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"J'espère le voir grandir jusqu'à ma mort !" : malgré la Covid, Dominique Besnehard annonce un programme éclatant pour son festival du film d'Angoulême

C'est un des premiers festivals de cinéma post-confinement et il s'annonce opulent : pléiade d'artistes, Semaine de la Critique, avant-premières et compétition. L'intense 13e édition du festival du film d'Angoulême se tiendra du 28 août au 2 septembre. Entretien avec son délégué général et co-créateur, Dominique Besnehard.

Article rédigé par franceinfo Culture - Jonathan Trullard
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 12min
Dominique Besnehard a annoncé vendredi 10 juillet la programmation du 13è festival du film francophone d'Angoulême.  (LOIC VENANCE / AFP)

La conférence de presse est artisanale ce vendredi 10 juillet au théâtre d'Angoulême : filmage approximatif et feuilles en désordre, Marie-France Brière et Dominique Besnehard assument une organisation de dernière minute : "on a pris beaucoup de retard, ayant été obligés de faire les choses sans grande préparation...", préviennent les deux délégués généraux du festival du film francophone, dont la 13e édition (qu'ils appellent "édition vingt sur vingt" avec superstition et humour) aura lieu du 28 août au 2 septembre prochain.

Le décor est sobre, le tapis est bleu, mais au vu des annonces l'improvisation est vite excusée : la programmation comme les invités font rêver. Une cinquantaine de long-métrages, pour la plupart en première mondiale, et des invités à rendre jaloux Thierry Frémaux (délégué général du festival de Cannes) : Isabelle Huppert, Isabelle Adjani, Catherine Frot, Gérard Depardieu sont quelques uns des dizaines de convives annoncés.On peut difficilement faire plus VIP... Angoulême, le balcon du Sud-Ouest, ou the place to be.

Toujours plus dans l'ombre que la lumière, celui qui fut successivement directeur de casting, agent, producteur, présentateur télé et patron de festival règne donc toujours habilement sur le cinéma français. Et s'il a lancé des stars, Dominique Besnehard n'est pas qu'un promoteur, il est acteur également, et très bon d'ailleurs, se forgeant discrètement depuis quarante ans une filmographie riche en rôles souvent seconds mais mémorables. Au vu de la bringue cinéphile qui s'annonce, on a eu envie de faire le point sur sa vie de cinéma, et on l'aborde comme on aborderait un emblème, celui d'un quasi demi-siècle d'images et de génériques, de sons et de musiques. 

franceinfo Culture : ce festival ne cesse de grandir, il à l'âge d'un adolescent aujourd'hui... Jusqu'où aimeriez-vous le voir évoluer ?

Dominique Besnehard : J'espère le voir grandir jusqu'à ma mort ! Et même après... J'aime partager et transmettre, on a su entraîner des jeunes avec ce festival, quelque part je suis très proche de la monarchie en m'entourant d'un dauphin, d'une dauphine... Quand Marie-France Brière et moi nous arrêterons, quelqu'un le reprendra !  

Avec ce festival, vous poursuivez votre carrière de promoteur du cinéma, hier des acteurs, aujourd'hui des films... Mais avez-vous parfois le regret de ne pas avoir été plus dans la création ? 

On est quand même créateur lorsque l'on est agent, des créateurs de l'ombre... De même, lorsque l'on est producteur, sur Dix pour cent par exemple, j'ai ce même sentiment, l'histoire vient de moi, c'est mon idée originale. Et puis en tant qu'acteur, j'aurais pu tourner plus mais je n'aime pas le faire longtemps car j'ai trop de choses dans la tête. Mais bien sûr, si demain Giannoli ou Ozon me propose un rôle, je ne dirai pas non ! (rires). Et puis en termes de créations, j'aime faire des documentaires sur les actrices de mon adolescence, j'en prépare un sur Marlène Jobert par exemple en ce moment. J'écris aussi un live sur l'agence Artmédia où j'ai travaillé plus de vingt ans. 

Mais n'avez-vous pas eu l'impression de faire ce métier au détriment de votre vie? 

