Cannes 2018 : "LETO", grand film rock du dissident russe Kirill Serebrennikov
Sweet eighties
"LETO" évoque l'émergence de la scène rock russe à Leningrad dans les années 80 après la mort de Brejnev (1982), sous les présidences de Youri Andropov, Konstantin Tchernenko et Mikhaïl Gorbatchev. Le film reflète l'esprit de son réalisateur Kirill Serebrennikov. Celui de la liberté de création, d'émancipation. Depuis août 2017, Serebrennikov est assigné à résidence à Moscou. Il est accusé d'avoir détourné des fonds publics, à hauteur de 68 millions de roubles (environ 1 million d'euros), pour la mise en œuvre d'un projet théâtral. Ce dont il se défend.Magnifique sujet qu’a choisi Kirill Serebrennikov pour "LETO", en revenant sur cet esprit libertaire qui précéda puis amena la Perestroïka, et dont le rock fut sans doute le principal moyen d’expression en Russie. Un souffle qui rappelle les années 60 aux Etats-Unis et l’après 68 en France. Dans ces années 80 russes, c’est d’ailleurs la musique de cette époque qu’écoutent les fondateurs des premiers groupes rock du cru : les Beatles, les Doors, T. Rex, David Bowie, Lou Reed, dont il est beaucoup question dans "L’Eté" et qui fournissent une bonne partie de la musique du film.
Pari
Beau sujet mais également superbe mise en scène. Serebrennikov fait le choix d’un très beau scope (écran large) en noir et blanc qu’il parsème d’éclats colorés. Tout comme il insère des scènes qui reprennent des hits phare en les visualisant écoutés dans le contexte russe. Ils sont chantés par les rockers, des voyageurs dans le métro, le bus, des escaliers… sur lesquels sont greffés des motifs graphiques puissants qui donnent une énergie électrique à l’image. Ou ces plans en couleurs qui illustrent le carnet où Mike (Roman Bilyk) traduit en russe les chansons de Marc Bolan (T. Rex), David Bowie, Lou Reed…"LETO", c’est aussi une histoire d’amour entre Mike, Victor (Teo Yoo), destiné à devenir star, Mike, son mentor, et Natacha (Irana Starshenbaum). Un amour conflictuel comme c’est souvent le cas dans l’histoire du rock. Le film est également l’occasion de découvrir la scène rock russe, inconnue en France et d’une grande qualité. Après les demi-déceptions de "Everybody Knows" et "Yomeddine", "L’Eté" entre dans le dur de la compétition avec le premier grand film de cette 71e sélection. Extrêmement bien accueilli, chaudement applaudi par le public et la presse, le film de Kirill Serebrennikov est d’ores et déjà assuré de se retrouver au palmarès attendu le 19 mai. Les paris sont ouverts.
LA FICHE
Réalisateur : Kirill Serebrennikov
Pays : Russie
Acteurs : Irina Starshenbaum, Teo Yoo, Roman Bilyk
Sortie : Prochainement
Synopsis : Leningrad, un été dans les premières années 80 : la scène rock est en pleine ébullition. Viktor Tsoï, un jeune musicien nourri comme tant d’autres aux sons de Led Zeppelin et David Bowie, cherche à se faire un nom. La rencontre avec son idole Mike et son épouse, la belle Natacha, va changer le cours de son destin. Ensemble ils vont construire la légende de Viktor, qui le rendra éternel.
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