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Festival de Cannes 2021 : Bruno Dumont ne va pas se faire que des amis avec "France", son film satirique sur le journalisme

Entre drame et humour, Léa Seydoux interprète une journaliste vedette de la télévision qui prend conscience de la vacuité de son approche de l'information.

Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Léa Seydoux dans "France" de Bruno Dumont (2021). (ROGER ARPAJOU / 3B)

Maintes fois récompensé en compétition depuis 1997 avec La Vie de Jésus (Caméra d’or) et dans la section Un certain regard, Bruno Dumont est né à Cannes, cinématographiquement parlant. Il présentait cette année France, avec Léa Seydoux, Blanche Gardin et Benjamin Biolay, un pamphlet satirique sur le traitement de l’information dans les chaînes en continu. Mais ses cordes un peu grosses on fait huer le film lors de sa projection de presse.

Gros doigts

France est une star de la télé, à la fois animatrice d’une émission d’information et grand reporter de guerre. Elle joue consciemment de son sex-appeal en plateau et se met en scène sur le terrain. Une valorisation qui va lui jouer des tours, entre un vedettariat envahissant mais plaisant, et des critiques sur sa trop grande auto-valorisation dans ses reportages. Son couple bat de l’aile et un drame va la remettre en cause dans l’exercice de sa profession.

La réaction de la presse à la projection de France n’est pas corporatiste, face à un film qui brocarde les journalistes. On sait Bruno Dumont amateur d’un humour radical, voire surréaliste, vérifié dans la série Petit Quinquin et Ma Loute, en compétition en 2017. Mais c’est la qualité de cet humour, taillé à la serpe, "gros doigts" qui attire les fourches caudines contre le film. Le personnage de France, qu’interprète Léa Seydoux, est tellement caricatural que l’actrice perd en crédibilité, et les situations sont tellement exagérées que leur impact en devient limité.

Tout est trop

Cette impression se manifeste tout autant dans les scènes dramatiques, comme lors d’un terrible accident qui a fait esclaffer la salle, tant il est surchargé. L’intrigue autour du jeune banlieusard renversé par la journaliste, qui lui vaut la diatribe des médias pour la "dégommer", et son rattrapage en aidant financièrement sa famille, est grossier et attendu. La journaliste en reportage de guerre, maquillée de son rouge à lèvre agressif, est aussi surlignée. Tout est de cet acabit dans France, tout est trop. Trop pour faire rire, alors qu’une approche un peu plus fine et touchant là où ça fait mal aurait fait mouche.

Léa Seydoux dans "France" de Bruno Dumont (2021). (ROGER ARPAJOU / 3B)

Etonnant que Bruno Dumont, auteur du scénario et des dialogues, et d’habitude fin limier, tombe dans une telle impasse contraire à ses objectifs, par ailleurs des plus justifiés. Le traitement de l’information sous sa forme actuelle dans les grands médias pose évidemment problème et interroge la société française, mais aussi l’international. L’exposé qu’en fait France est réducteur, et colle à la superficialité et au sensationnalisme des médias qu’il accuse.

Léa Seydoux sur l'affiche de "France" de Bruno Dumont (2021). (ARP sélection)

La fiche

Genre : Comédie dramatique
Réalisateur : Bruno Dumont
Acteurs : Léa Seydoux, Blanche Gardin, Benjamin Biolay
Pays : France / Belgique
Durée : 2h14
Sortie : 25 août 2021
Distributeur : ARP Sélection

Synopsis : Le portrait d’une femme, journaliste de télévision, d’un pays, le nôtre, et d’un système, celui des médias.

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