"Belmondo par Belmondo", le road movie d'une légende populaire
Une belle voiture décapotable immatriculée aux Etats-Unis roule sur une route d'Italie et à son bord un quinquagénaire aux tempes argentées conduit tranquillement. A ses côtés un homme aux cheveux très blancs, un large sourire aux lèvres, profite du voyage. Le ton du film est donné. Paul conduira Jean-Paul sur les lieux de ses tournages, en Italie, sur la Côte d'Azur, à Paris, au Brésil. Il y croisera sa jeunesse, ses films, ses partenaires, ses réalisateurs, ses épouses, ses parents, ses enfants. C'est un road movie.
Jean-Paul Belmondo est formel, il s'est vu plusieurs fois proposer de participer à un documentaire dont le thème serait sa vie et sa carrière. Le comédien a toujours refusé. Jusqu'au jour où c'est son fils Paul qui est venu lui en parler. C'était aussi, et peut-être même avant tout, le cadeau d'un fils aimant à son père. Le patriarche des Belmondo ne pouvait pas refuser. Il a donc lui aussi fait ce cadeau : accepter.
Si le documentaire commence avec les premiers films de Belmondo et se termine avec quelques-uns des derniers, le chemin emprunté par le réalisateur n'est pas linéaire. Il fait des détours, revient sur ses pas, revisite un épisode déjà évoqué, s'attarde... Le fil conducteur reste pourtant limpide, une vie d'homme n'est pas un long fleuve tranquille et celle de Belmondo pas plus qu'une autre. Et cette promenade cinématographique est particulièrement agréable. Parce qu'on y voit Jean-Paul Belmondo bien sûr, mais aussi parce qu'on y croise tant de visages chers au public. Certains témoignages sont des documents posthumes, avec Georges Lautner, Jean-Pierre Melville, Henri Verneuil, Philippe de Broca... D'autres nous permettent de retrouver ses amis des débuts, Jean Rochefort, Guy Bedos, son vieux pote de toujours Charles Gérard (quelle verve et quelle talent pour raconter des anecdotes désopilantes), son partenaire Richard Anconina. Ses réalisateurs Jean-Luc Godard, Jean Becker, Jean-Paul Rappeneau, Philippe Labro, Claude Lelouch, le cascadeur Rémy Julienne sont toujours là et louent tous l'exceptionnel professionnalisme du "Professionnel" ! Son cadet de trois ans, Alain Delon rappelle qu'ils furent tous deux les champions du box office. "C'était une fois lui, une fois moi...". Fidèle à sa légendaire réputation de modestie, le Roch Siffredi de "Borsalino" affirme enfin que Belmondo, pour résumer, est un géant et qu'il est son égal.
Le périple filial nous emmène sur les lieux de tournages restés dans l'histoire du cinéma : la petite ville normande de Villerville, décor d' "Un singe en hiver", le coin de rue parisien fatal au héros d' "A bout de souffle", les immeubles de Copacabana qu'il escalade dans "L'homme de Rio", Cinecitta, les rues de Rome, les toits de Paris... On y apprend au détour d 'une confidence que le comédien a bien failli perdre la vie lors d'une cascade. Un cable a cédé et il s'est retrouvé pendant de longues minutes accroché à un autre cable à plusieurs dizaines de mètres de hauteur ne tenant qu'à la seule force des mains et des pieds.
Reportage de France 3 Basse-Normandie lors du tournage de "Belmondo par Belmondo"
Tout au long de ce voyage de plus d'une heure et demie, le Bébel d'aujourd'hui, toujours rayonnant d'un extraordinaire sourire, évoque ses amis, ses amours, ses partenaires (ah, Gabin!). A 82 ans, physiquement diminué depuis 2001 à la suite d'un accident vasculaire cérébral, qu'il nomme pudiquement "la maladie", Jean-Paul Belmondo donne une exceptionnelle leçon de vie. Malgré le handicap qui l'afflige, il continue de dévorer la vie quotidiennement. Ses amis disparaissent les uns après les autres, le souvenir de ses parents est toujours présent, ses enfants lui sont fidèles, ses compagnes évoquent sa personnalité avec tendresse et humour. Jean-Paul Belmondo fut le Solitaire, le Professionnel, il fut Léon Morin prêtre, le Doulos, il fut l'incorrigible comme le Guignolo, il fut Jean Valjean, et Docteur Popaul. Il serra dans ses bras les plus belles femmes du moment. Pierre Dux, de la Comédie Française, lui dit un jour qu'il n'aurait jamais de succès avec les femmes. Le croisant bien des années plus tard au bras de sa compagne d'alors, Ursula Andress, Belmondo se contenta de ces quelques mots : "On fait ce qu'on peut!".
"Belmondo par Belmondo"
Documentaire sur une idée de Paul Belmondo
1h39
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