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Cannes 2016 : "Swagger", de la banlieue à la Croisette
11 adolescents d'Aulnay-sous-Bois, en banlieue parisienne, à Cannes. Ils ont monté les marches du festival pour présenter "Swagger". Une fiction-documentaire d'Olivier Babinet qui leur donne la parole. Ce long-métrage a été sélectionné par les cinéastes de l'ACID, une section parallèle du Festival de Cannes.
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Ils s'appellent Régis, Naïla, Aïssatou ou Salimata. Ce sont des adolescents d'une cité d'Aulnay-sous-Bois, dans la banlieue parisienne. Dans "Swagger", fiction-documentaire singulière, ils disent comment ils voient le monde.
Reportage France 2 : P.Deschamps / G. Beaufils / V. Bouffartigue / J-P. Bosch / A. Gidon
Pendant plusieurs mois, le réalisateur a posé sa caméra au collège Claude Debussy d'Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, pour recueillir la parole de onze collégiens, filles et garçons, choisis parmi des centaines. L'établissement compte 50% d'élèves issus de familles se situant sous le seuil de pauvreté. "Souvent les films sur la banlieue sont faits par des adultes et portent un regard condescendant sur les jeunes des cités. J'ai adopté une démarche inverse, je voulais voir à travers leur yeux pour qu'ils nous montrent comment ils perçoivent le monde", explique Olivier Babinet. "Il fallait à tout prix éviter le misérabilisme, leur donner la parole d'une manière différente en prenant le temps de les écouter. Je suis tombé un jour sur un reportage télévisé sur le collège Debussy : on voit la grille du collège filmée de loin, trois mecs à capuche et du synthétiseur angoissant...", raconte-t-il.
Le réalisateur a choisi de procéder à de longs entretiens avec ses onze acteurs en leur posant à tous les mêmes questions sur leur vie au collège, leurs amitiés, leurs amours, la religion ou l'immigration. "Je ne les avais pas prévenus à l'avance des questions que je leur poserais. Ils acceptaient donc de figurer dans le film sans savoir à l'avance ce qui les attendait", explique le quadragénaire.
Les réponses sont spontanées, souvent drôles, parfois lucides. Comme celle de Naïla, petite fille qui dit qu'elle veut devenir architecte parce que les immeubles de la cité "sont trop hauts et qu'un jour, un enfant qui jouait au ballon sur son balcon est tombé du 7e étage". Naïla, qui ouvre le film, raconte "qu'avant, il y avait plein de gens d'origine française qui habitaient ici. Mais quand les Africains et les Arabes sont arrivés, ils n'ont pas voulu rester, ils sont partis". Régis, lui, est un "swagger" (fanfaron en français). C'est la star du collège. Noeud papillon et coupe de cheveu improbable (mi-afro, mi-rasé), il se voit habiter plus tard place de la Madeleine, à Paris, et travailler dans la mode, sa passion. "Ici, c'est le style clonage, tout le monde est en jogging-baskets. Il faut se démarquer, je suis le seul à sortir du lot, sans vouloir de me vanter", dit-il. Le jour de la rentrée, il est arrivé "en jean slim et en manteau de fourrure", et a produit son petit effet. Olivier Babinet a filmé la scène au ralenti, façon clip de rappeur.
Dans leurs chambres, le soir, les adolescents échangent des messages sur les réseaux sociaux. Ils rêvent de la grande ville, comme si Paris était à l'autre bout du monde alors qu'au loin on voit scintiller la Tour Eiffel. Devant la caméra pudique d'Olivier Babinet, ils parlent aussi de la violence sociale ou familiale, du racisme, de la drogue et des dealers qui rôdent au pied des tours.Certains évoquent la tentation de l'argent facile. Le réalisateur fait passer à l'écran leur lucidité, leur fantaisie et aussi à la finesse de leur analyse. "En les écoutant, on a l'impression qu'un retournement s'opère : c'est la banlieue qui parle des Français de souche et de Paris et non l'inverse", confie-t-il.
Reportage France 2 : P.Deschamps / G. Beaufils / V. Bouffartigue / J-P. Bosch / A. Gidon
Pendant plusieurs mois, le réalisateur a posé sa caméra au collège Claude Debussy d'Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, pour recueillir la parole de onze collégiens, filles et garçons, choisis parmi des centaines. L'établissement compte 50% d'élèves issus de familles se situant sous le seuil de pauvreté. "Souvent les films sur la banlieue sont faits par des adultes et portent un regard condescendant sur les jeunes des cités. J'ai adopté une démarche inverse, je voulais voir à travers leur yeux pour qu'ils nous montrent comment ils perçoivent le monde", explique Olivier Babinet. "Il fallait à tout prix éviter le misérabilisme, leur donner la parole d'une manière différente en prenant le temps de les écouter. Je suis tombé un jour sur un reportage télévisé sur le collège Debussy : on voit la grille du collège filmée de loin, trois mecs à capuche et du synthétiseur angoissant...", raconte-t-il.
Le réalisateur a choisi de procéder à de longs entretiens avec ses onze acteurs en leur posant à tous les mêmes questions sur leur vie au collège, leurs amitiés, leurs amours, la religion ou l'immigration. "Je ne les avais pas prévenus à l'avance des questions que je leur poserais. Ils acceptaient donc de figurer dans le film sans savoir à l'avance ce qui les attendait", explique le quadragénaire.
Les réponses sont spontanées, souvent drôles, parfois lucides. Comme celle de Naïla, petite fille qui dit qu'elle veut devenir architecte parce que les immeubles de la cité "sont trop hauts et qu'un jour, un enfant qui jouait au ballon sur son balcon est tombé du 7e étage". Naïla, qui ouvre le film, raconte "qu'avant, il y avait plein de gens d'origine française qui habitaient ici. Mais quand les Africains et les Arabes sont arrivés, ils n'ont pas voulu rester, ils sont partis". Régis, lui, est un "swagger" (fanfaron en français). C'est la star du collège. Noeud papillon et coupe de cheveu improbable (mi-afro, mi-rasé), il se voit habiter plus tard place de la Madeleine, à Paris, et travailler dans la mode, sa passion. "Ici, c'est le style clonage, tout le monde est en jogging-baskets. Il faut se démarquer, je suis le seul à sortir du lot, sans vouloir de me vanter", dit-il. Le jour de la rentrée, il est arrivé "en jean slim et en manteau de fourrure", et a produit son petit effet. Olivier Babinet a filmé la scène au ralenti, façon clip de rappeur.
Dans leurs chambres, le soir, les adolescents échangent des messages sur les réseaux sociaux. Ils rêvent de la grande ville, comme si Paris était à l'autre bout du monde alors qu'au loin on voit scintiller la Tour Eiffel. Devant la caméra pudique d'Olivier Babinet, ils parlent aussi de la violence sociale ou familiale, du racisme, de la drogue et des dealers qui rôdent au pied des tours.Certains évoquent la tentation de l'argent facile. Le réalisateur fait passer à l'écran leur lucidité, leur fantaisie et aussi à la finesse de leur analyse. "En les écoutant, on a l'impression qu'un retournement s'opère : c'est la banlieue qui parle des Français de souche et de Paris et non l'inverse", confie-t-il.
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