La Pologne rend hommage à Andrzej Wajda
"Nous sommes tous de chez Wajda. Nous regardions la Pologne, et nous-mêmes, à travers lui. Et la comprenions mieux ainsi. Désormais, ce sera plus difficile", a regretté sur son compte Twitter Donald Tusk, le président du Conseil européen et ancien Premier ministre polonais.
Depuis son deuxième long-métrage "Kanal" (Ils aimaient la vie), primé à Cannes en 1957, jusqu'à "Powidoki" (Après-images, 2016), candidat polonais au prochain Oscar du film étranger, Wajda a raconté aux Polonais - et au monde entier - leur histoire, ses pages sombres comme ses moments lumineux, le plus souvent inextricablement emmêlés.
"Un grand personnage, un grand Polonais, un grand patriote et un grand réalisateur est passé dans l'éternité", a déploré Lech Walesa, le leader historique du syndicat Solidarité et Prix Nobel de la paix. "Chaque fois que nous nous voyions il disait des choses de grande sagesse", a souligné à l'AFP l'ancien président qui est apparu en personne dans le film "L'Homme de fer" inspiré par la naissance de Solidarité et couronné par la Palme d'or à Cannes en 1981.
Walesa : "Nous allons nous revoir bientôt"
Wajda a consacré plus tard à Walesa un long métrage entier, "L'Homme du peuple" (2013). "Nous allons nous revoir bientôt, j'ai déjà fait mes bagages", a ajouté Lech Walesa devant plusieurs journalistes, sans expliquer ses propos.L'Ecole de cinéma de Lodz (centre), qui compte parmi ses diplômés tous les grands noms du 7e art en Pologne, dont Wajda, a mis lundi des drapeaux noirs sur son entrée.
"Ce fut un homme de courage, d'une grande autorité, un maître pour les jeunes", a souligné le comédien Daniel Olbrychski qui a joué dans 13 films de Wajda. "Il nous parlait de nos petitesses et de nos grandeurs, droit dans les yeux, sans emprunter des détours du mensonge", a-t-il souligné.
Sa santé avait faible ces derniers mois
Krzysztof Piesiewicz, scénariste de Krzysztof Kieslowski, a rappelé que l'oeuvre de Wajda avait eu aussi une facette politique : Wajda, "un des fondateurs de la liberté polonaise, notamment à travers sa magnifique peinture de notre identité".Résumant le sentiment général, un critique de cinéma, Tomasz Raczek, a écrit sur son compte Twitter : "Le deuil dans le cinéma polonais sera long."
Ces derniers mois ses amis avaient constaté que sa santé faiblissait. Mais ils se refusaient à croire qu'il puisse les quitter.
"On savait qu'il était malade, qu'il avait 90 ans. Il est entré il y a quelques jours à l'hôpital, mais on espérait qu'il en sortirait", a raconté le réalisateur et président de l'association des cinéastes polonais Jacek Bromski sur la chaîne privée TVN24.
Il était resté très actif
"Il n'y a pas si longtemps, je l'ai rencontré à l'occasion de la cérémonie de son 90e anniversaire. Il était en excellente forme, notamment intellectuelle", a raconté l'acteur Marian Opania. "Je n'ai pas du tout pensé que cela puisse arriver, il me paraissait éternel."Car, malgré son grand âge, le cinéaste était resté très actif ces dernières années, secondé par sa femme Krystyna Zachwatowicz, actrice, metteur en scène et scénographe. Il était encore apparu en public il y a quinze jours, au Festival du film polonais à Gdynia (nord).
En France, Gilles Jacob salue le "maître incontesté du cinéma polonais"
Saluant un "immense réalisateur" et une "conscience européenne", la ministre française de la Culture Audrey Azoulay a estimé que "la France perd un grand ami, dont l'oeuvre avait été soutenue très tôt par le Festival de Cannes"."Maître incontesté du cinéma polonais, Andrezj Wajda était l'ami de toujours", a déclaré pour sa part à l'AFP Gilles Jacob, ancien président du festival de Cannes. "C'était un cinéaste baroque au lyrisme puissant. Il était aussi la conscience de tout un peuple. Il a accompagné ainsi les soubresauts de l'histoire de son pays", a-t-il souligné.
Pour Roman Polanski, il était un "symbole de courage et de liberté"
Avec la mort de Wajda, "symbole de courage et de liberté", pour Roman Polanski, "c'est toute une période" de sa vie qui s'en va. Il était de toute son âme un artiste polonais, enraciné dans la problématique polonaise", a dit le cinéaste franco-polonais.Roman Polanski a rappelé que Wajda lui avait offert un rôle à ses débuts, "alors que personne ne voulait" de lui. "'Génération', en 1955, a été le premier film polonais qui nous a enchantés, nous les Polonais, et tous les amoureux du cinéma."
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