,"dédiée aux gens qui ont survécu".   

franceinfo : Pourquoi dites-vous que c’est un film pour les vivants ?

Robin Campillo : Bien évidemment, je pense aux morts. Mais des gens ont survécu à cette épidémie. Ils suivent encore des traitements lourds et ils se trouvent parfois dans des situations précaires, comme Didier Lestrade, le fondateur d’Act Up, qui perçoit le RSA. Ils ont mis leur vie professionnelle entre parenthèses, n’étant pas forcément en capacité de travailler. Je voulais rendre compte de ces situations parce qu’elles sont partagées par beaucoup de monde.

N'était-il pas difficile de raconter une histoire datant d’une trentaine d’années avec de jeunes acteurs ? 

J’essaie toujours de faire des films au présent et d’éviter certains aspects de la reconstitution. J’ai choisi par exemple des vêtements qui sont encore plausibles. Il y a aussi des comédiens gays. Ils sont confrontés à cette épidémie qui n’est pas terminée. J’ai filmé au présent. Pour les scènes de réunion par exemple, j’ai utilisé trois caméras, dans la continuité, sans interrompre les scènes. C’est pour rappeler, qu’à l’époque, on était un peu des gosses. Peut-être aussi qu’on arrivait à tenir, parce qu’on était jeunes.

Comment expliquer vos partis pris cinématographiques, notamment les scènes de fête ?

J’essaie de faire évoluer la forme du film. Il y a des contrastes de formes avec des scènes de réunion presque un peu théâtrales et des scènes de boîtes de nuit. Là, c’est dans le noir ; on ne voit pas les murs, c’est très en mouvement, il n’y a plus que les corps, il n’y a plus de paroles. Je voulais aussi montrer qu’en boîte, les gens sont différents. Il y a de la sensualité, la notion du plaisir. On vivait, on survivait aussi pour faire la fête.

Aujourd’hui, en France, on a l’impression que les choses ont avancé pour les homosexuels. N'y a-t-il pas pourtant comme un ressac ? 

Quand l’épidémie a commencé, j’ai l’impression qu’on a désigné des groupes à risques. Le mot n’effrayait pas tant que ça chez Act Up. Mais, par ailleurs, il y avait une absence de visibilité des gays dans les campagnes de prévention. Nous voulions apparaître, rendre visible l’homosexualité, la séropositivité et la maladie. À mon sens, la visibilité des gays a commencé à agacer certaines personnes. Du coup, il y a eu retour de bâton quand s’est posée la question des droits avec le Pacs, le mariage et l’adoption. Une frange de la population s’est réveillée, comme si d’un seul coup, tout cela allait trop loin. En France, c’est devenu violent. Cela s’est un peu écroulé parce la droite s’est ridiculisée à vouloir courir après cet électorat. Mais il n’y a pas que la droite. Macron a trouvé que se disaient des choses intéressantes. C’est mal venu, alors que des choses terribles et violentes se passent en Tchétchénie ou ailleurs.

"Je pense aux morts, mais des gens ont survécu à cette épidémie" - Robin Campillo, réalisateur de "120 battements par minute"

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