Non car j'ai toujours considéré mes fonctions comme un sacerdoce. Finalement je n'ai toujours rêvé que de cinéma, ça n'a jamais été une angoisse. Et puis j'ai eu des amours, j'ai été amoureux, et je le suis toujours d'ailleurs... Mais je veux que ma vie soit libre, et pouvoir partir si on m'appelle demain. 

Donc vous avez eu la vie que vous vouliez ?

Complètement ! J'ai aucun regret. Mais aujourd'hui je suis perturbé par le monde actuel, par les politiques décevants, les journalistes sans culture...

La cinéphilie me permet de mieux me comprendre, voire de mieux m'aimer...

Dominique Besnehard

Délégué général du festival du film d'Angoulême

Par le cinéma actuel aussi ? 

Je me demande surtout si les bons films d'hier pourraient se faire de nos jours, pourrait-on faire Un mauvais fils (Claude Sautet, 1980) par exemple ? Et puis maintenant le public est infidèle, il a tellement de sollicitations... Autrefois, on attendait le nouveau Sautet, le nouveau film avec Romy Schneider ou avec Marlène Jobert. Il y avait un rapport différent avec le public. Je suis content d'avoir connu cette autre époque où on économisait pour aller voir un film. Aujourd'hui, s'il y a toujours des bons films, on n'a souvent pas le temps de les voir car ils ne restent pas longtemps à l'affiche. Et puis on ne permet pas aux gens qui ont de l'audace de la garder, car on formate beaucoup et on fait parfois du cinéma pour la case "dimanche soir" de TF1...

En vous écoutant on se dit que la cinéphilie n'est pas, comme disent certains, la maladie de ceux qui n'aiment pas leur vie...

Non, pas du tout ! Je pense même que la cinéphilie, si elle peut combler des manques, nous fait aussi avancer dans la connaissance que l'on a de soi-même. En ce qui me concerne, elle me permet de mieux me comprendre, voire de mieux m'aimer. Et puis, quand on est bouleversé par un film, ça veut dire une chose : on n'est pas "sec", on vit !

Tout ce qu'il faut savoir sur le festival du film francophone d'Angoulême 2020 

Carte blanche à la Semaine de la critique de Cannes

Pour les cinéphiles, Angoulême est devenu un rendez-vous incontournable de fin d'été. L'événement, qui a attiré 47 000 spectateurs payants l'an dernier, donne chaque fois le ton de la rentrée cinéma. Mais cette année, c'est aussi un des premiers festival français à se tenir malgré le Coronavirus, après le festival du film romantique de Cabourg et le FID de Marseille (qui se tiendra lui du 22 au 26 juillet prochain). Et la carte blanche donnée à la Semaine de la critique est une des singularité de cette année particulière : la section parallèle du festival de Cannes, qui a dû annuler sa 59è édition en mai dernier, a accepté l'invitation de venir présenter ses long-métrages francophones, quatre au total, dont le film d'horreur animalière La nuée, de Just Philippot. 

Cette association entre la Semaine de la critique et un festival de cinéma autre que celui de Cannes est une première, et marque le début de l'accompagnement hors les murs que le délégué général Charles Tesson a promis pour sa sélection 2020. "Plusieurs de nos films sont passés par Angoulême par le passé, et y ont été très bien accueillis", explique-t-il, "c'était donc une idée pertinente, d'autant plus que nous avons cette année une majorité de films francophones car les distributeurs français, à la différence des étrangers, ne pouvaient pas attendre Cannes 2021", ajoute cet ancien critique aux Cahiers du cinéma

Kervern et Délépine présidents du jury

Le duo de réalisateurs Benoît Délépine et Gustave Kervern présideront le jury, succédant ainsi à Jacqueline Bisset. Ils seront entourés, entre autres, de l'actrice Elsa Zylberstein et du réalisateur Claude Barras. Les auteurs de Saint-Amour et Mammuth, qui connaissent bien la région pour y avoir tourné plusieurs de leurs films, présenteront par ailleurs leur nouveau long-métrage, Effacer l'historique, lors de la soirée d'ouverture du festival. Ils auront en charge de remettre le Valois de diamant à l'un des dix films en compétition (dont trois n'ont pas encore été choisis), au terme d'une présidence "démocratique", "c'est une perte de temps mais la dictature est actuellement trop à l'ordre du jour...", ont ironisé les deux compères.

