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: Interview Lambert Wilson au Festival de Beaune : "Oui au polar et au cinéma de genre !"
Président du jury du 10e festival international du film policier de Beaune, Lambert Wilson nous a évoqué les relations qu’il entretenait avec le polar et plus largement, le cinéma de genre. Alors qu’il n’y est pas spontanément identifié, malgré une carrière très éclectique, il s'en révèle très friand. Aussi, déplore-t-il la négligence à son égard dans le cinéma français de genre.
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C’est dans la cour feutré de l’Hôtel du Cep à Beaune que Lambert Wilson a répondu à nos questions, habillé d’un caban bleu sombre, l’œil vif, dans une température assez fraîche pour la saison, mais avec une grande chaleur humaine.
Dramaturgie policière
Culturebox : Comédien, vous êtes président du Festival du film policier de Beaune, alors que tous vos prédécesseurs, même acteurs ou actrices, avaient réalisé des films. Quel est votre rapport avec le genre policier ?Lambert Wilson : J’ai été très étonné par cette sollicitation, car je ne me percevais pas comme un acteur ayant des affinités particulières avec le genre policier au cinéma. Je n’avais pas l’impression d’avoir tourné dans des polars. Et puis, en y réfléchissant, je me suis dit que ce genre très identifiable par ses protagonistes, flic et voyous, était plus large que ces simples poncifs. Et qu’effectivement j’avais joué dans des films qui pouvaient relever du polar sans m’en apercevoir, parce que des thèmes satellites prenaient le dessus. Mais la base des scénarios, les personnages que j’incarnais, pouvaient être un commissaire, un enquêteur, même si les films ne suivaient pas les schémas du polar classique. Même s’il n’y avait pas de lien direct avec le genre comme le veut, par exemple, le classique "whodunit", selon l’appellation anglaise pour désigner l’énigme menant à savoir qui a commis un crime. Mais ces personnages que j’ai pu interpréter ont relevé parfois de la police, ce qui me rattache au genre, sans que je m’en sois aperçu, ou que j'en aie pris conscience sur le moment.
Culturebox : Comment percevez-vous cette universalité du genre policier, même si aujourd’hui, elle semble plus passer par la télévision que par le cinéma ?
Lambert Wilson : Ce que vous me dites me fait penser à ce que je ressentais quand je jouais "Rui-Blas" aux côtés de mon père (Robert Wilson, ndlr). Certains soirs sur scène, nous étions fatigués ou malades, mal en point. Nous sentions que nous n’étions pas au niveau de nos rôles. Et pourtant, à chaque fois, le public était enthousiaste. Pourquoi ? Parce que la dramaturgie de la pièce, "Rui-Blas", prenait le dessus de l’interprétation. C’est merveilleux que le texte domine ainsi. Pour le polar, c’est pareil. Il y a une telle force dramaturgique dans le genre que c’est elle qui prend le dessus et fascine plus que tout. Quant au passage du polar du cinéma à la télévision, c’est normal, logique. Comment voulez-vous demander à des spectateurs de payer pour aller voir des énigmes policières, alors qu’on en sert à la chaîne, c’est le cas de le dire, gratuitement, à la télévision ? C’est imparable, on ne peut pas lutter contre cela.
Amateur de films de genre
Culturebox : Au-delà du polar au cinéma, vous êtes apparu lors de séquences mémorables dans "Matrix", dans le rôle du Mérovingien, avec cette réplique culte où s’enchaîne un florilège d’injures françaises, par exemple. Quelle est votre position par rapport à ces autres genres que sont le fantastique et la science-fiction ?Lambert Wilson : J’adore ! J’ai vraiment aimé interpréter le rôle du Mérovingien. D’ailleurs la réplique à laquelle vous faites référence est de mon invention. J’aimerais beaucoup que l’on fasse plus appel à moi dans ce registre, il me passionne. Mais l’on me classifie dans un style plus classique. Les préjugés ont la vie dure.
Culturebox : Pourtant votre carrière reflète des rôles très éclectiques. Vous passez facilement de films d’auteurs, à la comédie, puis à "Matrix"… Par ailleurs, vous êtes chanteur lyrique, ce qui confirme votre esprit ouvert.
Lambert Wilson : Vous savez, être acteur, c’est le masque. Le plaisir de l’acteur, c’est de changer de masque. De ne plus être lui-même, de rôle en rôle, de changer de rôle. J’incarne une texture assez lisse pour le public et les réalisateurs. Mais je n’aspire qu’à montrer mes différences. C’est pour cela que j’ai aimé jouer le Mérovingien dans "Matrix". Il est d’ailleurs question que j’y revienne dans ce qui serait un "prequel" à "Matrix" et qui est dans les cartons de la production depuis un moment. Mais rien n’est encore conclu. J’aimerai beaucoup reprendre ce rôle. Je reste très ouvert à ce genre de propositions, que je trouve très prometteuses, et dans lesquelles le cinéma français ne s’engage pas assez, selon moi. Je suis très sensible au fantastique et à la science-fiction, et au cinéma de genre en général. Cette reconnaissance par le festival du film policier de Beaune me touche et va dans ce sens.
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