La 77e Mostra s'ouvre à Venise avec des mesures sanitaires musclées, en pleine pandémie de Covid-19
Premier grand festival de cinéma à s'ouvrir depuis l'apparition du coronavirus, la Mostra démarre mercredi à Venise.
À compter de ce mercredi 2 septembre et pendant dix jours, la course au Lion d'Or repart à grand renfort de masques et autres caméras thermiques, alors que la pandémie affiche désormais plus de 4 millions de personnes contaminées en Europe.
"Après tant de mois de confinement et de fermeture, nous devons trouver le courage de rouvrir les salles de cinéma, recommencer à produire des films, produire de bons produits pour convaincre le public qu'il est temps de sortir de chez soi pour fréquenter de nouveau les salles de cinéma", affirme à l'AFP le directeur de la Mostra, Alberto Barbera.
"Il est temps de redémarrer"
"Toutes les mesures de prudence" ont été prises sur le Lido, justifie-t-il, estimant qu'"il est temps de redémarrer". La tenue de la 77e édition du plus ancien des festivals n'avait rien d'évident en Italie, l'un des pays d'Europe qui a payé le plus lourd tribut à la pandémie. Les studios ont la tête ailleurs, dans un secteur mis à genoux par les conséquences de la crise sanitaire. Le grand rival historique, le festival de Cannes, n'a pas pu se tenir au printemps.
Mais la Mostra 2020 se fera au prix d'une voilure réduite et de mesures sanitaires drastiques. Pas de quoi séduire Walter, un chauffeur local de bateau-taxi. "Il n'y a pratiquement pas de films, juste quelques productions italiennes. C'est un festival politique, qui devait avoir lieu quoi qu'il arrive, même sans contenu, pour montrer que Venise vit encore", déplore-t-il à l'AFP. "Nous ne pouvions pas ne pas faire le festival !", insiste de son côté Alberto Barbera.
Mur surélevé et caméras thermiques
De nombreuses mesures sanitaires ont été mises en place. Le tapis rouge a été bordé d'un haut mur gris, bouchant la vue des passants pour éviter les attroupements. Tous les accès sont surveillés par caméra thermique. Ceux qui ont de la température n'entreront pas.
Mais sur le Lido, fin prêt pour recevoir les festivaliers, l'essentiel est là : derrière les murs de l'imposant Palais du Cinéma, les salles obscures attendent le premier grand festival international de cinéma d'un monde bouleversé par la pandémie. Pour le directeur de la Mostra, il y avait urgence : "Nous en avons assez de voir les films en streaming ! L'expérience du film en salle nous manque", a-t-il confié à l'AFP mardi après-midi.
Mercredi en début de soirée, il doit accueillir les directeurs des plus grands festivals d'Europe, dont Cannes et Berlin, d'ordinaire en concurrence pour attirer les meilleurs films. Les rivaux historiques ont prévu d'assister à la soirée d'ouverture sur le Lido pour marquer leur "solidarité envers l'industrie cinématographique mondiale". Cette dernière, en plein marasme après des mois de fermeture de salles ou d'arrêt de tournages autour de la planète, peut espérer retrouver un peu d'espoir dans la tenue de la Mostra, moins de six mois après l'annulation du festival de Cannes.
Huit films sur dix réalisés par des femmes
Puis, viendra enfin l'heure des cinéphiles : un film italien hors compétition, Lacci de Daniele Luchetti, l'histoire d'une famille napolitaine sur 30 ans ponctuée d'amours, de trahisons et rancœurs, a l'honneur d'inaugurer les projections, dans des salles où un siège sur deux est condamné et où le port du masque est de rigueur.
Le jury se mettra au travail le lendemain. Présidé pour la deuxième année consécutive par une femme, l'Australienne Cate Blanchett, il distinguera le récipiendaire du prestigieux Lion d'or du meilleur film, parmi des productions venues aussi bien d'Italie, d'Inde que de Pologne, dont 8 sur 18 sont réalisés par des femmes.
Alberto Barbera a mis l'accent sur "la composante féminine, jusqu'ici cantonnée à des pourcentages embarrassants", espérant certainement mettre fin aux polémiques qui ont émaillé les précédentes éditions. Le sujet reste brûlant pour le monde du cinéma, trois ans après la vague #MeToo.
Matt Dilon et Ludivine Sagnier dans un jury dirigé par Cate Blanchett
Aux côtés de Cate Blanchett siègent notamment l'acteur américain Matt Dillon, le réalisateur allemand Christian Petzold, ou encore la comédienne française Ludivine Sagnier, pour désigner le successeur de Joker de Todd Phillips, couronné l'an dernier avant de remporter cinq mois plus tard deux Oscars.
Des cinéastes confirmés sont de la compétition, comme l'Israélien Amos Gitaï avec Laila in Haifa ou le Japonais Kiyoshi Kurozawa (Les amants sacrifiés). La France est représentée par un seul film, le drame Amants de Nicole Garcia.
Quelle que soit l'issue de la compétition, cette édition de la Mostra, maintenue contre vents et marées, ne sera pas comme les autres. La voilure a été réduite et les films américains se sont faits très rares, contrairement à l'habitude prise ces dernières années de présenter à Venise de grosses productions en espérant les mettre en orbite pour la course aux Oscars...
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