Benoît Délépine et Gustave Kervern présideront le jury de cette édition "vingt sur vingt" du festival du film francophone d'Angoulême. (Christophe Brachet)

Plusieurs films labellisés Cannes 2020 seront en compétition, comme L'ennemi du belge Stephan Streker, avec Jérémie Renier et Emmanuelle Bercot, ou Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal, avec la jamais décevante Laure Calamy. L'acteur Nicolas Maury présentera quant à lui Garçon chiffon, son premier long-métrage en tant que réaliasteur. On retrouvera d'ailleurs Calamy et Maury dans les deux premiers épisodes de la nouvelle saison de Dix pour cent, qui seront projetés en avant-première durant le festival. L'excellente série télévisée sur les coulisses d'une agence d'acteurs, qui connaît un beau succès sur France 2 depuis 2015, est à la base une idée lancée par... Dominique Besnehard.

Une programmation riche d'une cinquantaine de films

En compétition (trois films restent non dévoilés à ce jour)

Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal 
Éléonore de Amro Hamzawi 
- L'ennemi de Stephan Streker
- L'étreinte de Ludovic Bergery
- Garçon chiffon de Nicolas Maury
- Petit pays de Éric Barbier
- Un triomphe de Emmanuel Courcol

Avant-premières

Effacer l'historique de Gustave Kervern et Benoît Délépine
Poly de Nicolas Vanier
- Parents d'élèves de Noémie Saglio
30 jours max de Tarek Boudali
Miss de ruben Alves
- Police de Anne Fontaine
Villa Caprice de Bernard Stora
Les apparences de Marc Fitoussi
- 5ème set de Quentin Reynaud
La fine fleur de Pierre Pinaud
Des hommes de Lucas Belvaux
- La pièce rapportée de Antonin Peretjatko
Soeurs de Yamina Benguigui
La daronne de Jean-Paul Salomé

Isabelle Huppert, dans "La daronne" de Jean-Paul Salomé, qui clôturera le festival du film Angoulême. Huppert remettra le prix du public lors de la cérémonie. (Lydie Nesvadba)

Carte blanche à la Semaine de la critique

De l'or pour les chiens de Anna Cazenave-Cambet
Sous le ciel d'Alice de Chloé Mazlo
- La nuée de Just Philippot
La terre des hommes de Naël Marandin

Les documentaires

C'est toi que j'attendais de Stéphanie Pillonca
Pingouin & Goéland et leurs 500 petits de Michel Leclerc

Les premiers rendez-vous

Les cobayes de Emmanuel Poulain-Arnaud
Seize printemps de Suzanne Lindon
Si le vent tombe de Nora Martirosyan

Les flamboyants

Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait de Emmanuel Mouret
L'enfant rêvé de Raphaël Jacoulot
Médecin de nuit de Élie Wajeman

Niels Schneider et Camélia Jordana, dans le nouveau film du très rohmérien Emmanuel Mouret, "Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait" (Pyramide Distribution)

Bijoux de famille (hommage au distributeur Ad Vitam)

Presque rien de Sébastien Lifschitz
Lady Chatterley de Pascale Ferran
Tous au Larzac de Christian Rouaud
Les adieux à la reine de Benoît Jacquot
L'adieu à la nuit de André Téchiné

Grandes indiscrétions

- Série Dix pour cent, saison 4, épisodes 1 et 2
Anna de Pierre Koralnik
Ainsi que trois événements : Une masterclass du duo Benoît Délépine & Gustave Kervern et une autre du ditributeur Ad Vitam, ainsi qu'une rencontre musicale de Benjamin Biolay, animée par Julie Gayet.

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