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Cannes 2013 : Palme d’or à l'amour pour "La Vie d'Adèle" d’Abdellatif Kechiche
Ce 66e palmarès du Festival de Cannes a récompensé à la plus haute marche, le film qui a fait l’unanimité auprès de la critique, ce qui est rare, mais renouvelle l’expérience de l’an dernier avec « Amour » où le même accord s’était avéré. Ce palmarès récompense le cinéma français, défendeur de l’exception culturelle, comme l’a souligné le président Spielberg.
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Une Palme d’or contre les petites mauvaises odeurs
La Palme d’or, remise des mains d’Uma Thurman, à « La Vie d’Adèle – Chapitre 1 et 2 », d’Abdellatif Kechiche, reflète l’émotion palpable qui ressortait de la première de presse du film, où toute la critique s’était retrouvée stupéfaite devant cet ovni de trois heures, filmé pratiquement in extenso en gros plans, sans faire décrocher une seconde la salle. Une anecdote : au lendemain de cette projection mémorable, tout le monde guettait la cote du magazine professionnel Le Film français, où il engrangeait 11 Palmes de la part de la critique, du jamais vu.
Film sur la révélation à l’amour et à la sexualité d’une jeune fille par l’homosexualité, « La vie d’Adèle » arrive à point nommé, alors que les anti-mariage gay faisait leur dernier baroud d’honneur à Paris. Une bonne petite claque aux mauvaises odeurs. La Palme a été remise au trio que compose le réalisateur et ses deux comédiennes, Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos, le président Spielberg ne les distinguant pas, mais les rassemblant dans cette Palme dédiée par Abdelltif Kechiche « à cette belle jeunesse de France qui m’a appris sur la liberté ».
Une pluie d’étoiles
Deuxième Palme pour la France, celle remise à Bérénice Bejo pour son rôle dans « Le Passé » du réalisateur iranien Asghar Farhadi qu’elle a fait monter sur scène pour recevoir sa Palme. Farhadi, après « Une séparation », tenait à réaliser son prochain film en France, cela lui réussit. Tant mieux. Sorti dans la foulée de sa projection à Cannes, il marche déjà très bien : mérité. Très bonne surprise de voir le Prix d’interprétation masculine remis à Bruce Dern pour sa prestation dans « Nebraska » d’Alexander Payne (« The Descendants ») qui est monté sur scène pour se voir remettre la Palme, l’acteur n’étant pas à Cannes. Formidable reconnaissance pour cet immense comédien et un film qui figurait parmi nos favoris. Petit rappel de sa filmographie : « Le Retour » d’Hal Ashby, « Gatsby le magnifique » de Jack Clayton, « On achève bien les chevaux » de Sydney Polack », sans oublier « Silent Running » de Douglas Trumble. Une très belle Palme, méritée pour ce « Nebraska », magnifique. Le Prix du scénario est revenu au film chinois de Jia Zangke, « A Touch of Sin » qu’on ne pouvait pas ne pas honorer d’une manière ou d’une autre. Il se trouve que c’est sous les auspices du scénario que cette récompense a été remise des mains d’Asia Argento. Un magnifique film, parmi nos préférés, sur les dégâts collatéraux de la mondialisation en Chine, que l’on peut malheureusement exporter ailleurs. Le Prix du jury, remis par Rossy de Palma, est revenu à « Tel père, tel fils » du japonais Kore-Eda Hirokazu. Ce prix s’avère celui du président Spielberg en fait, dont nombre de ses films renvoient à l’enfance (« Rencontre du 3e type », « E. T. », « Empire of the Sun »…) Très beau film par ailleurs, mais tout de même en deçà de son splendide « Nobody Knows », son chef-d’œuvre à ce jour. Les surprises
L’inattendu est venu de la remise du Prix de la mise en scène, par Forest Whitaker, au film mexicain d’Amat Escalente, « Heli », peu goûté par la presse. Reconnaissons que sa mise en scène très âpre, parfois choquante, reste son meilleur atout. L’an dernier, le jury avait récompensé du même prix le film mexicain de Carlos Reygadas - mentor d’Escalente - « Post Tenebras Lux »., descendu par la critique. Cette persistance mexicaine à Cannes demeure suspect… Le remise du Grand Prix des mains de Kim Novak au film des frères Coen « Inside Llewyn Davis » est tout de même un peu « too much ». Le film est bon, agréable, plaisant, mais de là à lui donner une telle récompense, considérée comme le frère jumeau de la Palme d’or, c’est un peu trop. Même si l’on aime beaucoup les Coen, on n’en attendait pas moins d’eux dans ce film sans surprises. Le producteur, monté sur scène recevoir le prix, nous a tout de même donné des nouvelles du chat, très important dans le film "il va bien". Ouf… Mais pour nous, « Nebraska » aurait davantage mérité ce prix. Bilan
Au final, ce 66e palmarès apparaît des plus équilibrés, avec ses audaces et ses conventions. Un bilan consensuel. Un bruit courut tout ce festival sur une rivalité entre le camp Spielberg et le camp Kidman dans le jury. Belle rivalité hypothétique qui accouche d’un beau palmarès et la mise en lumière de l’évidence d’« Adèle ».
A la question de savoir pourquoi le titre est suivi de « Chapitre 1 et 2 », il s’avère que Kechiche entrevoit de donner une suite à son film. Une séquelle indépendante du roman graphique qu’il a adapté. A l’année prochaine alors ?... Nos regrets : l’absence au palmarès de « Borgman », d'Alex Van Warmerdam, qui tranchait vraiment sur le reste de la sélection, et de « Only Lovers Left Alive » de Jim Jarmusch, à nos yeux, les meilleurs films de la sélection avec « La Vie d’Adèle » et « Nebraska ».
