"Casse-tête chinois" de Cédric Klapisch : comment la "génération Auberge espagnole" a grandi
Onze ans après le premier opus et huit ans après "Les Poupées russes", le réalisateur français termine sa trilogie générationnelle. Pour francetv info, six membres de la "génération Auberge espagnole" revisitent leur vie.
On n'avait pas vu vieillir L'Auberge espagnole. Et pourtant, mercredi 4 décembre, Casse-tête chinois, le troisième volet de la saga emblématique de Cédric Klapisch, sort au cinéma, onze ans après le premier opus.
Dans Casse-tête chinois, Xavier (incarné par Romain Duris), étudiant en Erasmus à Barcelone dans L'Auberge espagnole, puis trentenaire dans Les Poupées russes en 2005, a maintenant 40 ans. Devenu père de deux enfants, il continue à avoir du mal à gérer sa vie, son travail et ses amours.
Depuis juin 2002 et la sortie de L'Auberge espagnole, ils sont nombreux à s'être identifiés à Romain Duris, Cécile de France, Audrey Tautou, Kelly Reilly... Partis en échange universitaire avec Erasmus, ils ont découvert la colocation, les fêtes, les chocs culturels, les histoires d'amour. Comme les personnages de Klapisch, ils ont aujourd'hui bien grandi. Pour francetv info, six membres de la "génération Auberge espagnole" revisitent leur vie.
Erasmus, un rite initiatique
Si le programme d'échange européen Erasmus a été créé en 1987, c'est le film de Cédric Klapisch qui l'a réellement popularisé en France. "L'année qui a suivi L'Auberge espagnole, il y a eu deux fois plus de demandes en France pour faire Erasmus. Je ne pouvais pas l'imaginer ! s'étonne encore le réalisateur, interrogé par francetv info. Encore aujourd'hui, on m'arrête dans la rue pour me dire : 'Je suis allé faire des études à l'étranger grâce à L'Auberge espagnole'."
Ce film a changé la vie de Thomas. Lorsqu'il le voit à sa sortie, il n'a que 16 ans et est encore au lycée. "J'y ai découvert le concept d'Erasmus. C'est ce film qui a motivé mon envie de faire des études supérieures et mon départ à l'étranger, avec l'ambition de vivre la vie de Xavier, le personnage principal", nous confie le jeune homme. Son bac en poche, il choisit de faire des études d'ingénieur. Et s'assure de trouver une école où le séjour à l'étranger est prévu dans le cursus.
En 2008, il part pendant six mois suivre des cours en Californie. Comme dans L'Auberge espagnole, il vit en colocation avec deux Allemands et un Américain. "On vit la même chose que Xavier dans le film, on apprend le vivre-ensemble et on se confronte aux différences culturelles." Un "effet de miroir" souhaité par Cédric Klapisch, qui réalise ses films "après avoir observé des choses de la vie réelle". "C'est normal que les gens se reconnaissent dans les personnages, confirme Romain Duris. C'est générationnel parce que Klapisch sait très bien décrire la vie des gens telle qu'elle est."
Jean-Sébastien est parti en Erasmus en 2002 et 2003 : six mois à Dublin, en Irlande, puis six mois à Barcelone. "A Barcelone, on avait seulement 10 heures de cours par semaine. Donc on a bossé les deux dernières semaines, le reste du temps on est sortis, on a fait la fête. Comme dans le film", raconte le jeune homme, aujourd'hui âgé de 35 ans. "J'étais censée faire mon mémoire l'année de mon Erasmus, mais je n’ai pas fait grand-chose…" témoigne Marion, partie à Nottingham (Angleterre) en 2003 pour sa maîtrise de sociologie. Fêtes Erasmus, pubs et découverte du pays… Finalement, le mémoire sera rendu avec un an de retard. Et, comme les héros de L'Auberge espagnole, Marion a vécu la "confrontation aux autres". "Exactement comme dans le film, quand le frère de la coloc anglaise, Wendy, rappelle à l'Allemand le passé nazi de son pays. Nous aussi, nous avons eu la visite du frère d'un coloc qui s'est avéré être un peu lourd."
Toutefois, elle nuance une "vision idyllique" de l'aventure Erasmus. "Déjà, tout le monde ne peut pas se permettre de partir. Et sur place, on n'avait pas de thunes. On ne pouvait pas faire grand-chose, la bourse Erasmus est ridicule, nos repas se limitaient souvent à des chips… Dans L'Auberge espagnole, ce n'est pas le problème des personnages, constate Marion. Même si c'est vrai que l'on garde les bons souvenirs à la fin."
L'amour, l'amour, l'amour
Au delà des fêtes, de la bande d'amis, le fil rouge des trois films de Cédric Klapisch reste les relations amoureuses qui se font et se défont. Clémence, 29 ans, a étudié en 2005 la civilisation anglo-saxonne pendant huit mois à Calgary, au Canada. "On est là pour une période courte, donc tout est plus intense, témoigne la jeune femme. On est loin de ses amis et de sa famille et on veut découvrir de nouvelles personnes, donc on fonce." Naturellement, elle se fait beaucoup d'amis dans la résidence universitaire réservée aux étudiants étrangers où elle vit au Canada. Parmi eux, un Allemand. Entre elle et lui naît une histoire d'amour.
Pour ne pas se séparer après les huit mois d'études, Tobias, le petit ami de Clémence, réussit à décrocher un échange en Erasmus à Paris et les tourtereaux s'installent dans la capitale. Le couple se marie en 2010 et déménage à Munich, en Allemagne, la même année. Ils ont aujourd'hui un petit garçon d'un an.
Pendant leur séjour à l'étranger, d'autres se contentent de batifoler, mais en gardent de bons souvenirs. Comme dans L'Auberge espagnole, le séjour en Erasmus est propice aux aventures. Passé par Dublin et Barcelone, Jean-Sébastien évoque dans un sourire certaines de ses colocataires, "devenues des amies et parfois des maîtresses".
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