Demi Moore, à l'affiche de "The Substance", souhaite qu'on en finisse avec l'objectification des femmes

L'actrice américaine a donné, le 5 novembre, une masterclass à la Cinémathèque française où était présenté, en avant-première à Paris, "The Substance" de la Française Coralie Fargeat.
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
L'actrice américaine Demi Moore pose pour un photocall à l'avant-première du "The Substance" à la Cinémathèque française à Paris, le 5 novembre 2024. (ALAIN JOCARD / AFP)

"Il n'y a rien que je puisse dire pour vous préparer", lançait malicieusement la comédienne américaine Demi Moore à ceux qui n'avaient pas encore vu son dernier film, The Substance de Coralie Fargeat. Quelques heures avant l'avant-première à la Cinémathèque française, mardi 5 novembre 2024, elle livrait une masterclass devant une salle pleine.

Comme elle l'a déjà fait par le passé dans Striptease (1996), À armes égales (1997) ou même Harcèlement (1995), la comédienne sexagénaire met de nouveau au défi son corps, cette fois de femme mûre. Une performance qui rentre en résonance avec The Substance, chronique magistrale d'une quête explosive de jouvence. The Substance est reparti avec le Prix du scénario au dernier Festival de Cannes et pourrait valoir une nomination à Demi Moore aux Oscars. 

Coralie Fargeat et Demi Moore sur le tapis rouge de la cérémonie de clôture du 77e Festival de Cannes au Palais des Festivals, le 25 mai 2024, à Cannes. (MUSTAFA YALCIN / ANADOLU / AFP)

La comédienne y incarne, Elisabeth Sparkle, une star de fitness dont le dégoûtant employeur, Harvey (Dennis Quaid), veut se débarrasser sous prétexte, qu'à 50 ans, elle aurait atteint une sorte de date d'expiration. Dans son désarroi, elle tombe sur la promesse d'une jeunesse retrouvée grâce à un mystérieux produit baptisé The Substance. Il lui permet de produire une version d'elle rajeunie avec laquelle elle doit partager son corps en alternance tous les sept jours. Mais avec l'apparition de Sue (Margaret Qualley), sa jeune version, la vie d'Elisabeth se transforme en un cauchemar.

Dans le propos et la forme, Coralie Fargeat signe une percutante réflexion sur le corps des femmes, la violence qu'elles sont capables de s'infliger pour répondre aux injonctions dont elles font l'objet, notamment de la part des hommes.

Au service de la "vérité" du personnage

Au cours de sa masterclass, Demi Moore a évoqué son rapport au corps et à la façon dont le film de Coralie Fargeat a résonné en elle en la renvoyant à son vécu de jeune actrice. A savoir, entre autres, "la violence que je me suis infligée en essayant d'être ce que je pensais que les autres attendaient de moi'', face à "l'exigence d'un certain type de corps à Hollywood, à la perfection" .

La comédienne s'est aussi exprimée sur la nudité. A l'instar de nombreuses actrices, Demi Moore  a rappelé qu'elle est justifiée quand elle est au service de l'intrigue. Dans The Substance, "beaucoup de ces scènes de nudité interviennent quand les personnages sont seuls et traduisent cette intimité que l'on a avec soi-même. Être nu quand on est seul, devant un miroir, n'est pas une situation anormale. C'est un élément important qui montre la fragilité du personnage qui se trouve ainsi exposé."

"Pour moi, résume-t-elle, c'est moins la nudité que ce qui sert l'histoire". "En tant qu'actrice, je ne peux que consacrer ce que je fais à la sincérité et à la vérité du moment. Même si je peux prendre du recul pour considérer qu'il y a un spectateur qui va regarder et voir une femme qui n'a plus 20 ou 30 ans, s'abandonnant totalement dans sa nudité alors qu'elle a des imperfections liées à son âge."

La réalisatrice française Coralie Fargeat, à gauche, et l'actrice américaine Demi Moore posent pour un photocall avant la première du film "The Substance" à la Cinémathèque française, à Paris, le 5 novembre 2024. (ALAIN JOCARD / AFP)

Les imperfections de son corps, Demi Moore semble n'en avoir jamais fait cas au cinéma. Dans sa vie personnelle, c'est une autre histoire qui a été marquée par un cliché, a-t-elle révélé alors qu'elle était interrogée sur la couverture de Vanity Fair en 1991. La photo, où elle apparaissait nue et enceinte, avait fait beaucoup jaser à l'époque.

"C'est une photo qui, explique-t-elle, a été prise uniquement pour moi et ma famille à la fin de la séance photo. Quand elle a été publiée, je ne m'attendais pas à ce que ça crée un tel tollé. C'est intéressant de réfléchir au fait, qu'à cette époque, une femme était célébrée au moment où elle annonce sa grossesse et au moment de la naissance. Mais l'entre-deux posait apparemment problème parce que cela signifiait de façon trop claire 'J'ai fait l'amour' et il semblerait qu'il ne faille pas trop le rappeler."

La comédienne a confié que le cliché d'Annie Leibovitz avait été important pour elle. "Je trouve, qu'au contraire, dans mon expérience personnelle vis-à-vis de mon corps, qui a parfois été difficile, c'est le moment où je me suis sentie la plus belle, la plus sexy. C'était un ressenti sincère de cet instant. C'est pour cela que j'ai été ravie quand on m'a proposé qu'elle soit publiée."

Elle a également souligné que ses compatriotes étaient "beaucoup plus coincés" sur les questions relatives à la sexualité. "L'Amérique s'est bâtie sur le puritanisme (...) La sexualité est souvent tabou. Il y a beaucoup de peur en Amérique autour du corps." Elle note qu'elle a dû "secouer le cocotier" dans ses films les plus osés. "Je n'ai jamais compris pourquoi l'on pouvait célébrer le corps dans d'autres formes d'art, mais pas au cinéma", regrette-t-elle. "Ce que j'aimerais voir changer, assure Demi Moore, c'est le fait que les femmes soient objectifiées."

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