La Palme d’or, remise des mains d’Uma Thurman, à « La Vie d’Adèle – Chapitre 1 et 2 », d’Abdellatif Kechiche, reflète l’émotion palpable qui ressortait de la première de presse du film, où toute la critique s’était retrouvée stupéfaite devant cet ovni de trois heures, filmé pratiquement in extenso en gros plans, sans faire décrocher une seconde la salle. Une anecdote : au lendemain de cette projection mémorable, tout le monde guettait la cote du magazine professionnel Le Film français, où il engrangeait 11 Palmes de la part de la critique, du jamais vu.
Film sur la révélation à l’amour et à la sexualité d’une jeune fille par l’homosexualité, « La vie d’Adèle » arrive à point nommé, alors que les anti-mariage gay faisait leur dernier baroud d’honneur à Paris. Une bonne petite claque aux mauvaises odeurs. La Palme a été remise au trio que compose le réalisateur et ses deux comédiennes, Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos, le président Spielberg ne les distinguant pas, mais les rassemblant dans cette Palme dédiée par Abdelltif Kechiche « à cette belle jeunesse de France qui m’a appris sur la liberté ».
Une pluie d’étoiles
Deuxième Palme pour la France, celle remise à Bérénice Bejo pour son rôle dans « Le Passé » du réalisateur iranien Asghar Farhadi qu’elle a fait monter sur scène pour recevoir sa Palme. Farhadi, après « Une séparation », tenait à réaliser son prochain film en France, cela lui réussit. Tant mieux. Sorti dans la foulée de sa projection à Cannes, il marche déjà très bien : mérité. Très bonne surprise de voir le Prix d’interprétation masculine remis à Bruce Dern pour sa prestation dans « Nebraska » d’Alexander Payne (« The Descendants ») qui est monté sur scène pour se voir remettre la Palme, l’acteur n’étant pas à Cannes. Formidable reconnaissance pour cet immense comédien et un film qui figurait parmi nos favoris. Petit rappel de sa filmographie : « Le Retour » d’Hal Ashby, « Gatsby le magnifique » de Jack Clayton, « On achève bien les chevaux » de Sydney Polack », sans oublier « Silent Running » de Douglas Trumble. Une très belle Palme, méritée pour ce « Nebraska », magnifique. Le Prix du scénario est revenu au film chinois de Jia Zangke, « A Touch of Sin » qu’on ne pouvait pas ne pas honorer d’une manière ou d’une autre. Il se trouve que c’est sous les auspices du scénario que cette récompense a été remise des mains d’Asia Argento. Un magnifique film, parmi nos préférés, sur les dégâts collatéraux de la mondialisation en Chine, que l’on peut malheureusement exporter ailleurs. Le Prix du jury, remis par Rossy de Palma, est revenu à « Tel père, tel fils » du japonais Kore-Eda Hirokazu. Ce prix s’avère celui du président Spielberg en fait, dont nombre de ses films renvoient à l’enfance (« Rencontre du 3e type », « E. T. », « Empire of the Sun »…) Très beau film par ailleurs, mais tout de même en deçà de son splendide « Nobody Knows », son chef-d’œuvre à ce jour. Les surprises
L’inattendu est venu de la remise du Prix de la mise en scène, par Forest Whitaker, au film mexicain d’Amat Escalente, « Heli », peu goûté par la presse. Reconnaissons que sa mise en scène très âpre, parfois choquante, reste son meilleur atout. L’an dernier, le jury avait récompensé du même prix le film mexicain de Carlos Reygadas - mentor d’Escalente - « Post Tenebras Lux »., descendu par la critique. Cette persistance mexicaine à Cannes demeure suspect… Le remise du Grand Prix des mains de Kim Novak au film des frères Coen « Inside Llewyn Davis » est tout de même un peu « too much ». Le film est bon, agréable, plaisant, mais de là à lui donner une telle récompense, considérée comme le frère jumeau de la Palme d’or, c’est un peu trop. Même si l’on aime beaucoup les Coen, on n’en attendait pas moins d’eux dans ce film sans surprises. Le producteur, monté sur scène recevoir le prix, nous a tout de même donné des nouvelles du chat, très important dans le film "il va bien". Ouf… Mais pour nous, « Nebraska » aurait davantage mérité ce prix. Bilan
Au final, ce 66e palmarès apparaît des plus équilibrés, avec ses audaces et ses conventions. Un bilan consensuel. Un bruit courut tout ce festival sur une rivalité entre le camp Spielberg et le camp Kidman dans le jury. Belle rivalité hypothétique qui accouche d’un beau palmarès et la mise en lumière de l’évidence d’« Adèle ».
A la question de savoir pourquoi le titre est suivi de « Chapitre 1 et 2 », il s’avère que Kechiche entrevoit de donner une suite à son film. Une séquelle indépendante du roman graphique qu’il a adapté. A l’année prochaine alors ?... Nos regrets : l’absence au palmarès de « Borgman », d'Alex Van Warmerdam, qui tranchait vraiment sur le reste de la sélection, et de « Only Lovers Left Alive » de Jim Jarmusch, à nos yeux, les meilleurs films de la sélection avec « La Vie d’Adèle » et « Nebraska ».
Enfin, l'oublié "Jeune et Jolie" de François Ozon, avec une Marine Vacth extraordinaire, manque au tableau, sur un très beau script. Beau palmarès tout de même. Vivement l'année prochaine !
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