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Cannes 2017 : Mathieu Amalric ouvre Un Certain Regard avec "Barbara", faux biopic de la "longue dame brune"

Sept ans après avoir remporté à Cannes le prix de la mise en scène pour "Tournée", Mathieu Amalric ouvre cette année la section Un Certain Regard, avec "Barbara", un "faux biopic" de la chanteuse selon le réalisateur. Le film retrace le tournage d'une évocation de "La longue dame brune", par une actrice, ce qui colle parfaitement aux multiples talents de Jeanne Balibar, elle-même chanteuse.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Jeanne Balibar et Mathieur Amalric dans "Barbara" de Mathieur Amalric
 (Waiting For Cinéma 2017 / Roger Arpajou)

Syncope

"Barbara" n’est pas sans évoquer "Tournée" puisque l’auteure, compositrice, interprète, fait un tour de chant à travers la France, sur la route, dans les hôtels, comme les danseuses de burlesque du premier film d’Amalric. On retrouve également la forme d’un récit éclaté, sans intrigue, passant des scènes parisiennes, à Châteauroux, ou à la conduite d’un camion alors que le chauffeur s’est endormi, jusqu’à l’acquisition de sa maison de Percy-sur-Marne.

On est loin du biopic classique et chronologique à la "Cloclo" ou "Dalida", par ailleurs réussis dans leurs ambitions. Amalric adopte une forme syncopée qui sied à "La chanteuse de minuit", autre surnom de Barbara. On y retrouve un équivalent de sa voix atonale et tout en gammes, au phrasé unique, qui en font une des interprètes majeures de la chanson française. Sans équivalent.

Amalric saisit cette différence et l’exalte dans les comportements parfois fantasques de son modèle, son perfectionnisme, son amour du piano qui lui faisait parfois changer celui découvert dans une salle de concert, s'il ne lui convenait pas. Mais n’élude pas sa générosité, avec son public, son don d’elle-même, entière, à ce qui constituait sa vie : "Mon histoire d’amour, c’est vous". Ou son implication discrète dans la lutte contre le sida dans les prisons dès 1983.

Jeanne Balibar dans "Barbara" de Mathieu Amalric 
 (Waiting For Cinéma 2017 / Roger Arpajou)

Saltimbanques

Le plus troublant est la totale identification de Jeanne Balibar à la chanteuse qu’elle est censée interpréter comme actrice, dans le rôle de Barbara. Une comédienne qui en joue une autre (Béatrice) interprétant un personnage réel. Amalric brouille d’autant plus les pistes qu’il utilise des formes qui rappellent le reportage, varie les grains de l’image, passe au noir et blanc, insère de rares documents… Souvent on ne sait plus où on en est, dans une forme à la fois chaotique et fluide. Ce qui semble bien correspondre au vécu de la chanteuse, dans la part autobiographique et romanesque de ses chansons.

Autre lien avec "Tournée", Matthieu Amalric interprète également dans "Barbara" un meneur de jeu. De "tourneur" (qui mène une tournée de spectacles) dans son premier film, il passe réalisateur dans son dernier. Dans les deux cas, il est à la tête d’une équipe en déplacement, sur la route, avec plein d’aléas, d’anecdotes ; un univers qui, visiblement, le fascine. Saltimbanque. Il ne se donne d’ailleurs pas le meilleur rôle, comme fan de base de la chanteuse, n’y tenant plus et se mettant lui-même en scène dans le film qu’il tourne. Ce qui vaut une des meilleures répliques du film : quand Jeanne Balibar lui lance "Mais c’est un film sur vous ou Barbara que vous tournez ?" Et à Amalric de répondre : "C’est la même chose". Une poésie indéniable émane de cette évocation de "La longue dame brune", titre d’une de ses chansons qui lui va si bien, ou Jeanne Balibar est remarquable dans une prestation qui va bien au-delà de l’imitation. 

"Barbara" : l'affiche
 ( Gaumont Distribution)

LA FICHE

Genre : Drame
Réalisateur : Mathieu Amalric
Pays : France
Acteurs : Jeanne Balibar, Mathieu Amalric, Aurore Clément, Grégoire Colin
Durée : 1h38

Synopsis : Une actrice va jouer Barbara, le tournage va commencer bientôt. Elle travaille son personnage, la voix, les chansons, les partitions, les gestes, le tricot, les scènes à apprendre, ça va, ça avance, ça grandit, ça l'envahit même. Le réalisateur aussi travaille, par ses rencontres, par les archives, la musique, il se laisse submerger, envahir comme elle, par elle.

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