César 2020 : nominations, manifestations et démission, une 45e cérémonie sous haute tension
Jamais depuis 45 ans, les César n’auront été autant bousculés avant même leur célébration. Voici le déroulé d’une 45e cérémonie que l'on annonce agitée.
Manifestations féministes, fronde contre les douze nominations pour J’accuse de Roman Polanski, démission de la direction de l’Académie… Autant de sujets qui fâchent et mettent la 45e cérémonie des César sous tension, dans un climat inédit. Comment en est-on arrivé là et quelles en sont les conséquences pour l’organisation de la soirée ?
Une nouvelle direction des César
A deux jours de la cérémonie des César, la productrice Margaret Menegoz a été nommée mercredi 26 février présidente de l'Association pour la promotion du cinéma qui organise les César, dans l'attente d'une assemblée générale extraordinaire qui aura lieu le 20 avril.
"Les membres de l'association seront réunis en assemblée générale extraordinaire le 20 avril 2020, au CNC, afin d'adopter de nouveaux statuts et remplacer provisoirement les membres démissionnaires du conseil d'administration, dans l'attente de la mise en place d'une gouvernance définitive", a précisé le CNC.
Collages anti-Polanski appelant au boycott
Le même jour, ont été découverts des messages collés dans la nuit de mardi et mercredi (25 et 26 février) par des membres du groupe des Collages féminicides dénonçant la sélection du film de Roman Polanski J’accuse dans douze catégories.
Le message en lettres rouges et noires "Violanski les César de la honte" surplombe le siège de l'Académie des César, dans le 15e arrondissement de Paris. Des messages de la même teneur ont également été collés en face de la salle Pleyel, où est annoncée une manifestation féministe en prélude de la cérémonie, devant le tapis rouge.
Les origines de la crise
Les "hostilités" avaient commencé le 13 janvier 2020, lors du traditionnel Dîner des Révélations. On y apprend que le président de l’Académie des César Alain Terzian a refusé la présence de l’écrivaine Virginie Despentes et de la réalisatrice Claire Denis qui devaient marrainer deux jeunes espoirs.
Cédric Klapisch, Michel Hazanavicius, Jacques Audiard, Robin Campillo, Laurent Lafitte, Louis Garrel, Golshifteh Farahani et Marina Foïs dénoncent de concert "le malaise" que suscitent ces évictions stigmatisant le manque de parité dans l’Académie.
Démission collective
L'Académie va opérer une révolution culturelle pour atteindre la parité, un vrai 50/50, annonce Alain Terzian. Ça ne suffira pas à éteindre l'incendie. Le lendemain, quelque 200 personnalités du cinéma français dont Omar Sy, Bertrand Tavernier, Céline Sciamma ou Marina Foïs, réclament dans une tribune publiée dans Le Monde une "réforme en profondeur" de l'Académie des César. Leurs reproches principaux : des "dysfonctionnements", une "opacité des comptes" et des statuts qui "n'ont pas évolué depuis très longtemps" et reposent encore et toujours sur "la cooptation"
La réponse de l’Académie ne se fait pas attendre : le 13 février, le comité de direction de l’Académie des César annonçait sa démission collective.
Kiberlain, Foresti : deux femmes dans l'arène
Est-ce la conséquence de la fronde née lors du Dîner des Révélations du 13 février, le 27 janvier l’Académie annonçait que deux femmes chapeauteraient la cérémonie du 28 février. L’actrice Sandrine Kiberlain est désignée présidente des 45e César et l’humoriste Florence Foresti, maîtresse de cérémonie.
Deux jours après, Foresti qui a la tâche d’annoncer les nommés, commet un lapsus, volontaire ou non, quand arrive le nom du réalisateur franco-polonais : "Roman Polanski pour Je suis accus...", avant de se reprendre et d'annoncer : "J'accuse".
Sur les réseaux sociaux, les internautes ont viralisé ce moment. Autre féminisation, le choix de l'actrice Anna Karina, décédée le 14 décembre 2019, sur l'affiche des César 2020.
Douze gouttes qui ont fait déborder le vase
Douze nominations pour le film de Roman Polanski, J'accuse. A cette annonce le 29 janvier, la réaction des associations féministes est cinglante. Invitée de Franceinfo le même jour, Céline Piques, la porte-parole de l'association Osez le féminisme, s'insurge.
"Nous sommes sous le choc que Roman Polanski, accusé par plusieurs femmes de viols pédocriminels, soit encore et toujours acclamé par le cinéma français... C'est extrêmement atypique par rapport au mouvement de libération de la parole dans le monde", insiste Céline Piques, dont l'association a appelé au boycott du film de Roman Polanski.
Une organisation chamboulée
Face à une telle remise en cause, comment vont se dérouler ces César 2020 ? Si dans le passé, des boycotts ou discours ont déjà égratigné l’institution, avec l’absence constante de Gérard Depardieu, ou "l’oubli" d’Anémone de prendre sa statuette du meilleur second rôle féminin en 1988, la tempête de 2020 est d’une tout autre ampleur.
L’appel au boycott par les organisations féministes aura-t-il un effet sur le remplissage de la salle Pleyel où se déroule la cérémonie ? Quelle ampleur aura la manifestation féministe devant le tapis rouge, et quelles perturbations entraînera-t-elle ? Des déclarations planifiées ou non vont-elles émailler la soirée ?
Roman Polanski a d’ores et déjà annoncé qu’il ne sera pas présent. Son acteur principal dans J’accuse, Jean Dujardin, est attendu, quant à Grégory Gadebois qui lui donne la réplique, il sera bien présent, selon nos informations. On peut sans doute prédire que le producteur du film, Alain Goldman pour Gaumont, l’accompagnera. Pour le reste, advienne que pourra…
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