Alexandre Desplat, la "french touch" musicale d'Hollywood, a l'Oscar !
Après Maurice Jarre ou Michel Legrand, Alexandre Desplat, à son tour récompensé par un Oscar dimanche soir, s'inscrit dans la lignée des compositeurs français de musique de films appréciés par
Hollywood, une "French touch" qui privilégie le travail en "finesse".
C'était la huitième nomination de la carrière du compositeur français, l'un des plus recherchés de l'industrie du cinéma. C'est une victoire surprise car Johann Johannsson était donné gagnant par les pronostiqueurs d'Hollywood pour "Une merveilleuse histoire du temps". "Un Oscar est un Oscar. C'est la plus grande récompense dont un cinéaste peut rêver. Je crois que ça veut tout dire", a déclaré Alexandre Desplat en coulisses, après avoir quitté la scène.
L'Oscar, la seule récompense qu'il n'avait pas encore obtenue
"Il est très difficile de convaincre des metteurs en scène américains de faire appel à vous, ils ont leur réseau et la pression est énorme", raconte Alexandre Desplat qui a reçu la célèbre statuette pour "The Grand Budapest Hotel", après six tentatives infructueuses depuis 2007, notamment avec "Le Discours d'un roi" et "Philomena".
A 53 ans, cette récompense s'ajoute à une collection de trophées déjà bien fournie, du Bafta au Golden Globe en passant par un Grammy Award. Sans compter trois César remportés en 2006, 2011 et 2013 pour "De battre mon cour s'est arrêté", "The Ghost Writer" et "De rouille et d'os". Un palmarès réalisé en tout juste dix ans, depuis 2005 et l'Ours d'argent obtenu à la Berlinale avec "De battre mon coeur s'est arrêté" de Jacques Audiard, son metteur en scène fétiche pour lequel il a composé six bandes originales.
"Birth", le déclic
Très française jusqu'au début des années 2000, la carrière du maestro s'internationalise lorsqu'arrivent les premières propositions d'outre-Atlantique, "La jeune fille à la perle" de Peter Webber en 2003, puis "Birth" de Jonathan Glazer, sorti l'année suivante. C'est le déclic. "Les gens appelaient et réclamaient la personne qui avait composé la musique de Birth", se souvient Laura Engel, son agent.
Dès lors, les projets d'envergure s'enchaînent, avec les plus grands cinéastes, Fincher, Polanski, Frears, Wes Anderson ou George Clooney, avec lequel il a travaillé à deux reprises pour "Les marches du pouvoir" (2011) et "Monuments men" (2014).
Il est l'auteur de plus d'une centaine de bandes originales dont le dernier opus de la saga des Harry Potter, un des temps forts de sa carrière. "Etre devant cent musiciens au pupitre tous les jours, debout pendant 9 heures, avec le staff de la Warner et des producteurs en cabine qui attendent que vous les surpreniez, c'est beaucoup de pression", se souvient-il.
"A chaque film, je fais une proposition stylistique différente, parfois même avec un metteur en scène avec lequel j'ai déjà travaillé", explique le compositeur. "Si le film monte à un certain niveau, c'est en grande partie grâce à sa musique", dit de lui Roman Polanski dans un documentaire signé Pascale Cuenot, sorti l'an passé.
Fonction et fiction
Né en 1961 d'un père français fan de la chanteuse égyptienne Oum Kalsoum et d'une mère grecque, Alexandre Desplat a baigné dès l'enfance "dans un tourbillon musical", du jazz à la bossa nova en passant par les musiques grecque et arabe. "J'ai pris beaucoup de temps à me construire et à savoir quel était mon univers, j'avais tellement d'influences qu'il a fallu que je les synthétise", note le musicien. Il raconte aussi sa passion pour le cinéma, "presque aussi forte que pour la musique" et qui fait de lui un cinéphile reconnu dans le monde du 7e art. C'est à ce titre qu'il fut membre du jury du festival de Cannes en 2010 et président de celui de la Mostra de Venise l'an passé, une première pour un musicien. Interrogé par l'AFP à l'occasion de sa présidence vénitienne, il expliquait la place qu'occupe à ses yeux la musique à l'écran. "Elle a deux rôles primordiaux: la fonction et la fiction. La fonction, c'est la vitesse, le rythme ; la fiction, c'est ce qui crée un univers qui n'est pas dans le film mais autour du film. C'est cet équilibre qui m'intéresse".
Et les films où il n'y a pas de musique ? "Je ne suis pas obsédé par le fait d'avoir ou pas une musique dans les films. Beaucoup de films sont utosuffisants. Il m'est arrivé de nombreuses fois en voyant un film la première fois de dire : je ne suis pas sûr que la musique soit nécessaire", admet-il.
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