"Citoyens du monde" : la retraite est plus belle ailleurs dans la nouvelle comédie de Gianni Di Gregorio
Quatrième film du "Woody Allen italien" Gianni Di Gregorio, "Citoyens du monde" aborde avec humour les velléités d'exil de trois retraités en quête d'ailleurs.
On avait l'habitude de le suivre seul dans ses déconvenues. Depuis son premier film en 2008, l'acteur et réalisateur italien Gianni Di Gregorio s'est forgé un personnage de vieux garçon un peu paumé, perdu entre les femmes, ses collègues et sa mère encombrante. Une sorte d'Emmanuel Mouret du 3e âge en somme, voire d'un Woody Allen transalpin. Dans Citoyens du monde, l'homme fait cette fois partie d'une bande, ou plutôt d'un trio, celui de retraités loufoques dans leurs préparatifs pour l'exil.
Si le ton plein de malice et de douceur ne faiblit pas, ce nouvel opus des aventures de Gianni s'étiole cependant dans les tergiversations et péripéties. Le fond politico-social qui amorce l'intrigue est lui génialement dépeint, au travers des absurdités administratives et du piètre traitement infligé aux aînés. Sujet qui ne manquera pas d'intéresser de ce côté-ci des Alpes.
La fable pour rire du réel
Avec la bureaucratie kafkaïenne et le quotidien poisseux de ces retraités endettés, le film s'ouvre sans fard dans une réalité peu tendre, celle de l'Italie contemporaine en pleine crise sociale. Mais la patte Di Gregorio est là, cette distance mi-burlesque, mi-intello sur l'absurdité d'un monde qui rend fou. De là Citoyens du monde, au même titre que les précédents films, s'envole vers la fable, vers l'utopie, porté par la cocasserie toute mélancolique propre au cinéaste. L'amitié, l'entraide, la solidarité... Assurément feel-good, cette comédie évite cependant la niaiserie du genre avec ce ton enlevé, mais qui pêche à maintenir sa forme sur les 91 minutes.
Parfois très drôle, comme ces séquences de conseils en destinations, portées par des dialogues parfaits, un sens du burlesque sans faille, on regrette toutefois que le scénario tourne en boucle autour de ce qui semble être la seule idée du film : le choix compliqué des trois compères à se choisir le bon pays, ou la difficulté en substance de quitter une vie d'habitudes, même si celle-ci est de misère. En pâtit la cadence, le rythme, qui s'affesse à mi-parcours, et qui lasse.
L'autobiographique chez Di Gregorio
Réalisateur et interprète d'un personnage portant son prénom, l'ensemble des films de Gianni Di Gregorio posent de fait la question de la part autobiographique qui s'y trouve. Dès Le déjeuner du 15 août, son premier film en 2009, le cinéaste faisait état de l'inspiration directe de sa propre mère pour le récit du film. Le "Gianni" qu'il incarne aujourd'hui dans Citoyens du monde, humble professeur plus habile avec les livres qu'avec les femmes, mène une vie "modeste et discrète similaire [à la sienne]", explique-t-il. Et le parcours de Di Gregorio, qui s'est mis à la réalisation à l'aube de la soixantaine, est lui-même la preuve manifeste de ce que déclare le film : qu'il n'y a pas d'âge pour changer de vie.
La fiche
Genre : Comédie dramatique
Réalisateur : Gianni Di Gregorio
Acteurs : Gianni Di Gregorio, Ennio Fantastichini, Giorgio Colangeli
Pays : Italie
Durée : 1h31
Sortie : 26 août 2020
Distributeur : Le Pacte
Synopsis : Il n’est jamais trop tard pour changer de vie. Deux retraités, le Professeur, qui a enseigné le latin toute sa vie, et Giorgetto, Romain pur jus qui touche une pension de misère, se disent qu’ailleurs, dans un autre pays, l’herbe sera plus verte et leur pouvoir d’achat plus conséquent. Ils sont rejoints dans leur projet de départ par Attilio, antiquaire bohême et grande gueule. Déménager, mais où ? C’est la première question, et peut-être déjà celle de trop. Tant bien que mal, le trio s’organise. Il faut faire ses adieux, retirer ses économies, etc. Mais le plus dur dans l’exil, c’est quand même de partir.
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