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Gilles Jacob, dernière présidence à Cannes
Pour son dernier Festival de Cannes en tant que président, Gilles Jacob, 83 ans, assure qu'il n'aura "pas trop le temps d'avoir des états d'âme", dans un entretien à l'AFP.
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Cela fait cinquante ans que Gilles Jacob, né un 22 juin 1930 à Paris, fréquente le prestigieux festival de cinéma. Nommé délégué général en 1978, il le préside depuis 2001.
Il sait qu'aux yeux du grand public, il est souvent vu comme ce sacré veinard qui, chaque soir, accueille en smoking les plus grandes stars en haut des marches du Palais des festivals. "C'est génial, tout le monde croit que c'est mon boulot ! En fait il se passe tout le temps quelque chose au point que j'ai du mal à voir les films !"
"Et si on allait dîner ?", lançait Cocteau
"J'ai vu changer le festival comme vous n'imaginez pas. Au début c'était quelques centaines de personnes", raconte Gilles Jacob, venu d'abord comme critique pendant douze ans avant de devenir délégué général puis enfin président il y a 13 ans.
"A l'époque, Jean Cocteau pouvait se lever en disant: 'et si on allait dîner ?' Il partait avec des amis dans l'arrière pays et la projection reprenait après !", se souvient-il. Une liberté tout simplement impensable aujourd'hui, quand des dizaines de milliers de personnes convergent du monde entier sur la Croisette pour voir des films, en acheter, en produire, "se recharger en énergie" cinématographique, selon les termes du président.
Cannes, "grand équilibre entre art et commerce"
Qu'est-ce qui fait le succès de Cannes ? "La Croisette, les palaces, le soleil, la mer", répond Gilles Jacob à l'AFP, mais surtout "de grands équilibres, comme celui entre art et commerce". Cannes accueille le plus marché du film au monde, en plus des cinéastes les plus reconnus et des plus grandes stars. "On a cet avantage énorme de pouvoir discuter d'un marché de plusieurs millions de dollars en buvant un verre sur la plage."
Il y a aussi cet "autre équilibre entre grands auteurs du patrimoine, auteurs déjà confirmés et les découvertes de nouveaux talents que je recherche depuis toujours", poursuit celui qui a créé la Caméra d'or, destinée à récompenser le meilleur premier film, ainsi que la Cinéfondation, pépinière dont l'objectif est de repérer les cinéastes de demain.
"J'ai vu changer le festival comme vous n'imaginez pas. Au début c'était quelques centaines de personnes", raconte Gilles Jacob, venu d'abord comme critique pendant douze ans avant de devenir délégué général puis enfin président il y a 13 ans.
"A l'époque, Jean Cocteau pouvait se lever en disant: 'et si on allait dîner ?' Il partait avec des amis dans l'arrière pays et la projection reprenait après !", se souvient-il. Une liberté tout simplement impensable aujourd'hui, quand des dizaines de milliers de personnes convergent du monde entier sur la Croisette pour voir des films, en acheter, en produire, "se recharger en énergie" cinématographique, selon les termes du président.
Cannes, "grand équilibre entre art et commerce"
Qu'est-ce qui fait le succès de Cannes ? "La Croisette, les palaces, le soleil, la mer", répond Gilles Jacob à l'AFP, mais surtout "de grands équilibres, comme celui entre art et commerce". Cannes accueille le plus marché du film au monde, en plus des cinéastes les plus reconnus et des plus grandes stars. "On a cet avantage énorme de pouvoir discuter d'un marché de plusieurs millions de dollars en buvant un verre sur la plage."
Il y a aussi cet "autre équilibre entre grands auteurs du patrimoine, auteurs déjà confirmés et les découvertes de nouveaux talents que je recherche depuis toujours", poursuit celui qui a créé la Caméra d'or, destinée à récompenser le meilleur premier film, ainsi que la Cinéfondation, pépinière dont l'objectif est de repérer les cinéastes de demain.
Indépendance
Depuis des décennies, Cannes a gagné son indépendance diplomatique: depuis 1972, les films ne sont plus choisis par les pays mais par les organisateurs. Sous sa présidence, Gilles Jacob estime par ailleurs avoir gagné "son indépendance financière" avec l'arrivée des télévisions qui rétribuent le Festival pour pouvoir retransmettre les cérémonies d'ouverture et de clôture, et surtout avec la création du club des partenaires - L'Oréal, Air France, Société générale etc - qui "nous donnent de l'air et de l'aise" pour toutes les actions du festival. Cannes, c'est 20 millions d'euros de budget dont la moitié aujourd'hui encore de financements publics, contre 98% à son arrivée.
