"Fainéant.es" : Karim Dridi célèbre la marginalité dans un road-movie bouleversant

Le cinéaste rend hommage aux "invisibles", en suivant deux amies inséparables qui tracent leur route en quête de fêtes, de rencontres et de liberté. Indispensable.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Faddo Jullian et .jU. dans "Fainéant.es" de Karim Dridi. (New Story)

Entre documentaire et fiction, signature du réalisateur de Bye-Bye, Fainéant.es, sorti en salles le 29 mai, est un road-trip qui rend hommage à toutes les personnes qui choisissent la liberté. Le regard de Karim Dridi sur ceux qu'on appelle les marginaux est empathique.

Nina et Djoul, copines inséparables, sont expulsées de leur squat de Bretagne. A bord de leur vieux camion déglingué, elles taillent la route vers le Sud. Fainéant.es, est un film sur "les sans-dents", ceux qui ne comptent pas ou tellement peu, les "moins que rien", les "punks à chien", les SDF, les damnés de la terre… Tous ceux qui sont jugés comme fainéants.

"Personne ne voulait financer un film sur ces gens-là. Juste le fait de réaliser ce film, c’est déjà de la subversion. C’est un geste artistique de survie, de résistance. C’est un acte de la pensée. C’est vital. Parce que l’inverse de la subversion, c’est la résignation", confie le réalisateur.

Etre ou avoir

Pour réaliser ce film, le cinéaste s’est plongé dans cet univers pendant plusieurs années. De cette immersion est née une œuvre lumineuse et sombre, un road-movie de deux femmes exceptionnelles qui se construisent dans la rencontre et la confrontation. Puissantes, libres, dignes, elles assument leur mode de vie.

La scène d’ouverture donne le ton. La caméra est embarquée dans le camion de police où les deux héroïnes sont enfermées. Sur leur route, Nina et Djoul vont vers l’autre, multiplient les rencontres. Comme celle solaire, bouleversante, d’une vieille dame qui refuse de retourner à l’Ehpad. "S’il vous plaît, pas l’Ehpad, je vous en supplie, je veux mourir vivante".

Le voyage montre une France qui disparaît des radars, celle des personnes qui font les poubelles des supermarchés ou qui vivotent dans des squats. Les uns et les autres. Les deux copines se retrouvent à travailler dans les vignes. Et Nina rencontre un homme.

La sororité vole en éclats. Dispute et séparation. Quelle est la nature des sentiments de Djoul pour Nina ? Amitié ? Amour ? Les deux ? Le cinéaste laisse le spectateur libre de son interprétation. L’essentiel est ailleurs.

Scène du film "Fainéant.es" de Karim Dridi. (New Story)

Les actrices Faddo Jullian et .jU., amies dans la vie, sont bouleversantes. Elles ont une présence impressionnante. La scène épique des retrouvailles entre les deux amies est inoubliable. Le titre, ironique, est à prendre au second degré. Car pour des fainéantes, Nina et Djoul, notamment, travaillent beaucoup. Elles refusent juste de se fixer et préfèrent tracer leur route même si le prix de la liberté s’avère très élevé.

Fainéant.es est plus proche de l’univers de Ken Loach que de Thelma et Louise. Fainéant.es, un film authentique, tendre et violent sur l’amitié, la sororité et la liberté. Eblouissant.

Affiche du film  "Fainéant.es" de Karim Dridi. (New Story)

Fiche

Titre : Fainéant.es

Réalisation : Karim Dridi

Scénario : Karim Dridi, Emma Soisson

Distribution : Faddo Jullian, .jU., Odette Simoneau

Sortie en salle : 29 mai 

Synopsis : Nina et Djoul, copines inséparables, sont expulsées de leur squat. Elles reprennent alors la route à bord de leur vieux camion avec une soif de liberté et une seule obsession : faire la fête. Rencontres impromptues, travail saisonnier, concerts, joyeuses subversions, quelques galères mais surtout beaucoup d'aventures rythment désormais la vie nomade de ces deux amies.

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