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"Framing Britney Spears", un documentaire choc sur la violence et la misogynie du show business

Disponible sur Amazon Prime, "Framing Britney Spears" retrace la vie de la pop-star telle que vous ne l’avez jamais vue. Ce documentaire qui a fait couler beaucoup d'encre aux États-Unis raconte comment la chanteuse a été malmenée par l’industrie musicale et médiatique, son public et même sa famille.

Article rédigé par franceinfo Culture - Faustine Mazereeuw
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 6min
"Framing Britney Spears" révèle les violences subies par la star pendant sa carrière, et une mise sous tutelle pour raison de santé mentale qui pose question. (Amazon Prime Video)

C’est le documentaire choc sur une icône de la musique pop dont tout le monde parle aux États-Unis. Framing Britney Spears - traduisez en français "Piéger Britney Spears" - est sorti le 5 avril sur la plateforme de streaming Amazon Prime. Le titre est équivoque : cette enquête du New York Times fait le choix d’aborder la vie de la chanteuse non pas sous l’angle de sa musique, mais sous celui de la violence et de la misogynie qu'elle a subies de la part du monde du show business et des médias. Le film pose également la question de la tutelle qu’exerce son père sur la star depuis 2008, contrôlant ainsi ses décisions, ses apparitions dans les médias, ses réseaux sociaux mais surtout sa fortune. Le documentaire a relancé le mouvement #FreeBritney, qui milite pour la libération de la célébrité.

Une icône tour à tour adulée et traînée dans la boue

Dès les premières minutes du documentaire, on assiste à une scène déconcertante dans laquelle l’animateur d’une émission de chant demande à une petite Britney de dix ans si elle a un petit copain. “Non monsieur, ils sont méchants”, répond l'enfant-star, mal à l'aise. Un échange annonciateur de la façon dont Britney Spears devra toute sa vie durant rendre des comptes sur sa vie personnelle et intime. En 2002, son ex-compagnon Justin Timberlake l’accuse de l’avoir trompé dans la chanson Cry Me A River : pour ses propos le chanteur a présenté des excuses en février dernier. D’une image virginale à ses débuts de carrière, Britney devient une dangereuse séductrice, une fille facile, un mauvais exemple pour les enfants américains.

Quelques années plus tard viennent les qualificatifs de “mauvaise mère” après que la chanteuse ne manque de faire tomber son bébé. À l’époque, on se garde bien de mentionner qu’elle était à ce moment-là poursuivie et bousculée par des paparazzis... Incessamment suivie, le documentaire montre une Britney Spears tétanisée sous les flashs, une expression de peur sur le visage. Jusqu’au jour, en 2007, où la chanteuse se rase la tête en public. Un geste dont la presse à scandale fera ses choux gras. Britney Spears est étiquetée “folle”, sans considérer ce geste comme un possible appel à l’aide. Dans un post Instagram publié après la diffusion du documentaire, elle se confie sur cette pression constante. "Ma vie a toujours été discutée… regardée… et jugée, vraiment toute ma vie ! (…) J’ai toujours été tellement jugée, insultée et embarrassée par les médias, et je le suis encore aujourd’hui".

Une mise sous tutelle qui pose question

Déclarée inapte à prendre des décisions, Britney Spears est placée par la justice sous la tutelle de son père en 2008, et n’en est jamais sortie. Si la santé mentale de la jeune femme nécessitait une aide de ses proches, cette décision et la situation actuelle posent question au regard de plusieurs éléments mis en lumière par l’enquête du New York Times. Les mises sous tutelle sont en général réservées à des personnes âgées ne pouvant se débrouiller seules, et pas à des jeunes adultes de 27 ans (elle a aujourd'hui 39 ans).

Alors qu’elle ne peut faire ses propres choix, Britney Spears enchaîne les tournées jusqu’en 2018. Son père, quant à lui, gère sa fortune et engrange jusqu'à 1,5% de ses revenus, selon le documentaire. La tutelle a d’ailleurs été qualifiée de “modèle d’entreprise hybride” dans une requête judiciaire. Framing Britney Spears révèle que la chanteuse elle-même a manifesté son désaccord : elle n’aurait jamais été proche de son père, et avait exprimé le refus que son père soit son tuteur à la justice. Depuis deux ans, elle a entamé des démarches pour changer de tuteur.

Une enquête remarquable

Si Framing Britney Spears prend assez nettement le parti de la pop-star, le travail effectué par les journalistes du New York Times reste remarquable. Le film n’en oublie pas de donner écho à tous les points de vue – celui de proches, des avocats des deux partis et même d'un paparazzi – et d’apporter de la nuance en rappelant que certains éléments manquent pour tirer des conclusions. Certains dossiers médicaux n’ont ainsi jamais été dévoilés.

Malgré tout, cette enquête reste troublante et met en lumière un système du show business et des médias d’une extrême violence envers les femmes, ainsi que tous les abus subis par la chanteuse. “J’ai travaillé avec tous les boys bands et jamais aucun des garçons n’a été scruté comme elle”, affirme son ancienne styliste Hayley Hill. Plusieurs personnes restent aux abonnés absents, notamment son père Jamie Spears, qui a décliné toute demande d’interview, et Britney Spears elle-même. Le documentaire se termine sur ce constat : “Le New York Times a tenté de joindre directement Britney pour lui demander de participer à ce projet. Il n’est pas sûr qu’elle ait reçu ces demandes”.

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