"La Promesse verte " d'Édouard Bergeon : un thriller écologique haletant qui dénonce le désastre de l’huile de palme

Après "Au nom de la terre", le cinéaste pose un nouveau regard sur le monde agricole à travers la production d'huile de palme en Thaïlande.
Article rédigé par franceinfo Culture - Alexandra Gardes
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 6min
Alexandra Lamy dans "La Promesse verte" d'Édouard Bergeon. (NORD-OUEST FILMS  / FRANCE 2 CINÉMA / ARTÉMIS PRODUCTIONS / PLEIN CHAMP / CAMISARDS)

Le réalisateur Édouard Bergeon, fils d’agriculteur et ancien journaliste à France Télévisions, continue à poser son regard sensible et acéré sur le monde des agriculteurs. Son premier film, Au nom de la terre, avec Guillaume Canet, racontait l’histoire poignante de son père, un agriculteur endetté acculé au suicide.

Avec La Promesse verte en salle le 27 mars, il s’attaque aujourd’hui aux exploitants d’huile de palme responsables de la déforestation et poursuit un cinéma engagé qui veut sensibiliser avant qu’il ne soit trop tard.

Désastre humain et aberration écologique

Alors qu'il séjourne en Indonésie pour finir sa thèse sur la tribu des Dayak, un jeune étudiant en anthropologie, Martin (incarné par Félix Moati), est témoin d’un meurtre. Il découvre de plus que les derniers autochtones sont forcés à l’exil sous la menace, contraints d’abandonner leurs terres pour que le gouvernement puisse y planter des palmiers.

Devenu un témoin gênant, le jeune étudiant est condamné à mort en Indonésie. Sa mère (Alexandra Lamy) se lance alors dans un combat contre les industriels, les lobbies et le monde politique pour lui sauver la vie.

Rencontré à Paris, le réalisateur Édouard Bergeon se confiait sur ce désastre humain et cette aberration écologique en Indonésie, premier pays producteur d'huile de palme. "Quand j’étais grand reporter, j’ai vu les ravages de la déforestation par la production de l'huile de palme", explique-t-il. "On en produit dans des pays tropicaux donc là où il y a des forêts primaires avec une biodiversité extraordinaire. C’est un puits de biodiversité qui disparaît. D’abord la forêt est détruite pour vendre le bois précieux, puis on plante des océans de palmiers, mais les palmiers ne sont pas des arbres, ce sont des plantes au même titre que le soja et le maïs."

Une promesse "pas si verte"

Au-delà de la déforestation, les modes de production aussi sont alarmants. "Il y a beaucoup de chimie, des engrais pour désherber et beaucoup d’énergie carbonée pour récolter, raffiner, transporter, donc le coût de cette énergie verte est déplorable et négative, donc tout ça est une vaste plaisanterie", explique Édouard Bergeon. Présente dans le Nutella, l’huile de palme est en train de gangréner tous les pays du monde, car elle est omniprésente et sa production créatrice d’emplois en Asie comme en Europe.

Selon Édouard Bergeon, "l'huile de palme, c’est une huile incroyable pour les industriels. Elle est productive, pas chère et elle permet de conserver. Il y en a dans les cosmétiques, les lessives, dans beaucoup d’énergies, les prétendus biocarburants. Faire voler des avions avec du carburant vert ? Faire de l’électricité verte ? Mais est-ce que c’est si vert que ça ? La promesse verte n’est peut-être pas si verte et les promesses n’engagent que ceux qui les tiennent".

Au plus proche du réel

Le réalisateur Édouard Bergeon a souhaité tourner La Promesse verte au plus près de la nature concernée. Il a choisi la Thaïlande pour poser ses caméras, car c’est aussi un pays producteur d’huile de palme : "Je voulais absolument tourner dans des vrais décors : palmeraies, tribunal, prison et les Thaïlandais nous ont accueillis les bras ouverts. Ils ont l’habitude de recevoir des équipes de cinéma, donc on a fait ce qu’on voulait. Pour moi, Bali, c’est fini, j’irai plus en vacances là-bas, mais on est très bien en France aussi". Pour davantage de crédibilité, la comédienne Alexandra Lamy a tourné le film sans maquillage et ce n’est pas forcément facile par 55 degrés !

Soucieux d’un cinéma au plus proche du réel, le réalisateur a aussi tenu à incarner la militance écologique sous les traits d’une femme. Nila, jouée par la comédienne Julie Chen, est la jeune lanceuse d’alerte, intrépide et courageuse. Le personnage par qui tout arrive, un rôle clé pour le réalisateur. "Ce sont souvent des jeunes femmes qui défendent leur peuple et leur territoire. Les lanceurs d’alerte sont souvent des lanceuses d’alerte aujourd’hui. Les femmes sont plus sensibles à la cause de l’agriculture, à la défense de l’environnement. Mais c’est très dangereux. Il y a un chiffre très très fort : tous les deux jours, dans le monde, il y a un militant ou un défenseur de l’écologie qui disparaît."

"Des enfants et des arbres"

Avec beaucoup de tension, mais aussi de sensibilité, La Promesse verte met en lumière les enjeux écologiques, politiques et économiques liés à la déforestation. Pour sensibiliser le public à l’importance de toutes les variétés de forêts et d’arbres pour notre écosystème, une partie des bénéfices sera reversée à l’association Des enfants et des arbres, parrainée par Édouard Bergeon, qui invite des enfants à replanter des arbres chez des agriculteurs.

Affiche du film d'Édouard Bergeon, "La Promesse verte", en salle le 27 mars. (DR)

La fiche

Genre : Drame
Réalisateur : Édouard Bergeon
Acteurs : Alexandra Lamy, Félix Moati, Sofian Khammes
Pays : France
Durée :
2h04
Sortie :
27 mars 2024
Distributeur :
Diaphana

Synopsis : Pour tenter de sauver son fils Martin injustement condamné à mort en Indonésie, Carole se lance dans un combat inégal contre les exploitants d’huile de palme responsables de la déforestation et contre les puissants lobbies industriels.

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