Cannes 2018 : "L'Homme qui tua Don Quichotte", film de clôture controversé
L'histoire ne date pas d'hier. Terry Gilliam a mis 25 ans pour mener à son terme "L'Homme qui tua Don Quichotte" qu'il a par ailleurs écrit avec Tony Grisoni. Un parcours de galérien, semé d'embuches : d'abord prévu avec Jean Rochefort en Quichotte, Johnny Depp en Sancho Panza et Vanessa Paradis en Dulcinée, le tournage fut rapidement arrêté suite à un accident de l'acteur français, puis un ouragan détruisant le plateau.
Terry Gilliam-Paulo Branco : duo sous tension
En 2016, le réalisateur parvient à relancer son projet grâce à un producteur. Mais le sauvetage de Paulo Branco, d'Alfama Films, vire très vite au naufrage : la relation avec Terry Gilliam ayant compromis la suite de cette collaboration. Le réalisateur se tourne alors vers deux autres producteurs, Gerardo Herrero et Jeremy Thomas, et le projet se concrétise.Cinq longues années que l'auteur du déjanté "Las Vegas Parano" (1998) n'avait pas réalisé de long-métrage. Et c'est avec tout autant d'excentricité qu'il est de retour avec "L'Homme qui tua Don Quichotte". Toby, un publicitaire blasé, se retrouve malgré lui dans une aventure aussi surréaliste qu'absurde, entrainé par le délire d'un vieux cordonnier espagnol qui se prend pour Don Quichotte.
Un film signature pour le co-réalisateur de "Monthy Python : Sacré Graal !", qui replonge une fois de plus dans l'ère médièvale en allant puiser (très librement) dans l'univers du Don Quichotte de Cervantes. Une perle tragicomique dont ne pouvait se passer le Festival de Cannes. Pierre Lescure et Thierry Frémeaux, respectivement directeur et délégué général du Festival, ont même décidé d'en faire le film de clôture.
Gros bémol : une procédure juridique est toujours en cours concernant les droits du film. Pour Paulo Branco -via sa société Alfama Films-, le contrat signé en 2016 avec Terry Gilliam est toujours valide, ce qui fait de lui l'un des producteurs du film. En première instance, le juge a tranché en sa faveur, et l'appel ne sera pas rendu avant le 15 juin. Me Juan Branco, l'avocat - et fils - de Paulo Branco s'est donc insurgé contre la projection du film en clôture, décision qui ne peut être prise, selon lui, sans l'accord de tous les producteurs. Le Festival a même été assigné en référé.
"Les artistes ont besoin qu'on les soutienne, pas qu'on les attaque"
L'épilogue de cet imbroglio est prévu le lundi 7 mai - veille de l'ouverture du Festival - puisque le juge des référés rendra, ce jour-là, sa décision au sujet de la validation de la projection du film en clôture de Cannes. En attendant, les organisateurs se sont rangés aux côtés de Terry Gilliam : "Au moment où deux cinéastes (Asghar Farhadi et Kirill Serebrennikov, ndlr) invités en Sélection Officielle sont assignés à résidence dans leur propre pays [...] il est plus que jamais important de rappeler que les artistes ont besoin qu'on les soutienne, pas qu'on les attaque", ont rappelé conjointement Pierre Lescure et Thierry Frémeaux dans un communiqué.Les deux représentants du Festival de Cannes ont néanmoins confirmé qu'ils se plieraient à la décision du juge.
LA FICHE
Réalisateur : Terry Gilliam
Pays : Espagne
Acteurs : Jonathan Price, Adam Driver, Olga Kurylenko
Sortie : 19 mai 2018
Synopsis : Toby, un jeune réalisateur de pub cynique et désabusé, se retrouve pris au piège des folles illusions d’un vieux cordonnier espagnol convaincu d’être Don Quichotte. Embarqué dans une folle aventure de plus en plus surréaliste, Toby se retrouve confronté aux conséquences tragiques d’un film qu’il a réalisé au temps de sa jeunesse idéaliste : ce film d’étudiant adapté de Cervantès a changé pour toujours les rêves et les espoirs de tout un petit village espagnol. Toby saura-t-il se racheter et retrouver un peu d’humanité ? Don Quichotte survivra-t-il à sa folie ? Ou l’amour triomphera-t-il de tout ?...
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