Engagement
Être président, comme délégué général, c'est aussi prendre position. Une responsabilité, selon lui. Il faut "défendre les cinéastes privés de liberté et de travail". Bien avant la chute du Mur de Berlin, le Festival avait présenté en 1978 "L'Homme de marbre" d'Andrzej Wajda, annoncé au dernier moment pour éviter tout blocage des autorités polonaises.
En 2010, le fauteuil de Jafar Panahi, membre du jury, est resté vide symboliquement, car le cinéaste iranien était emprisonné dans son pays, se souvient Gilles Jacob. En 2012, au contraire, c'est le réalisateur danois Lars Von Trier qui a été déclaré "persona non grata" pendant Cannes après des propos "intolérables" sur Hitler. "Un très mauvais souvenir" pour Gilles Jacob qui l'a révélé.
Conseils pour son successeur
A l'heure de passer le témoin, quels conseils donnerait-il à son successeur Pierre Lescure ? "Définir le cap du Festival pour le maintenir au niveau où il est ou encore l'améliorer", "modifier" mais aussi "bien se répartir les tâches" avec le délégué général qui sélectionne les films et gère le festival au quotidien etc... Deux personnalités qui "doivent s'entendre harmonieusement".
Souvenirs, souvenirs
Son pire souvenir ? "1983, sans hésiter avec l'arrivée dans le nouveau palais. Rien ne marchait ! Les lampes des projecteurs claquaient mystérieusement. Monter sur scène pour se faire siffler, je n'y suis pas habitué !"
Le meilleur ? Avoir accueilli des cinéastes comme John Huston, Luis Bunuel, Manuel de Oliveira, Federico Fellini ou Akira Kurosawa, "des légendes mondiales".
Après le 67e festival de Cannes, Gilles Jacob continuera de s'occuper de la Cinéfondation. Auteur déjà de plusieurs ouvrages sur le cinéma, il va se consacrer à l'écriture d'un roman. "L'écrit après l'image".
Depuis des décennies, Cannes a gagné son indépendance diplomatique: depuis 1972, les films ne sont plus choisis par les pays mais par les organisateurs. Sous sa présidence, Gilles Jacob estime par ailleurs avoir gagné "son indépendance financière" avec l'arrivée des télévisions qui rétribuent le Festival pour pouvoir retransmettre les cérémonies d'ouverture et de clôture, et surtout avec la création du club des partenaires - L'Oréal, Air France, Société générale etc - qui "nous donnent de l'air et de l'aise" pour toutes les actions du festival. Cannes, c'est 20 millions d'euros de budget dont la moitié aujourd'hui encore de financements publics, contre 98% à son arrivée.
Engagement
Être président, comme délégué général, c'est aussi prendre position. Une responsabilité, selon lui. Il faut "défendre les cinéastes privés de liberté et de travail". Bien avant la chute du Mur de Berlin, le Festival avait présenté en 1978 "L'Homme de marbre" d'Andrzej Wajda, annoncé au dernier moment pour éviter tout blocage des autorités polonaises.
En 2010, le fauteuil de Jafar Panahi, membre du jury, est resté vide symboliquement, car le cinéaste iranien était emprisonné dans son pays, se souvient Gilles Jacob. En 2012, au contraire, c'est le réalisateur danois Lars Von Trier qui a été déclaré "persona non grata" pendant Cannes après des propos "intolérables" sur Hitler. "Un très mauvais souvenir" pour Gilles Jacob qui l'a révélé.
Conseils pour son successeur
A l'heure de passer le témoin, quels conseils donnerait-il à son successeur Pierre Lescure ? "Définir le cap du Festival pour le maintenir au niveau où il est ou encore l'améliorer", "modifier" mais aussi "bien se répartir les tâches" avec le délégué général qui sélectionne les films et gère le festival au quotidien etc... Deux personnalités qui "doivent s'entendre harmonieusement".
Souvenirs, souvenirs
Son pire souvenir ? "1983, sans hésiter avec l'arrivée dans le nouveau palais. Rien ne marchait ! Les lampes des projecteurs claquaient mystérieusement. Monter sur scène pour se faire siffler, je n'y suis pas habitué !"
Le meilleur ? Avoir accueilli des cinéastes comme John Huston, Luis Bunuel, Manuel de Oliveira, Federico Fellini ou Akira Kurosawa, "des légendes mondiales".
Après le 67e festival de Cannes, Gilles Jacob continuera de s'occuper de la Cinéfondation. Auteur déjà de plusieurs ouvrages sur le cinéma, il va se consacrer à l'écriture d'un roman. "L'écrit après l'image".
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